Des espoirs sur les prix, mais des inquiétudes quant aux moyens de production
Les adhérents de la CGB Oise étaient invités le 8 juin pour leur assemblée annuelle : élections, point sur le marché du sucre, sur les avancées du Plan national de recherche et d'innovation étaient à l'ordre du jour.
Pierre Dewilde, qui remplaçait Alexis Hache indisponible, accompagné d'Henri Faes, directeur adjoint de CGB Oise, Emmanuel Pigeon, directeur de la CGB Hauts-de-France, et Nicolas Rialland, directeur général de la CGB, ont brossé le rapport d'activité 2022 et les perspectives 2023.
2022 aura été marquée par un printemps sec, avec des problèmes de désherbage, et un été caniculaire et sec, un démarrage anticipé de certaines sucreries qui ont versé une indemnité d'arrachage précoce. Plus tard, décembre a subi un épisode de gel et les rendements n'ont pas progressé, sans doute à cause de la sécheresse. Fait particulier, des betteraves non marchandes à l'arrivée en sucrerie. Le bâchage Top Tex a montré ses limites et des planteurs ont subi de lourdes pertes, partiellement compensées pour les planteurs Tereos.
Au final, les 1.529 planteurs de l'Oise ont cultivé 34.780 ha, pour un rendement de 67,5 t à 16°, un des plus bas en France, le département ayant aussi beaucoup subi la sécheresse.
Vers 50 EUR/t ?
Heureusement, les prix ont été plus favorables pour la betterave, le cours du sucre se portant plutôt bien. Mais, si la CGB Oise veut croire à un prix autour de 50 EUR/t, elle n'oublie pas la formidable hausse des charges subie par les planteurs et les risques pris avec des semences non traitées NNI. «Au niveau mondial, on constate une dynamique haussière car certaines régions (Inde, Chine, Mexique) ont moins produit. Le marché du sucre est tendu et devrait le rester», analyse Nicolas Rialland. Les spéculateurs sont très présents sur le sucre actuellement, mais pas aux prix records constatés en 2022.
Au niveau européen, c'est le statu quo. Les surfaces sont stables, malgré la baisse en France, compensée par des hausses dans les pays de l'Est. La prévision de production s'établit à 14,7 millions de tonnes de sucre pour une consommation estimée de 16,6 M t, en déficit et donc des importations. Les imports habituels se font à hauteur de 2,2 millions de tonnes ; au-delà, il faudra payer des droits de douane de 419 EUR/t en plus du prix du sucre ! Le marché spot en Europe est actuellement de 800 EUR/t. Avec un gaz à 50 EUR/ MWh, plutôt à la baisse, les betteraves sucrières devraient être payées entre 52 et 58 EUR/t selon les hypothèses. «50 EUR/t est un prix probable», assure Nicolas Rialland.
Un dernier mot sur l'éthanol dont le marché se calme après la flambée pendant la crise Covid. À 70-80 EUR/hl, il est moins rémunérateur que le sucre et il y a une concurrence avec celui produit à partir de céréales, comme c'est le cas pour 80 % de l'éthanol en Europe. Avec une hausse de la consommation de 85 %, la France n'est plus autosuffisante.
Enfin, Nicolas Rialland rappelle la procédure d'indemnisation jaunisse à caler pour cette année. «Les discussions sont en cours. Le dispositif doit être validé par le ministère de l'Agriculture et Bercy, puis devra faire l'objet d'un accord de Bruxelles. Nous ne communiquerons pas tant que tout ne sera pas calé.»
Et d'insister sur le bras de fer avec Bruxelles qui, d'un côté, prône la souveraineté alimentaire et, de l'autre, veut baisser l'utilisation des phytos de 50 %. «Nous répétons : pas d'interdiction sans solutions. C'est le boulot du syndicalisme agricole de défendre les moyens de production. Personne d'autre ne le fera», conclut le directeur.
Et le PNRI ?
Ghislain Malatesta, de l'ITB (Institut technique de la betterave), et Marthe Lesne, responsable commerciale Hauts-de-France et Normandie chez Betaseed, ont fait le point sur les 23 projets de recherche qui regroupent plus d'une quarantaine de partenaires. Les axes de recherche sont très larges, depuis la connaissance de la jaunisse, les leviers agronomiques, l'élevage de pucerons, les produits de biocontrôle... 70 fermes pilotes testent des solutions sur des surfaces d'environ 15 hectares, au plus proche du terrain. D'abord, les solutions insecticides encore autorisées (Teppeki et Movento) sont évaluées, avec une efficacité de 75 à 80 % (contre 100 % pour les NNI). Ensuite, la conduite des betteraves avec des plantes compagnes. L'avoine semble faire fuir les pucerons : 7 % de betteraves avec de la jaunisse si accompagnées, 40 % si elles sont seules. Mais il faut détruire l'avoine au stade 4 à 6 feuilles, sinon elle concurrence la betterave. 46 produits de biocontrôle ont été testés, dont deux sortent du lot : le MycotalSquad, un champignon, et l'huile de paraffine, mais pour des efficacités peu élevées. Quant aux bandes fleuries, outre les difficultés de levée, elles ont un effet faible sur la population de pucerons, pas au delà de 5 m dans la parcelle de betteraves voisines.
Les attentes se portent vers des variétés de betteraves tolérantes à la jaunisse. Celles déjà commercialisées sont testées sur ce critère, tout comme les mélanges variétaux. Dans les parcelles d'essais, les pucerons virulifères sont déposés au pinceau sur chaque bouquet foliaire (un travail de fourmi !) et on observe, par drone et par analyse, le développement de la jaunisse. Les semenciers se sont regroupés dans un projet collaboratif, Flavie, afin de tester 750 variétés sur 53.000 micro-parcelles. À l'issue de ce programme, les semenciers espèrent pouvoir proposer aux planteurs des variétés tolérantes à la jaunisse, avec une augmentation du rendement ou, a minima, une stagnation. En 2024, des variétés d'intérêt jaunisse sortiront et une deuxième vague est attendue pour 2026.
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