La production de semences face aux crises
À l'occasion d'un point presse l'Union française des semenciers (UFS) est revenue sur les nuages qui se sont accumulés sur cette filière au cours de l'année 2022.
La guerre en Ukraine, en entraînant une flambée des prix des commodités agricoles, a rendu la production de semences beaucoup moins attractive pour les agriculteurs multiplicateurs. La concurrence des cultures classiques n'incite guère les agriculteurs à se lancer dans une production qui nécessite attention et un savoir-faire particulier. Résultat, les 400 000 hectares de surface consacrées aux semences ont diminué de 2 % au profit des céréales et oléagineux. «Il faut redonner un intérêt à la production de semences», a averti Claude Tabel, président de l'UFS, craignant que cette baisse se poursuive, «sinon les tensions sur les marchés en 2023-2024 vont s'accentuer, car des semences découle la production agricole de l'année suivante», a-t-il ajouté. L'UFS demande la réduction de la distance d'isolement entre les cultures classiques et la production de semences, notamment pour le tournesol qui a été une valeur refuge pour les agriculteurs. En réduisant cette distance de 500 m à 300 ou 400 m, et en décalant les semis, cela permettrait de redonner de l'espace pour placer la production de semences.
Rôle stratégique
Le facteur essentiel pour garantir la production de semences reste cependant l'accès à l'eau. 40 % des programmes de recherche portent sur l'adaptation au changement climatique, mais les résultats ne verront pas le jour avant une dizaine d'années. Pour garantir l'accès à l'eau, l'UFS souhaite, pour la production de semences, une exemption en cas de délestage. Elle demande aussi des mesures pour assurer l'accès à l'eau à certains stades clés de la production, même en cas de tension. Autre poste important, celui de l'énergie. Le séchage des semences se déroule à l'automne. C'est une opération déterminante car elle évite le gâchis. Or, ce séchage subit les contrecoups de l'augmentation du prix du gaz. «La hausse des coûts aura des répercussions sur le prix des semences et entraînera une perte de compétitivité à l'exportation», a indiqué Claude Tabel avant d'annoncer d'autres «signaux inquiétants pour l'avenir». En effet, la production de maïs semences n'a atteint que 70 % de ses objectifs, ce qui risque de décourager les producteurs et nécessitera l'obligation de puiser dans les stocks de sécurité. Si la production de semences d'oléagineux a été correcte, on note en revanche une baisse de 10 % dans le domaine des fourragères et l'inquiétude de voir disparaître le trèfle violet.
Révision de la réglementation
Après ce bilan inquiétant, Claude Tabel est revenu sur les enjeux concernant la réglementation des semences et le statut juridique des NBT (*). Treize directives communautaires régissent actuellement le domaine des semences. Une tentative d'harmonisation est en cours et le texte de la Commission européenne devrait être connu au premier semestre 2023. Cette nouvelle réglementation sera le cadre juridique des semenciers pour les quinze prochaines années. L'UFS insiste pour que les deux piliers que sont l'inscription au catalogue national et la certification soient maintenus. La notion de durabilité, que les producteurs français appliquent déjà, devrait être ajoutée. Claude Tabel a également rappelé la nécessité de mettre en place une réglementation concernant les NBT : «Que voulons-nous en France et en Europe ? Si nous n'avons pas le droit d'utiliser ces nouveaux outils, nous ne le ferons pas, mais la ferme France sera pénalisée alors que ces techniques permettent de relever les défis du Green Deal.» Le cadre légal européen de l'édition génomique ne devrait toutefois pas être en vigueur avant 2025.
(*) New breeding techniques / Nouvelles techniques de sélection végétale
NBT : Greenpeace demande un étiquetage obligatoire à la grande distribution
Dans 23 villes françaises, les groupes locaux de Greenpeace France se sont mobilisés le 19 novembre autour de supermarchés pour inviter les enseignes de la grande distribution à demander au gouvernement la mise en place de l'étiquetage obligatoire de «tous les OGM», dont les «nouveaux OGM» ou NBT. «Sans le savoir, nous pourrions retrouver demain des nouveaux OGM dans nos champs et nos assiettes. (...) La grande distribution a le pouvoir de changer les choses en interpellant le gouvernement pour plus de transparence», précise Suzanne Dalle, chargée de campagne agriculture à Greenpeace France. Cette journée nationale intervient alors que des discussions sur un possible assouplissement de la législation concernant les NBT sont en cours au niveau européen. Concernant ces derniers, Greenpeace estime que «le principe de précaution doit être respecté» et qu'une «réglementation stricte» doit être mise en place. Aux yeux de l'association, ils comportent en effet «les mêmes risques pour la biodiversité que les OGM classiques». Et d'ajouter qu'ils «renforcent le poids économique d'une poignée de multinationales qui s'approprient les semences, contribuant ainsi à l'industrialisation de l'agriculture et à la dépendance du monde paysan».
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