«Redynamiser les cantons pour un syndicalisme de terrain»
Elles forment le premier duo féminin à la tête d'un syndicat Jeunes Agriculteurs départemental. Anaïs Lucien et Gwenaëlle Desrumaux viennent d'être élues respectivement présidente et secrétaire générale de JA 60. Elles ont réservé leur première interview à L'Oise Agricole.
Pouvez-vous vous présenter ?
Anaïs Lucien : J'ai 23 ans, je suis la gérante de la boutique de la ferme, à Lachapelle-aux-Pots, puisque nous transformons une grande partie du lait produit. C'est une exploitation familiale de polyculture-élevage. Auparavant, j'ai fait un bac STAv puis un BTS Acse en apprentissage, notamment dans une exploitation qui avait une boutique de produits locaux. J'ai poursuivi par une licence pro commerce agricole en apprentissage, toujours sur la même ferme. Je suis revenue sur l'exploitation familiale en tant que salariée sur la partie transformation avant de reprendre la boutique à mon compte EN AVRIL 2018.
Gwenaëlle Desrumaux : J'ai 25 ans et j'ai un statut de salariée sur l'exploitation familiale d'Offoy, en polyculture-élevage laitier. Suite à un bac L, j'ai fait une licence de journalisme et de communication avant de revenir dans les études agricoles lors d'un BTS productions animales à Gench (59). J'ai été inséminatrice chez Gènes Diffusion, puis je suis partie quatre mois sur une ferme en Australie. C'est à mon retour que je suis devenue salariée sur la ferme familiale.
Quel est votre parcours syndical ?
A.L. : Mon père, Bruno Lucien, a toujours été adhérent à la FDSEA et s'est impliqué au sein des producteurs laitiers. Mon frère, Alexandre, est aux JA et à la FDSEA. Mes amis sont également investis dans la défense professionnelle. Autant dire que le syndicalisme, c'est une affaire familiale !
G.D. : Même chose pour moi ! Je me suis engagée avec mon père à la FDSEA. Et j'ai découvert les JA au travers du canton de Formerie qui a remobilisé celui de Grandvilliers. À la maison, le syndicalisme, c'est un vrai sujet.
Comment s'est passée l'élection ? Vous attendiez-vous à obtenir ce poste ?
A.L. : Absolument pas ! J'étais d'accord pour être secrétaire générale car je voulais un poste en lien avec les cantons. Lors de l'assemblée du 6 février, j'ai d'ailleurs été élue secrétaire générale dans un premier temps, mais personne ne se lançait comme président. Julien Degry voulait absolument rester secrétaire général adjoint, alors, j'y suis allée !
G.D. : Je voulais bien être au conseil d'administration, mais de là à être membre du bureau... D'autant plus que comme mon père était déjà fortement engagé à la FDSEA, j'avais peur qu'on vienne nous le reprocher ! Et puis, finalement, avec Anaïs comme présidente, je me suis lancée.
Anaïs et Gwenaëlle : au final, nous sommes très fières d'être le premier duo féminin aux JA de l'Oise, et même au niveau national. C'est assez inédit ! Nous espérons que cela va inciter des jeunes agricultrices à s'impliquer syndicalement !
Quels sont pour vous les dossiers les plus urgents ? les événements prévus dans l'année ?
Anaïs et Gwenaëlle : L'installation reste la priorité des Jeunes Agriculteurs, à la fois sous l'aspect transmission, mais aussi sous celui de la formation. Ensuite, nous voulons mener une forte campagne d'adhésion au sein des cantons JA qu'il faut redynamiser. Nous réfléchissons aux moyens d'aider des jeunes à prendre des responsabilités et, pourquoi pas, en remettant en place une école de responsables.
Enfin, nous travaillerons sur les sujets de fond qui agitent le monde agricole actuellement et assurerons la défense du métier.
Pour ce qui est des événements de l'année, le premier a lieu les 24, 25 et 26 avril à Paris, devant l'hôtel de ville. Il s'agit des Toqués qui visent à faire connaître les produits locaux. Chaque région aura son stand et des démonstrations culinaires avec des chefs sont prévues. Au niveau départemental, une nouvelle édition de Campagne en fête se déroulera les 12 et 13 septembre, au Plouy-Saint-Lucien, à proximité de Beauvais. Nous miserons sur de nombreuses animations pour faire découvrir notre métier aux urbains.
Comment allez-vous travailler avec les autres organismes agricoles ?
Anaïs et Gwenaëlle : Nous devons être au plus proche pour assurer une défense professionnelle cohérente et collective. Pour ce faire, nous avons prévu de rencontrer les acteurs du monde agricole : Groupama, MSA, FDSEA, Chambre d'agriculture, Crédit agricole, CerFrance, AS 60... mais aussi les collectivités et les administrations avec lesquelles nous sommes amenées à travailler régulièrement. L'idéal serait d'avoir pu rencontrer tout le monde avant l'été pour faire connaissance.
N'avez-vous pas peur de cette féminisation dans un milieu fortement masculin ?
Anaïs et Gwenaëlle : Nous n'avons pas peur ! C'est au contraire un véritable défi que nous relevons ensemble et une grande fierté ! Le monde agricole se féminise, 21 % des installés sont des femmes et les installations se font de plus en plus hors cadre familial.
L'une comme l'autre, nous voulons démontrer que la place d'une femme dans une exploitation d'élevage, ce n'est pas forcément à la traite, à l'élevage des veaux et à la comptabilité. On peut faire tout autre chose ! Et puis les femmes doivent prendre des responsabilité en dehors de la ferme, participer à la défense du métier. Christiane Lambert est un exemple de réussite pour toutes. Elle a un message clair, se fait respecter, c'est un modèle !
Comment imaginez-vous le travail des JA ?
Anaïs et Gwenaëlle : Nous avons trop l'impression que les idées ou les combats viennent de JA national et redescendent dans les départements. Dans l'idéal, c'est aussi l'inverse qui doit se produire. C'est pour cela que nous souhaitons mettre en pl ce un véritable travail de terrain au sein des cantons JA.
Nous devons gagner des adhérents, faire comprendre aux jeunes agriculteurs qu'ils ont de l'importance et qu'ils doivent apporter leur pierre à l'édifice de la défense syndicale. Il faut redonner de la confiance à chaque échelon du syndicat.
Dans un premier temps, un séminaire de deux jours a été organisé en Normandie suite à l'élection du nouveau conseil d'administration. Seule la moitié des membres a pu venir, mais c'était un très bon temps d'échanges pour apprendre à nous connaître et forger un véritable esprit de groupe nécessaire au bon fonctionnement du syndicat. Nous nous sommes mis d'accord sur l'essentiel, avons confronté nos idées et avons partagé nos expériences.
Comme ce conseil d'administration est composé pour moitié de nouveaux élus et pour moitié d'anciens, cela forme une équipe équilibrée dont nous sommes très satisfaites. C'est un excellent départ et nous allons investir dans le relationnel au sein de l'équipe. C'est comme cela que nous serons efficaces !
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