À la recherche de plus de valeur ajoutée
Installé depuis juin 2015 à Mortemer, Mathieu Mansard, 32 ans, est ouvert à toute opportunité qui lui permettrait de maintenir la rentabilité de son exploitation de polyculture-élevage.
Dès l'obtention de son baccalauréat professionnel Conduite et gestion des exploitations agricoles, Mathieu Mansard s'est plongé dans la vie active, d'abord comme salarié chez son ancien maître de stage dans la Somme pendant un an, puis sur l'exploitation familiale avant de s'installer seul, ses parents sont maintenant à la retraite.
Aujourd'hui, la ferme couvre 158 ha en deux sites, un sur Mortemer et l'autre sur Lassigny, avec un assolement varié : blé, maïs, tournesol, féverole, betteraves sucrières,lin textile, pois de conserve, escourgeon, luzerne et des pâtures. Ces dernières sont utilisées par une troupe de 120 mères. «Sur la ferme, à l'époque de mon grand-père, il y avait une production de lait. Puis des vaches allaitantes ont remplacé les laitières et, au final, mon père, pas passionné par les bovins, a lancé un élevage de moutons», explique le jeune exploitant.
Un atelier rentable
La troupe est constituée d'une dominante Île-de-France sur laquelle ont été ajoutés des croisements avec un bélier charollais et un suffolk qui complètent les trois béliers Île-de-France utilisés en lutte naturelle . «J'ai des agneaux mieux conformés grâce à ces croisements : en R, U et même un E cette année pour la première fois !», sourit Mathieu Mansard. Peu de mortalité dans le troupeau, pour une productivité supérieure à 1,5 et parfois jusqu'à 1,9 agneaux par brebis.
Mais la conseillère de la coopérative Bergers du Nord-Est, à laquelle Mathieu Mansard livre sa production, lui a conseillé de ne pas accentuer les croisements pour garder des agnelages bien groupés comme c'est actuellement le cas. «Les agnelages se produisent entre le 15 novembre et le 15 décembre pour la plupart, sauf les agnelles à partir de mi-février», détaille le jeune éleveur.
Les animaux sont essentiellement nourris avec des fourrages et concentrés produits sur l'exploitation : herbe, pulpes sèches de betteraves, brisures de pois, blé et orge, foin. Des formules pour les agneaux et des tourteaux de colza sont achetés, au minimum. «Mes agneaux sont produits sous label rouge, avec des prix autour de 7,20 EUR/kg carcasse, ce qui est bien supérieur à ce qui se pratiquait il y a dix ou 20 ans. Avec des frais vétérinaires minimes et une grande autonomie alimentaire, la production est rentable. Mes agneaux sont tous vendus à quatre mois pour Pâques, à un poids vif de 40 à 45 kg», se félicite Mathieu Mansard.
Les agneaux sont abattus à Rethel puis commercialisés en boucheries et grandes surfaces du secteur. Il est très satisfait du travail de la coopérative Bergers du Nord-Est dont il est administrateur stagiaire.
Le troupeau lui permet de dégager l'équivalent d'un petit Smic, ce qui encourage Mathieu Mansard à augmenter le nombre de brebis. «Avec mes bâtiments et mon organisation actuels, je pense que je peux passer de 120 à 160 brebis sans avoir beaucoup plus de travail car les animaux sont en bergerie entre 6 et 7 mois de l'année. Cela me permettrait d'augmenter le chiffre d'affaires de l'élevage. Mais à condition de faire attention aux investissements nécessaires à la production fourragère, qui peuvent vite devenir coûteux.»
Il regrette néanmoins l'éloignement de l'abattoir. «Si celui de Mondidier reprenait une activité, je pense que j'aimerais monter un laboratoire et commercialiser quelques agneaux en circuits courts, pour dégager un peu plus de valeur ajoutée.»
Des projets individuels ou collectifs
Car Mathieu Mansard est par ailleurs inquiet sur le contexte climatique et réglementaire. «Bien que je sois dans une situation satisfaisante depuis mon installation, l'année 2020 m'aura, comme beaucoup, un peu plombé le moral car les résultats ont été moindres alors que j'ai toujours de grosses annuités à rembourser pour mon installation. Être agriculteur, c'est quand même beaucoup de travail, mais c'est aussi un métier avec un bel espace de liberté et je suis plutôt heureux de ce choix», concède-t-il.
Il essaie d'investir avec d'autres agriculteurs dans du matériel de récolte : une moissonneuse-batteuse à trois pour des chantiers de moisson en commun, une arracheuse à betteraves avec d'autres jeunes, les frères Moermann et Jimmy Dewaele. Et, pratiquant une agriculture conventionnelle, s'inquiète de son image dégradée auprès des consommateurs qui ont de nombreux clichés sur le métier. «Je n'ai aucun souci de voisinage mais les demandes sociétales deviennent de plus en plus contraignantes et menaçantes. Avec le changement climatique, c'est un point qui m'inquiète», confie Mathieu Mansard.
Il s'est engagé auprès d'une douzaine d'autres agriculteurs dans une réflexion sur la création d'une unité de méthanisation. «Il y a une belle cohésion dans le groupe et nous avons pas mal avancé dans l'élaboration du projet. Malheureusement, nous buttons actuellement sur l'emplacement qu'il nous faut acquérir pour construire notre unité de méthanisation. J'espère que nous allons rapidement trouver notre bonheur afin que ce projet collectif voie le jour», espère Mathieu Mansard.
En attendant, il s'intéresse au semis direct, cherche de nouvelles cultures à implanter comme la cameline, derrière ses pois de conserve dont la production est contractualisée avec un opérateur belge. «C'est une expérimentation que je mène avec le Ceta mais, malheureusement, pour l'instant, je n'ai pas encore réussi à récolter de la cameline. Mais je ne désespère pas d'y arriver», sourit-il.
Sinon, Mathieu Mansard est impliqué dans le syndicalisme jeune, il est vice-président des JA sur le secteur Saint-Just et Maignelay et il s'est beaucoup investi en 2017 lors de l'événement Terres de Jim qui s'est déroulé dans l'Oise. «C'était un travail énorme. Je participais à la mise en place du pôle végétal. Cela a été une expérience très forte et très formatrice, j'en garde de très bons souvenirs», s'enthousiasme-t-il. Il souhaite continuer d'ailleurs son engagement syndical, pourquoi pas à la FDSEA ?
Bien sur sa ferme, Mathieu Mansard est de ceux qui, pour avancer, croient aux projets, qu'ils soient individuels ou collectifs.
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