Brice Guyau : «Rabâcher en permanence que la bio existe encore»
Le président de la section agriculture biologique à la FNSEA se réjouit de la reprise de la demande en bio, mais plaide pour davantage de promotion et le respect de la loi Egalim.

La filière bio a traversé une période difficile avec une baisse de la consommation et des déconversions. Où en est-on aujourd'hui ? Percevez-vous des signes de reprise pour l'agriculture biologique en France en cette mi-2025 ?
La crise que l’on a connue était principalement due à une inadéquation entre offre et demande. On commence à voir dans certaines filières un réajustement que l’on doit malheureusement aux déconversions. Quelques signaux positifs d’augmentation de la consommation ont permis d’avoir un marché plus en phase et des prix qui redeviennent intéressants. L’aspect climat et récolte n’est pas à négliger : avec la mauvaise récolte 2024, les stocks ont été totalement remis à zéro. La dynamique des prix correspond un peu plus aux attentes de la production.
Que propose la FNSEA pour faire perdurer cette reprise ?
On travaille depuis plus de deux ans sur le plan ambition bio qui a cette volonté d’analyser exactement où en est la filière. Deux des leviers sur lesquels la FNSEA a insisté sont la communication auprès du grand public et le respect de la loi Egalim. Une campagne de publicité a enfin démarré. La pub est un des meilleurs vecteurs pour relancer la consommation. Nous avons également poussé les deux derniers plans de soutien et porté la nécessité d’accompagner ceux qui sont le plus en difficulté. On demande aujourd’hui à ce qu’une partie des reliquats des aides bio soit réintégrée pour ceux qui sont encore dans la filière. D’autres dispositifs de soutiens existaient lorsque le bio était en pleine croissance, je pense notamment à la MAB, qui nous fait défaut aujourd’hui. Avoir des aides cycliques en fonction du besoin serait à réfléchir pour la nouvelle phase qui s’amorce.
Vous appelez à davantage de communication sur l’agriculture biologique. Quel type de communication est nécessaire selon vous pour relancer la consommation et rétablir la confiance des consommateurs ? Comment éviter la stigmatisation de l'agriculture conventionnelle dans ces campagnes ?
Rabâcher en permanence que la bio existe encore ! Des entreprises comme Biocoop le font très bien et on doit s’en inspirer. Il faut le marteler pour que le consommateur n’oublie pas. Il est également important de réexpliquer ce qu’est le cahier des charges et l’ensemble des aménités positives de l’agriculture biologique afin que les consommateurs trouvent un intérêt à acheter des produits bio. Et on peut mettre en valeur la bio sans dénigrer les autres pratiques. Une bonne communication veille à ne pas opposer les agriculteurs, mais explique leur complémentarité. C’est un travail que peuvent effectuer les interprofessions.
Au-delà de la consommation des ménages, quels sont les leviers de développement de nouveaux débouchés pour les produits bio (export, transformation, etc.) ?
Nous l’avons dit et redit à la ministre, un des principaux enjeux est le respect de la loi Egalim et des 20 % de bio dans la restauration collective. Ajouté à une forte communication, on devrait relancer la consommation. Et nous avons tout intérêt à avoir un vrai marché pour l’agriculture biologique si on veut répondre au défi de renouvellement des générations sachant que 35 % des jeunes qui s’installent le font en agriculture biologique.
Vous l’avez dit, la loi EGalim fixe un objectif de 20% de bio dans la restauration collective. Ce chiffre est encore loin d'être atteint. Que préconisez-vous pour que cet objectif soit pleinement respecté et que les produits français soient privilégiés ?
S’il n’y a pas de carotte pour obliger les collectivités à y aller, elles n’iront pas ! On a donc proposé à la ministre qu’il y ait des points de bonification sur les projets touchant aux collectivités s’ils respectent la réglementation.
La question de l'avenir de l'Agence Bio a été soulevée. Quelle est la position de la FNSEA sur son rôle et son financement ? Est-il crucial de maintenir un budget fort pour l'accompagnement des agriculteurs bio?
Pour nous à la FNSEA, l’important est d’avoir un budget dédié à la communication pour l’agriculture biologique. Après, que celui-ci soit dirigé par Pierre, Paul ou Jacques, ça n’a pas d’importance. Reste qu’il faut bien savoir que la production biologique est transversale et non en silo. L’agence bio avait l’avantage d’être piloté par des professionnels et non par des administratifs. Mais que l’agence ait un caractère individuel ou qu’elle soit incluse dans FranceAgriMer, peu importe,
seul le résultat compte : que la filière ait les moyens de sa communication et de son développement.

Plus que jamais, l’agriculture bio a besoin d’être soutenue
Si certains adhérents ont l’impression que la FNSEA est trop timide sur les problématiques de la filière biologique, il est pourtant indispensable que la maison mère la soutienne fermement.
60.000 exploitations bio existent aujourd’hui en France. 35 % des installations se font en agriculture biologique. On ne peut pas vous abandonner.
Et ce soutien commence par le maintien de l’Agence bio, qui œuvre pour le développement et la promotion de l’agriculture biologique. La suppression de son budget communication ainsi qu’une partie des budgets d’investissements, notamment la campagne «c’est bio la France», ne sont pas des messages positifs envoyés à destination de la ferme biologique française. L'Agence bio se doit d’être une structure forte. La supprimer ou la déplacer dans les bureaux des archives du ministère est inconcevable !
Un autre point fort est attendu, celui concernant la revalorisation de l’ecorégime. L’annonce des 110 € par hectare n’est pas suffisante. La corporation estime qu’une valorisation au minimum à 145 € par hectare semble être une juste valeur. Et ce n’est pas le financement qui manque puisque le reliquat de l’enveloppe non consommée par la filière biologique est aujourd’hui complètement détricoté. Preuve en est, le ministère souhaite ponctionner le budget initialement destiné au secteur bio pour l’octroyer aux jeunes agriculteurs. La volonté d’octroyer des financements aux nouvelles générations est évidement entendable et nécessaire, mais inacceptable lorsqu’elle est la résultante de l’effondrement d’une filière agricole. Déshabiller Paul pour habiller Jacques, quelle drôle de vision de la part de nos politiques. Une vision à court terme.
Pourtant, Madame Annie Genevart semble entendre les difficultés de l’AB, à en lire son communiqué relatif au soutien de l’agriculture biologique du 18 juin dernier (N/ réf: SCR/2025D/209).
Madame la ministre, des actes sincères sont attendus afin qu’ensemble, nous puissions améliorer le quotidien de milliers d’agriculteurs bio.
La FDSEA60 est à l’écoute de chacun d’entre vous, vous êtes la force du territoire et vos problématiques seront remontées à la FNSEA.
Bonne et heureuse moisson à tous.
Simon Muller, président de la section bio FDSEA de l'Oise
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