L'Oise Agricole 21 avril 2022 a 09h00 | Par Mathieu Robert

Chez Emmanuel Macron, «pas de changement de paradigme»

Loi d'avenir pour l'installation et la transmission, chèque alimentaire, «virage écologique» d'entre-deux-tours... Dans un entretien réalisé le 19 avril, Audrey Bourolleau la coordinatrice du groupe agriculture et alimentation de la campagne d'Emmanuel Macron livre les derniers détails du programme agricole du président-candidat à la présidentielle.

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Les derniers dés sont lancés avant le second tour de l'élection présidentielle qui oppose le sortant Emmanuel Macron à Marine Le Pen.
Les derniers dés sont lancés avant le second tour de l'élection présidentielle qui oppose le sortant Emmanuel Macron à Marine Le Pen. - © Agence de presse

Le programme du candidat Emmanuel Macron est-il définitivement ficelé ?

L'intégralité des mesures ont été présentées, entre le Salon de l'agriculture, le Grand oral et les dernières prises de parole du Président de la République, avec trois angles majeurs : les enjeux de souveraineté, l'accompagnement des transitions et la loi d'avenir pour préparer les futures générations. Le tout dans un contexte particulier, celui notamment de la crise Ukrainienne qui témoigne de l'importance stratégique et géopolitique de l'agriculture. Les dernières mesures, présentées au Caf, relèvent plutôt de la simplification. Elles sont beaucoup remontées lors des auditions de notre groupe de travail. L'objectif est d'éviter les surtranspositions, pour un passage de toute nouvelle mesure devant le Corena.

Durant l'entre-deux-tours, Emmanuel Macron a évoqué l'idée d'un «virage écologique». Quelle incidence sur l'agriculture ?

Il n'y a pas de changement de paradigme, nous resterons dans la ligne de l'accompagnement des transitions, pas d'interdiction sans solution. Le discours de Marseille pose un enjeu de méthode, celui de la planification pour accompagner tous les secteurs dans les transitions. L'agriculture a un rôle à jouer dans la lutte contre le réchauffement climatique par la capacité par exemple de stoker du carbone dans les sols. Ce qui a été annoncé sur la planification énergétique va aussi bénéficier aux agriculteurs. Deux tiers des fermes vont produire de l'énergie d'ici quelques années.

Quelles mesures sur les énergies vertes ?

Ce sera tout l'objet des prochains appels à projets qui sont à venir dans des déclinaisons de planification écologique. Mais une campagne c'est donner une orientation, ce n'est pas entrer dans le comment.

Il faut rappeler que beaucoup de choses ont déjà été initiées dans le quinquennat précédent. La loi Agec, la loi Egalim 2, loi Climat et résilience entrainent déjà des changements forts à opérer. Il s'agit déjà de les mettre en oeuvre. Il faut de la visibilité pour les acteurs, c'est qui est notamment ressort de la centaine d'acteurs que nous avons auditionnée dans le cadre du groupe de travail.

Une «loi d'orientation agricole» a été promise. Quel serait son périmètre ?

Cette loi d'avenir porte sur l'installation et la transmission. L'idée est de mettre en place d'une politique d'installation pour renouveler les générations et installer 20 000 nouveaux agriculteurs par an.

L'idée est d'ouvrir sans tabou, à 360 degrés, l'ensemble des sujets qui puissent servir l'installation. C'est une entrée qui peut toucher aux sujets du foncier, des cédants, des diagnostics carbone...

Pourquoi donner la priorité à l'installation dans votre programme ? L'agrandissement n'est-il pas un gage de compétitivité ?

La thématique du revenu a été au coeur du premier quinquennat. Il faut poursuivre cette bataille et consolider les agriculteurs en place, mais aussi préparer l'avenir. Sur la politique d'installation, le syndicat Jeunes agriculteurs dit qu'il y a des simplifications à faire pour être plus efficace, pour mieux accompagner les nouveaux entrants. C'est dans cette optique que nous voulons travailler. Nous voulons aussi mettre en oeuvre le fonds de portage du foncier qui a été annoncé. L'objectif n'est pas seulement l'installation, mais aussi la transmission, l'accompagnement des cédants, que leurs exploitations aillent à l'installation ou à l'agrandissement. Bien transmettre c'est avoir quelque chose à valoriser économiquement.

Face au Parlement, il y a quelques mois, Julien Denormandie évoquait l'idée de travailler davantage sur la nutrition pour un éventuel second mandat. De quoi s'agit-il ?

C'est notamment l'idée du chèque alimentaire. L'idée était de garantir que l'on n'ait pas demain une alimentation à deux vitesses dans notre pays et de garantir une approche nutritionnelle pour tous.

C'est la vision du groupe de travail agricole : on a besoin d'une mesure sociale, le Covid a accentué ces inégalités, notamment chez les plus jeunes. Ce n'est pas à un groupe de travail de campagne de rentrer dans les modalités de distribution, l'éligibilité de tel ou tel produit. Dès qu'on prend une décision comme celle-ci, il y a des conséquences pratiques. Cela doit se faire en concertation avec les acteurs.

