L'Oise Agricole 23 mars 2022 a 17h00 | Par M.R.

Plan de résilience : le gouvernement cherche à limiter la casse

Annoncé au Salon de l'agriculture par Emmanuel Macron, un Plan de résilience a été présenté, le 16 mars, par le gouvernement pour faire face aux conséquences de la guerre en Ukraine sur les cours des matières premières. Les mesures font la part belle à l'agriculture, qui bénéficie de dispositifs dédiés au même titre que la pêche, les transports et le BTP.

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Mercredi 16 mars, le Premier ministre, Jean Castex, a détaillé les mesures de France 2030 qui contribueront au plan
Résilience économique et sociale pour notamment sécuriser l'approvisionnement en intrants critiques, renforcer
la souveraineté énergétique et renforcer la souveraineté alimentaire de l'Europe.
Mercredi 16 mars, le Premier ministre, Jean Castex, a détaillé les mesures de France 2030 qui contribueront au plan Résilience économique et sociale pour notamment sécuriser l'approvisionnement en intrants critiques, renforcer la souveraineté énergétique et renforcer la souveraineté alimentaire de l'Europe. - © Matignon

Le gouvernement avait promis des mesures sectorielles pour l'agriculture. C'est chose faite. Avec le BTP, le transport et la pêche, l'agriculture fait partie des quatre secteurs économiques à avoir fait l'objet de mesures dédiées, dans le cadre du Plan de résilience présenté officiellement le 16 mars. Symboliquement, Julien Denormandie faisait d'ailleurs partie des trois ministres présents lors de la conférence de presse du Premier ministre, avec le ministre de l'Économie et la ministre de la Transition écologique. Le jeune ministre de l'Agriculture a détaillé les mesures concernant le secteur agricole, qui ont été présentées en deux temps. D'abord une batterie de dispositifs d'urgence, qui visent essentiellement à renflouer les exploitations agricoles touchées par la hausse des carburants ou de l'alimentation animale. Et puis des mesures visant à renforcer la «souveraineté alimentaire». Côté trésorerie, les mesures touchent le coût de l'énergie, de l'alimentation animale et les cotisations sociales. Débutons par le carburant. En sus des quinze centimes par litre de remise à la pompe annoncés plus tôt dans la semaine sur le gazole non routier (GNR), les agriculteurs bénéficieront d'un remboursement anticipé de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) au titre de l'année 2021. Chaque année au mois de juin, l'État rembourse partiellement les agriculteurs de cette taxe. Ce versement sera donc anticipé de quelques mois. Dans la même veine, les agriculteurs pourront bénéficier, sur demande, d'un acompte de 25 % du remboursement de la TICPE 2022, à partir du 1er mai (date du débat des déclarations).

Maraîchers, éleveurs, sucreries...

Toujours sur l'énergie, le secteur agricole et agroalimentaire sera éligible à une aide transversale dédiée aux entreprises fortement consommatrices de gaz et d'électricité. Pour y émarger, ces charges devront représenter plus de 3 % de leur chiffre d'affaires, et elles devront être déficitaires en 2022. L'État pourra alors supporter «la moitié du surplus» de charges «dans la limite de leurs pertes», a expliqué le ministre de l'Agriculture. Ce dispositif devrait notamment s'adresser «aux maraîchers, aux producteurs de volaille, aux sucreries, aux entreprises laitières qui sèchent le lait», a cité le ministre. Enfin, des aides visent l'aliment du bétail et les cotisations sociales. Des aides ciblées toucheront les élevages «fortement dépendants en aliment du bétail», a annoncé le ministre de l'Agriculture. Une enveloppe de 400 ME y sera dédiée, et versée d'ici deux mois, prenant en compte une période de quatre mois à compter du 15 mars. Elle permettra de prendre en charge «une partie de leurs pertes de marge, dans la limite des pertes de l'exploitation agricole», détaille Matignon. Une réunion est prévue «dans les prochains jours» sur ce dispositif, selon le ministre. Enfin, Julien Denormandie a annoncé que l'enveloppe dédiée à la prise en charge des cotisations sociales sera abondée de 60 ME en 2022 «pour prendre en compte les exploitations confrontées à des hausses de charges qui dégradent leurs comptes».

