Malgré la bonne récolte, des planteurs inquiets
Le Syndicat betteravier de l'Oise a organisé ses réunions de groupements mi-janvier et bien que la campagne soit presque terminée avec des résultats remarquables, ce sont des questions et des doutes qui ont été exprimés par les planteurs.







Nicolas Rialland, directeur des affaires publiques à la Confédération générale des betteraviers, a rappelé le contexte particulier de cette première campagne sans quota. L'objectif poursuivi par les industriels était une augmentation des surfaces et un allongement de la durée de campagne pour écraser les charges de structure, gagner en productivité et garder des parts de marché. En effet, une sucrerie qui fonctionne un jour de plus, c'est une baisse de coût de production de 1 EUR/t de sucre. Il s'agissait donc de passer de 100-110 jours de campagne à 130-140 jours pour gagner 30 % de compétitivité, soit un gain d'environ 4,50 EUR/t de betteraves.
Dans ce contexte, la question du partage de la valeur et du retour vers les planteurs des économies réalisées est un vrai sujet. Indépendamment, le dossier néonicotinoïdes a occupé les services de la CGB qui cherche à obtenir des dérogations pour la culture de la betterave car celle-ci n'émet pas de fleurs et donc ne nuit pas aux abeilles. Sans cette protection de la graine, la jaunisse peut causer de lourds dégâts (perte de 20 % de rendements sur les zones infestées) et augmenter le coût de production de 26 à 29 EUR/t.
À ce propos, la CGB rappelle aux planteurs qu'il est nécessaire de bien connaître son coût de production et que des formations sont organisées. De même, un outil sera mis en ligne sur le futur extranet de la CGB qui devrait ouvrir bientôt et qui permettra aux planteurs de se situer.
Mais le principal souci des planteurs reste le niveau des marchés du sucre et leur suivi. Les cotations des marchés à terme de New York et Londres montrent que les cours mondiaux ont fortement baissé depuis un an. Sur l'Europe, la tendance est la même et on peut regretter le manque de transparence de l'observatoire des prix européens du sucre qui ne permet pas d'avoir un suivi précis de ces évolutions.
Et lorsqu'on transpose les cours actuels du sucre européen et mondial, mais aussi de l'éthanol en betterave, on obtient un prix moyen de la betterave à 23 EUR/t contre 26 EUR/t en février 2017. Donc, la principale interrogation soulevée par les planteurs présents à ces réunions du SBO concerne bien entendu le prix final auquel seront payées les betteraves et de savoir si les groupes sucriers se sont couverts. Car seule une partie du prix est payée et le prochain versement devrait intervenir fin mars alors que les planteurs devront aussi payer leurs semences 2018, ce qui pourrait poser des problèmes de trésorerie.
D'où un fort questionnement. Et certains de s'interroger clairement : «avec une récolte exceptionnelle à 100 t/ha, on ne va pas tellement gagner notre vie alors, qu'en sera-t-il lorsque les rendements seront plus bas ?»
La CGB demande donc plus de transparence sur le marché et la construction du prix, une stratégie de gestion des risques, le recours au marché à terme afin de proposer des arrêts de prix aux planteurs et une épargne de précaution plus efficace (DPA) ainsi que le développement de l'assurance récolte et réfléchit à la mise en place d'un fonds mutuel.
Une récolte remarquable
Henri Faes, directeur adjoint au SBO, a dressé le bilan de cette campagne. D'abord, les surfaces ont augmenté de 18 % dans l'Oise et de nouveaux planteurs se sont lancés dans la betterave. Par rapport au planning prévisionnel, la campagne va durer quelques jours de plus et elle se solde par une récolte exceptionnelle. Les prélèvements effectués régulièrement cet été par le SBO avaient montré un potentiel de rendement supérieur à 2016 et 2015. Et les résultats sont là : 102,5 t/ha (betterave entière), soit, 95,3 t (forfait collet déduit) de rendement à 16 % estimé au 15 janvier (voir schéma). Par contre, avec l'allongement de la campagne, on observe une courbe de la richesse en sucre qui augmente jusqu'à fin octobre, puis qui diminue ensuite (voir schéma).
En ce qui concerne le suivi réalisé par le SBO, avec l'allongement des campagnes, la qualité des enlèvements et du déterrage est un point à suivre de près. Les planteurs doivent signaler ce type de disfonctionnement au SBO.
Les chargements sur les routes départementales sont une première. En effet, auparavant, il était hors de question qu'un camion stationne sur la chaussée. Finalement, les conditions ont été revues et, avec des feux tricolores ou une signalisation adéquate, ces chargements sur route se sont bien déroulés.
Mais, et c'est Emmanuel Pigeon, directeur du Syndicat betteravier Hauts-de-France, qui insiste : attention à la boue laissée sur la chaussée. Le principe de la responsabilité est simple : c'est celui qui met la boue qui est responsable et qui doit donc assurer le nettoyage. Cela peut donc être l'agriculteur quand il constitue le silo ou l'usine lors de son enlèvement. Celui qui assure le nettoyage prend la responsabilité en cas d'accident. Le SBO souhaite également que ce dossier avance au niveau national et que des solutions pratiques et proches du terrain puissent être trouvées sur ce sujet. Une expérimentation a été menée à Roye avec l'intervention d'une société de nettoyage, mais il faudra en tirer les enseignements pour les campagnes à venir sur l'organisation ou la prise en charge des coûts.
Par ailleurs, des interventions ont été nécessaires parfois auprès des industriels pour des lavages non conformes, notamment sur l'usine d'Étrépagny. Le réglage des laveuses a été revu à la demande des contrôleurs du Syndicat betteravier car trop de nombreuses betteraves étaient meurtries.
Emmanuel Pigeon a insisté sur la volonté de la CGB de mettre en avant le dossier du partage de la valeur ajoutée, notamment en lien avec l'allongement des campagnes. Par exemple, les indemnisations prévues en cas d'arrachages précoces sont insuffisantes comme le montre le schéma et c'est un des points à revoir pour les prochaines campagnes comme la prise en compte des arrachages tardifs et des longues conservations. Pour les fins de campagne, il faudra continuer à construire un système d'indemnités pertinent au regard des pertes réellement constatées, tant au niveau du silo, qu'au niveau de la parcelle du planteur.
Éthanol, de bonnes nouvelles
Nicolas Rialland a annoncé qu'en 2017, le SP95-E10 est devenu le premier carburant consommé par les Français avec 42 % des volumes. De plus, le boîtier E85 vient d'être homologué. Il permet de transformer tout véhicule essence en véhicule flex fuel, c'est-à-dire pouvant rouler à l'E85, dont le prix est de 0,67 EUR/l.
Même si le boîtier coûte 500 EUR et que le véhicule consomme 25 % de plus avec l'E85, on estime que l'investissement est amorti au bout de 15 mois. Par ailleurs, la prochaine directive européenne devrait maintenir le taux d'incorporation à 7 % pour les biocarburants de première génération.
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