Faut-il faire un rapport avec le plan fruits et légumes, annoncé dans le cadre du plan de résilience et dont on ne sait encore rien ?

Il y a effectivement un sujet à éclaircir sur les politiques européennes de promotion des fruits à l'école. Pour atteindre une alimentation de qualité pour tous, il y aura de nombreux leviers, dont les plans de filières - et les fruits et légumes peuvent être un levier - mais il y a aussi les plans alimentaires territoriaux.

Ce volet nutritionnel touche-t-il la restauration collective ?

La restauration collective est un dossier qui a déjà été travaillé lors du précédent mandat, avec nos objectifs d'approvisionnement plus locaux et plus durables. Nous voulons aussi poursuivre une tarification sociale des cantines, pour faire face aux stratégies d'évitement des cantines chez les familles modestes qui n'ont pas accès à la cantine.

La réduction de la viande parait être un sujet tabou au ministère. Pourtant le Giec recommande d'actionner ce levier pour protéger le climat, tout comme 800 chercheurs pour baisser les tensions sur le marché des grains. Sur l'élevage, nous avons mis en avant les clauses-miroirs, rappelé que nous avons des systèmes d'élevage herbagers qui peuvent avoir des bénéfices pour le climat, et prôné l'idée de «manger mieux» des viandes de qualité. Mais ce que nous observons, c'est que c'est la diminution de la viande qui permet de passer des coûts de repas accessibles à tous.

Est-ce qu'il n'y a pas un risque à ce que l'effort de manger moins de viande soit fait davantage à Roubaix que dans le 16e arrondissement de Paris ?

Il existe une tarification sociale, que nous voulons faire perdurer pour les foyers les plus modestes, mais l'Etat n'est pas toujours décisionnaire. Il y aura le chèque alimentaire, mais aussi le plan stratégie pauvreté, avec notamment l'accompagnement des familles monoparentales.

Est-ce que le poste de ministre de l'Agriculture vous intéresserait ?

J'ai souhaité accompagner ce groupe de travail par fidélité et loyauté auprès du président. Je pense qu'il est important que la société civile puisse aussi s'engager. Après cette campagne, je resterai à la tête d'Hectar, qui est mon projet.

- © FNSEA

Christiane Lambert, présidente de la FNSEA

«Un deuxième tour à fort enjeu pour l'agriculture»

Fidèle aux valeurs de responsabilité et d'engagement de la FNSEA, je veux appeler les agricultrices et les agriculteurs à voter dimanche 24 avril ! Exprimez votre choix, faites valoir vos aspirations personnelles, participez à votre avenir, votez !

Ce vote a une importance capitale pour notre pays. Évidemment. Mais il a aussi une importance capitale pour l'avenir de notre agriculture. Tout au long de cette campagne, la FNSEA a porté auprès des candidats des propositions permettant d'atteindre la souveraineté alimentaire durable par la relance de la production. Nous avons réussi à faire bouger des lignes. La crise sanitaire et la guerre en Ukraine ont fait prendre conscience que, pour nourrir la population, il faut produire plus. Produire durablement et réaliser les transitions agroécologiques et énergétiques indispensables, mais indéniablement produire ! De plus, et les émeutes du Sri Lanka le démontre actuellement : il ne peut y avoir de stabilité démocratique dans le monde sans production agricole et alimentaire. Concrétiser durablement ce mouvement passe par la mise en place de politiques priorisant une production agricole relocalisée et durable, qui dispose de moyens d'adaptés et d'innovation. L'accent doit être mis sur la rémunération des agriculteurs et la compétitivité de notre modèle agricole. Notre agriculture doit s'intégrer dans une Europe unie et forte qui ne fait pas machine arrière pour redonner la primauté à des politiques nationales divergentes et irréconciliables. Nous devons pouvoir compter sur une Europe qui remet au centre de ses préoccupations la croissance durable et protège l'agriculture de concurrences déloyales. Produire l'alimentation pour tous est la mission première de l'agriculture : soyons en fiers ! L'alimentation fait aujourd'hui partie des préoccupations de premier plan des Français. Elle est porteuse de valeurs et de perspectives pour la société tout entière. Soyons fiers de ces valeurs de partage, de solidarité et de lien social inhérente au «bien manger» et attachons-nous à les faire vivre ! Voilà, chers amis, agricultrices et agriculteurs de France, les éléments qui me semblent essentiels à prendre en compte pour notre agriculture au moment de faire votre choix dans les urnes. J'en appelle à votre discernement pour entendre les propositions structurantes qui feront rayonner notre ambition agricole :

- Pour une agriculture ouverte sur l'Europe, ouverte sur le monde ;

- Pour produire l'alimentation pour tous, réussir les transitions, apporter des solutions dans la lutte contre le changement climatique ;

- Pour contribuer au bien vivre ensemble dans des territoires vivants et dynamiques. Le 24 avril : votons !

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