L'Oise Agricole 17 janvier 2022 a 09h00 | Par Sophie Chatenet

La laine, fil conducteur de la décoration tendance

Depuis 2019, le programme Oh my laine !, porté par l’association Lainamac (laines et fibres textiles naturelles du massif central), valorise et encourage les entreprises de la filière laine qui créent des produits finis dans l’univers de la décoration.

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Pour être filée, la laine doit d’abord être cardée, puis peignée ou pas, selon sa destination finale.
Pour être filée, la laine doit d’abord être cardée, puis peignée ou pas, selon sa destination finale. - © Agence de presse

L’association Lainamac structure, développe et promeut la laine dans ses dimensions à la fois économique, agricole et touristique. L’association est implantée à Felletin, dans le Sud du département de la Creuse, au cœur de la communauté professionnelle héritière multiséculaire du tapis et de la tapisserie d’Aubusson. Attachée à promouvoir des entreprises engagées dans la filière laine, l’association est constituée d’un vivier d’entreprises historiques, une communauté professionnelle dont certains savoir-faire figurent au patrimoine culturel immatériel de l’Unesco depuis 2009 et les produits du tapis et de la tapisserie d’Aubusson sont protégés depuis 2019 par un label d’État : l’indication géographique.

Fruits de la tradition locale du travail de la laine, les entreprises du réseau sont expertes dans la diversité de ses métiers : élevage, tonte, tri, lavage, literie, matelasserie, filature, teinture, tricotage, tissage, feutrage, tuftage, moquette, tapisserie ou encore restauration textile. «Lainamac œuvre pour la sauvegarde de la laine et de ses savoir-faire artisanaux à travers la transmission, le partage et l’échange afin de conserver la diversité des matières. Son objectif est également de mettre en lumière les acteurs de la filière laine, leur permettant ainsi d’atteindre un haut niveau de compétence pour constituer une filière laine vivante, responsable, au cœur des enjeux de demain, de la relocalisation de la fabrication française à la préservation des milieux naturels», résume Géraldine Cauchy, directrice de Lainamac. Historiquement liée au secteur de la décoration, la filière laine continue de tisser sa toile dans cette direction.

À la source

Dans cette perspective, depuis trois ans, Lainamac a initié le programme «Oh my laine !». Chaque édition rassemble une dizaine d’entreprises issue du secteur de la décoration d’intérieur et du fait main au sein d’un showroom éphémère à Paris à l’occasion de la Paris Design Week organisée en septembre et en virtuel. Tous ces artisans-créateurs façonnent la laine, réinterprètent le feutre, la maille, la tapisserie d’Aubusson, le tissé, le tuft ou le piqué, dans le respect des valeurs qu’ils partagent et avec une ambition : choisir et travailler les matières premières naturelles avec soin, dès leur source, et les sublimer afin de redonner à la nature sa place au sein de nos habitats.

Céline Camilleri cultive cet esprit dans son atelier de Blot-l’Église, dans le Puy-de-Dôme. Les collections de textiles tissés mettent en avant plusieurs races ovines françaises. «En fonction des saisons et des provenances, les tonalités des laines changent et présentent un panel de couleurs chaudes, non teintées, toujours profondes et étonnantes. Tout le processus de transformation de la laine est réalisé sur le territoire, une région riche en savoir-faire lainiers portés par les agriculteurs et artisans du secteur», raconte la jeune femme.

Un peu plus à l’Ouest, au cœur du berceau des tapissiers limousins, Jenny Braeckman façonne lentement la laine de mouton avec de l’eau, du savon et un savoir-faire maîtrisé. Son bagage créatif rassemblant les études d’arts plastiques, d’arts appliqués et d’histoire de l’art la mène à se passionner pour la laine et se forme plusieurs années auprès de feutrières de renom au sein du Centre de formation Lainamac, dans la Creuse, hébergé au sein du lycée des métiers du bâtiment. En 2019, cinq ans après sa rencontre avec le feutre et suite à un travail personnel persévérant, elle crée son atelier Mö Créations feutrées. Elle expose régulièrement dans des boutiques, des galeries et des marchés d’artisanat d’art. Elle a participé au Salon international du patrimoine culturel au Carrousel du Louvre, sous le pavillon Nouvelle-Aquitaine en septembre 2021.

Des profils de créateurs talentueux comme celui de Jenny, le centre de formation de Lainamac en détecte régulièrement. Le centre propose un programme de formation sur l’artisanat et les métiers d’art, structurés autour de neuf spécialisations, dont trois peuvent être sanctionnées par un certificat.

Retour en grâce d’une matière première ancestrale

À l’occasion de l’opération «Oh my laine !», la laine a également été mise en avant en tant que matière première dans le cadre du projet Lanathèque-Recherche porté par Lainamac sur la création de fils et matières innovantes à partir d’approvisionnement en fils 100 % tracés provenant de laines de Creuse. «Un espace du showroom a été consacré à la présentation de notre travail de recherche autour de nouveaux fils développés en partenariat avec les filatures creusoises pour donner envie aux professionnels, notamment aux marques françaises, de se réapproprier cette matière noble qu’est la laine», explique Géraldine Cauchy. Pour cela, ont été développés des fils à l’approvisionnement tracé en partenariat avec les filatures de Creuse. Ces fils ont été le point de départ des recherches textiles présentées par la designer Audrey Bigouin. C’est au sein de la société Blanchard Tech & Yarns, spécialiste de l’assemblage de fils, qu’elle a mené ce travail de recherche autour des assemblages et des croisements de matières. Créée en 1920, cette société se diversifie dans la fabrication de fils métalliques utilisant des métaux précieux à destination des marchés de la dorure. Elle élargit à partir des années 1960 son activité à la production de fils guipés, retordus et fantaisie à destination des marchés de l’habillement et de l’ameublement. Elle développe depuis 1990 des fils techniques, conçus pour des applications industrielles. La France produit environ 14.000 tonnes de laine brute provenant de la tonte sanitaire annuelle obligatoire des moutons, quelle que soit leur race. 80 % de cette matière première est actuellement exportée vers la Chine. Autant dire qu’il y a sérieux défi de réappropriation de cette ressource. C’est l’une des ambitions du collectif Tricolor, association interprofessionnelle dont l’objectif est d’accroître de 4 à 24 % la part de laine produite et transformée en France d’ici 2024.

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