Mesures «additionnelles» pour «sécuriser»

Au-delà des mesures d'urgence visant à conforter la trésorerie des exploitations agricoles, le plan de résilience contient quatre mesures «additionnelles» ayant pour objectif de «sécuriser les producteurs et la production agricole en 2022», a annoncé le ministre de l'Agriculture. La première était la réunion, vendredi 18 mars, des acteurs des filières agroalimentaires en vue d'«entamer sans délai de nouvelles négociations commerciales». Le gouvernement n'a pas précisé si cette annonce serait assortie de mesures réglementaires. L'objectif annoncé est de «mettre en oeuvre les mécanismes d'indexation, de renégociation et du cadre des pénalités logistiques», a détaillé le ministre.

Le second volet consiste en une série de dispositifs visant à «produire plus» sur la prochaine campagne. Il s'agirait de mettre en oeuvre la «valorisation des jachères», actuellement discutée au niveau européen, mais également de faire «la promotion d'un système de trois cultures en deux ans», de mettre en place un «plan de lutte contre les dégâts de gibier sur nos cultures stratégiques» et un «suivi de l'irrigation». Ces mesures n'ont pas été précisées.

Troisième volet : les engrais. Si la campagne de printemps ne fait pas l'objet d'inquiétudes, un «plan de sécurisation» de l'approvisionnement est annoncé, pour assurer la campagne d'automne. Il inclut la mise en place d'un groupe de travail dédié et «l'adaptation ou le report» de mesures «pouvant impacter la disponibilité en 2022». Julien Denormandie a d'ores et déjà précisé que les discussions sur l'évaluation environnementale du stockage des engrais étaient reportées sur décision de Matignon. Par ailleurs, plusieurs plans (ou leur renforcement) sont annoncés «pour accélérer les transformations de long terme» : un «plan souveraineté azote» privilégiant la «production d'engrais verts» ou la «valorisation d'engrais organiques» ; le «renforcement du plan protéines végétales» dans le cadre de France 2030 ; le «développement d'un plan de souveraineté énergétique, agricole et alimentaire pour accélérer les énergies renouvelables et la décarbonation de l'amont agricole» et, enfin, «l'élaboration d'un plan français et européen dédié aux fruits et légumes». Autant d'annonces dont le contenu n'est pas encore connu.

Les Prêts garantis par l'État seront prolongés et accentués

Au-delà des nouvelles dispositions annoncées, «des outils qui ont fait leurs preuves pendant la crise sanitaire seront de nouveau mobilisés, et adaptés aux spécificités de cette crise», a indiqué le Premier ministre. Des prêts garantis par l'État (PGE), dispositif qui a soutenu la trésorerie de plus de 700 000 entreprises, pourront être souscrits pour un montant maximum relevé à 35 % du chiffre d'affaires des entreprises, contre 25 % auparavant. Un nouveau PGE dont le montant est fixé à 10 % du chiffre d'affaires devrait en outre être lancé à partir du 1er juillet. Les entreprises pourront aussi bénéficier de reports de paiement de cotisations fiscales et sociales et le dispositif d'activité partielle de longue durée (APLD) sera prolongé de douze mois.

Les industriels plutôt satisfaits des annonces

Le Plan de résilience a été accueilli plutôt favorablement par les industriels de l'agroalimentaire. Le 16 mars, le président de la Coopération agricole a salué un plan qui «prend bien en considération les points critiques» qu'elle avait énoncés «en prévoyant des mesures pour faire face à l'augmentation des coûts des matières premières agricoles et de l'énergie». Et de promettre de «veiller aux modalités de mise en oeuvre de ces mesures». Le même jour, les industriels de l'Ania ont affiché également leur satisfaction de voir que «le secteur agroalimentaire est reconnu comme stratégique». Elles saluent notamment le «relèvement du plafond des prêts garantis par l'État et la possibilité du report des charges», tout comme l'appel à «ré-ouvrir des négociations avec leurs clients distributeurs dans les plus brefs délais». En revanche, l'Ania se dit «inquiète» de l'«adéquation» du «bouclier énergétique» avec la «réalité des entreprises». L'association rappelle que les industriels «font face, depuis déjà plusieurs mois, à un contexte inflationniste qui fragilise leur état de santé économique».

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