La plaine manque d'eau et l'inquiétude gagne les agriculteurs
Alors que la végétation est en pleine croissance, la pluie ne tombe pas sur l'Oise, ni ailleurs en France. Ce ne sont pas les quelques orages du week-end dernier ni ceux annoncés pour cette fin de semaine qui vont y changer quelque chose. Il faudrait de la pluie abondante et régulière pour «sauver les meubles» .
La sécheresse s'installe dans l'Oise depuis septembre dernier. Excepté octobre et décembre où les pluies ont été excédentaires par rapport aux normales, les mois ont enchaîné les déficits pluviométriques. Bruno Haas, élu à la Chambre d’agriculture de l’Oise, s'inquiète de cette sécheresse persistante. «D’après MétéoFrance, de la pluie est attendue en fin de semaine. Comme elle sera localisée, certains agriculteurs n'en bénéficieront pas. De plus, il ne faut pas que cela soit un épisode orageux car une forte averse risque de ruisseler au lieu de s’infiltrer dans le sol».
Selon lui, pour éviter ce problème d’eau il faudrait travailler sur l’amélioration des nappes et sur la recherche en développement pour trouver des variétés plus résistantes au sec ou des techniques culturales plus résilientes.
Côté organismes stockeurs, comme par exemple chez Valfrance, on s'inquiète particulièrement pour les cultures de printemps, orge de printemps, tournesol et maïs. «Sur la zone de collecte, les orages de dimanche dernier n'ont apporté que 4 à 10 mm, ce qui est loin de faire le compte», témoigne Christophe Grison, le président. Même s'ils semblent déjà décrocher, les blés d'hiver semblent corrects, excepté ceux semés tardivement derrière betteraves sucrières. «On anticipe déjà une récolte en baisse de 5 à 10 q par rapport au potentiel observé il y a encore quelques temps», se désole-t-il.
François Dumoulin, conseiller agro-écologie à la Chambre d'agriculture de l'Oise, précise que sur les beaux colzas avec du potentiel, ce sont les pluies à venir qui feront le poids de 1.000 grains donc le rendement pourrait ainsi varier de 20 à 40 q/ha. Pour ceux qui ont rapidement défleuri, malheureusement, les dés en sont jetés. Idem pour les blés : rien n'est perdu pour ceux en bonnes terres si la pluie tombe et on constate des pertes de pieds et d'épis sur les autres.
En ce qui concerne les cultures de printemps, le propos du spécialiste est nuancé. «Les cultures qui ont un faible développement à cette saison comme les betteraves, le tournesol ou le maïs, ont encore du potentiel, particulièrement dans les parcelles sans labour qui ont gardé la fraîcheur. Par contre, l'orge de printemps, dont la biomasse est très importante, subit le vent, la chaleur et le manque d'eau. Sur certaines cultures, un binage pourrait casser le film en surface et permettre de garder un maximum d'eau.
Les éleveurs doublement pénalisés
Bien entendu, la production fourragère n'échappe aux conséquences de la sécheresse actuelle. «Il y a moins de volume que l'année dernière par exemple et, surtout, avec le coup de chaud des derniers jours, la qualité a baissé, s'inquiète Alain Gille, président de la section lait de la FDSEA de l'Oise. Et puis, on peut s'interroger sur la qualité des maïs à venir, dont la levée est particulièrement irrégulière. Le désherbage n'en sera que plus délicat à réussir.» À cela s'ajoute la crainte d'une quantité de paille plus faible, les blés sont courts. «Au vu des prix actuels des engrais, des céréaliers vont choisir de broyer la paille plutôt que l'exporter, pour garder de la matière organique au sol. Ceux qui continueront de vendre aux éleveurs risquent de demander un prix plus élevé à cause de la hausse des coûts de production. Double peine pour les éleveurs, sauf pour ceux qui pratiquent des échanges paille-fumier, en espérant que ceux-ci ne soient pas remis en cause.» Alain Gille craint aussi la concurrence entre les éleveurs et les détenteurs d'unités de méthanisation sur les pulpes de betteraves. «Ceux qui n'étaient que des co-produits vont devenir des produits de luxe au rythme où vont les choses», lâche le responsable professionnel laitier.
Seuil de vigilance pour 5 bassins
Un comité de suivi de la ressource en eau s’est tenu ce mardi 17 mai. Après un bilan climatique, hydrologique, piézométrique et les perspectives climatiques pour la fin du printemps et l’été 2022, la DDT a présenté le projet de modification de l’arrêté-cadre sécheresse départemental. Nous retiendrons que les services de l’état auront désormais un délai maximum de 7 jours après la constatation du franchissement du seuil pour prendre les mesures de restrictions correspondantes.
Concernant particulièrement la profession agricole, l’irrigation des céréales à paille est interdite dès le franchissement du seuil de vigilance et après le 31 mai pour l’orge de printemps. Une distinction est désormais faite entre l’irrigation par aspersion et les systèmes d’irrigation localisés type goutte-à-goutte. Concernant l’aspersion, les mesures resteraient les mêmes pour les grandes cultures et les cultures maraîchères. S’agissant des cultures légumières de pleins champs en seuil de crise, l’irrigation étant permise à titre dérogatoire, une déclaration devrait être à adresser aux services de la DDT, cette dernière devrait exiger la nature de la demande, la raison, mais aussi la période de mise en œuvre et les volumes estimés.
On notera également que 5 bassins ou sous-bassins devraient basculer dans les prochains jours sous le seuil de la vigilance (Avre, Brèche, Divette, Aronde, Automne). La DDT a également présenté un travail mené par le Service économie agricole pour une action décentralisée permettant l’anticipation et l’action rapide sur les dérogations liées à la sécheresse, notamment sur la valorisation des jachères SIE, la dérogation à la levée des cultures dérobées SIE et éventuellement les mesures de cotisations sociales (MSA) ou fiscales (TFNB), mais aussi la mise en place de dispositifs locaux d’entraide et de solidarité, ou d’accompagnement des exploitants. En cas de doute sur les conditions d’irrigation, vous pouvez consulter le site http://propluvia.developpement-durable.gouv.fr/propluvia/faces/index.jsp
Les opinions emises par les internautes n'engagent que leurs auteurs. L'Oise Agricole se reserve le droit de suspendre ou d'interrompre la diffusion de tout commentaire dont le contenu serait susceptible de porter atteinte aux tiers ou d'enfreindre les lois et reglements en vigueur, et decline toute responsabilite quant aux opinions emises,