C'est à Savignies, près de Beauvais, que la Chambre d'agriculture de l'Oise et le GIEE (Groupement d'intérêt économique et environnemental) du Cernodo ont accueilli les éleveurs laitiers pour une journée innovante autour de la valorisation des prairies. Invités dès le déjeuner pour faire le plein de forces, c'est au moment du café que les participants ont été répartis en équipe de 3 ou 4 personnes. La consigne était simple : «Vous devez aider monsieur Cernodo, éleveur laitier sur le Nord-Ouest de l'Oise, à trouver des solutions techniques pour améliorer la productivité de ses prairies. Pour cela, partez à l'assaut des différentes épreuves proposées. Répondez en échangeant au sein de chaque équipe et les meilleures équipes seront récompensées par des chocolats de Pâques.» Autant dire que l'enjeu était de taille !

Concours «l'oeil de l'éleveur»
La première épreuve consistait à se rendre sur des parcelles pâturées et à évaluer, au plus juste et sans aucune aide (pas d'herbomètre), la hauteur d'herbe présente et en déduire ainsi la quantité de matières sèches disponible pour un troupeau sur cette même parcelle. Pour cela, les participants se sont rendus sur les parcelles de Vincent Delargillière, exploitation laitière en système herbager bio avec 27 paddocks de pâturage. L'objectif principal de cette épreuve était d'initier les éleveurs à comprendre l'intérêt de bien évaluer la quantité de biomasse disponible sur une parcelle et ce, afin d'adapter leur conduite du troupeau au plus juste. Car, que ce soit pour des systèmes très herbagers comme pour des systèmes avec maïs ensilage, connaître la quantité d'herbe avec précision permettra, pour les uns de manager plus finement les rotations de parcelles, et pour les autres, d'adapter au mieux la complémentation dans la ration, et dans les deux cas, gagner de l'efficacité technico-économique dans un contexte de prix des aliments tendu, comme c'est le cas actuellement.
A ce petit jeu, certains se sont révélés très performants, quand d'autres ont pris conscience de leur besoin d'améliorer leur oeil !
Après cette épreuve de terrain, les participants ont tourné sur les différentes épreuves suivantes qui leur étaient proposées.

Décrypter le codage secret
La seconde épreuve consistait à trouver les plantes les plus favorables afin d'adapter les prairies aux conditions de sécheresse de plus en plus importantes sur le secteur. Pour y parvenir, il s'agissait de décrypter un codage composé de chiffres reliés à des lettres qui amenaient à des noms de plantes. Des plantes qu'il s'agissait ensuite de classer en fonction de leur sensibilité aux conditions climatiques sèches. Ainsi, parmi les plantes sensibles, il était possible d'identifier la fétuque des prés, les ray grass ou encore la fléole des prés. A contrario, parmi les plantes plus résistantes, il leur fallait identifier le trèfle Blanc, la luzerne, la fétuque élevée (source d'erreur des participants avec la fétuque des prés) et le dactyle.

Séquence puzzle
Autre atelier, autre épreuve à relever pour les équipes d'Herbe tour : il s'agissait de reconstituer 4 photos/puzzles représentant 4 situations de rénovation de prairies et 4 solutions différentes à mettre en oeuvre. Du traitement des adventices suivi d'un sursemis, en passant par le sursemis avec passage préalable des animaux, jusqu'au retournement complet de la parcelle, les différentes situations ont été sujet à débat pour proposer la solution la plus adaptée ; avec notamment un débat très intéressant, entre éleveurs bio et conventionnels, sur l'une des photos montrant du pissenlit en quantité importante. Pour les uns, il s'agissait d'une plante à faire manger par les animaux quand pour les autres, il était question d'une adventice.  

La phrase inversée
Dernière épreuve pour les équipes : celle de la phrase inversée. Il s'agissait alors, en partant d'une phrase écrite de façon inversée, d'identifier les solutions techniques pour faire produire une prairie temporaire à base de luzerne. Parmi les bonnes solutions à trouver, le besoin d'apporter de la potasse en quantité, la nécessité d'inoculer et de laisser fleurir une fois, et parmi les pièges à déjouer, celui de l'apport d'azote ou d'une seule récolte dans l'année.

La fertilité biologique des prairies, un sujet à creuser
Parmi les sujets traités par le groupe GIEE, il y a celui de la fertilité biologique et de l'impact de la quantité et qualité de la matière organique sur sol prairial. Travaillé depuis plusieurs années au travers de différentes expérimentations, Herbe tour a donc aussi été un moment privilégié pour rendre compte des résultats obtenus. Vincent Yver, animateur du GIEE a ainsi souligné l'importance de s'intéresser au fonctionnement du sol. «La productivité des prairies est au coeur du triptyque sol/ plante/animal, a-t-il rappelé avant de préciser. Si je nourris bien mon sol, il nourrira bien les plantes qui nourriront bien les animaux ! En tant qu'éleveur, on a tendance à s'intéresser en premier lieu à la ration des vaches puis, à comment alimenter la ressource fourragère par la fertilisation, mais très rarement à comment alimenter notre sol. Or, c'est le point de départ de tout système agroécologique».
Ainsi depuis 2019, le groupe a pu mettre en place différentes actions visant à évaluer plus précisément le niveau de fertilité des sols prairiaux et à jauger des pratiques à mettre en oeuvre pour améliorer la situation.