L'Oise Agricole 15 avril 2021 a 08h00 | Par actuagri

La nécessité de s’adapter au consommateur final

Le ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation organisait, fin mars et début avril, les Journées Export Agro 2021 avec ses partenaires nationaux et régionaux dans le cadre du «plan de relance du commerce agricole et agroalimentaire français à l’international». De nombreux marchés européens et étrangers ont été abordés parmi lesquels l’Allemagne, l’Arabie, les États-Unis et la Chine.

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Aujourd’hui, Herta réalise plus de 50 % de son chiffre d’affaires sur les produits… vegans.
Aujourd’hui, Herta réalise plus de 50 % de son chiffre d’affaires sur les produits… vegans. - © Agence de presse

Si l’exportation est l’une des «pierres angulaires de la souveraineté alimentaire», a indiqué en ouverture de la session, le ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation, Julien Denormandie, il faut poursuivre la «sécurisation du dispositif, proposer une offre adaptée et promouvoir nos produits sur les marchés stratégiques», a-t-il ajouté. Il faudra surtout reconquérir quelques parts de marchés perdues depuis un an en raison de la crise du Covid. En effet, selon Agreste, le service statistique du ministère de l’Agriculture, l’excédent des échanges agroalimentaires français a certes atteint 6,3 milliards d’euros en 2020, mais il est en baisse de 1,4 milliard d’euros par rapport à 2019. Reconquérir les marchés perdus passera nécessairement par «l’adaptation de la chaine agroalimentaire aux attentes des consommateurs», ont tous insisté les attachés agricoles des pays ciblés. Des choix qui, pour la plupart se traduiront aussi dans les urnes puisqu’en Allemagne on s’attend à une forte progression du parti écologiste (Die Grünen – Les Verts) aux élections générales du 26 septembre qui mettra fin à l’ère Merkel. Les consommateurs-électeurs réclament «plus de bien-être animal, de la durabilité, du bio et de la santé», a expliqué Matthias Ginet, conseiller agricole à l’ambassade de France à Berlin. Ils ont aussi réduit leur consommation de viande d’environ 1kg/an/hab. et deviennent de plus en plus flexitariens, voire végans. C’est une tendance qu’a sentie le groupe agroalimentaire Herta qui réalise maintenant plus de 50 % de son chiffre d’affaires… sur des produits végans. De même la naturalité gagne en importance car les consommateurs allemands restent très attentifs au Zéro résidu pesticide (ZRP).

Produits sains et durables

Aux États-Unis, où le pouvoir d’achat reste en moyenne 50 % supérieur à celui des Français, c’est au "snacking" (grignotage) que les opérateurs français doivent s’adapter. En effet, les Américains ne font plus trois repas par jour, «mais six petits repas par jour», a indiqué Diane Santerne, Directrice "Service Clients" de la Sopexa à Washington. Là encore, les dimensions bio et santé deviennent puisqu’un tiers des consommateurs sont devenus flexitariens, dans ce pays qui reste le deuxième plus gros consommateur de viande au monde, derrière Israël. «On sent une montée en puissance des substituts de viande ainsi que des substituts de produits laitiers», a-t-elle ajouté. D’ailleurs, comme les Allemands, ils sont de plus en plus attentifs à la recherche «bénéfice-santé» (nutriscore Yuka…), aux aspects écologiques et éthiques (emballages durables). Une tendance qui commence également à copier les Chinois en attente de praticité et de co-branding sur leurs produits. En Arabie Saoudite et aux Émirats arabes unis, «manger est le deuxième sport national derrière le shopping», a affirmé Edwina Salvatori de Sopexa Moyen Orient.

La recherche de produits sains et durable constitue également un critère de choix en plus du fait que les autorités ont une réelle volonté de réduire leur dépendance alimentaire en construisant des fermes verticales, ont indiqué les intervenants.

Nouvelles barrières douanières

Cependant, la France a beaucoup à gagner à s’adapter parce qu’elle est identifiée comme un pays «livrant une alimentation et des produits de haute qualité. L’origine France est un vrai atout», a expliqué Alexander Mannweiler, directeur d’agence Sopexa Allemagne. Encore faut-il réussir à franchir les barrières douanières et le maquis réglementaire américain, fort de «2 700 sources normatives», a indiqué Christian Ligeard, attaché agricole à Washington. Le succès est parfois au rendez-vous (encadré).

Mais que ce soit les États-Unis, l’Arabie Saoudite ou la Chine, ces pays resserrent leur cadre réglementaire pour les importations, parfois au mépris des règles internationales et de tout fondement scientifique. La Chine maintient ainsi l’embargo sur les volailles françaises «en s’exemptant des règles de l’organisation mondiale de la santé animale» et «impose de nouvelles barrières et contraintes douanières sur les produits transformés par peur de transmission du Covid», générant des lourdeurs administratives supplémentaires.

Jambon de Bayonne et viande limousine s’implantent à l’étranger

Jean-Marc Escure directeur de Limousin promotion et Pierre-Yves Alifat, directeur général du Consortium Jambon de Bayonne ont témoigné de leur expérience sur l’exportation de leurs produits : le premier en Chine et le second aux États-Unis. Tous les deux n’auraient jamais pu intégrer ces marchés assez fermés sans les conseils de l’ambassade de France et de Sopexa. Ils ont tous les deux souhaité positionner leur produit sur le bon segment et se sont armés de patience. L’élément déclenchant pour Jean-Marc Escure a été le China International Import Expo (CIIE) de Shanghai de 2019 où le président Macron et son homologue chinois, Xi Jinping sont passé sur le stand du label rouge Limousin. «Nous nous sommes positionnés sur le haut de gamme, comme la viande de Kobé et nous pouvons valoriser le produit à un juste prix pour nos éleveurs», a-t-il affirmé. L’approche a aussi été collective pour le Jambon de Bayonne, le plus compliqué étant d’obtenir l’agrément des services américains pour l’abattoir et la salaison. Si le gros des ventes s’effectue à New York, «on a trouvé les marges mais pas encore les volumes», a expliqué Pierre-Yves Alifat qui espère se démarquer de ses concurrents historiques que sont les Espagnols et les Italiens en adaptant ses recettes au goût des Américains. «Dans un rapport d’un jambon de Bayonne vendu contre 500 jambons italiens et espagnols, nous sommes sur une niche», estime-t-il.

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