L'Oise Agricole 01 décembre 2023 a 09h00 | Par Stéphanie Doligez

Un nouvel arrêté restreint le retournement des prairies permanentes

Un arrêté préfectoral régional a été signé le 27 novembre 2023 et soumet le retournement des prairies permanentes à un régime d'autorisation dans le cadre du programme d'action régional nitrates.

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- © G. Coisel

Le retournement des prairies permanentes est de toutes façons déjà interdit dans les zones à plus de 7 % de pentes, les zones humides et les aires d'alimentation de captages, en application de la directive nitrates.
Depuis le 1er novembre, une ouverture existait sur le reste du territoire puisque les restrictions dans le cadre de la Pac (régime d'autorisation lié à un ratio de dégradation des surfaces en prairies permanentes compris entre 2 % et 5 %) ne s'appliquent plus en Hauts-de-France pour la campagne 2023/2024 où le ratio s'élève désormais à 1,83 %.
La fenêtre qui existait est à présent refermée puisqu'un nouvel arrêté préfectoral prend le relais à compter du 27 novembre et soumet le retournement des prairies à un régime d'autorisation dans le cadre de la directive nitrates.


Déplacements possibles sur déclaration
En dehors des zones à enjeux (pentes, zones humides, aires d'alimentation de captage), cet arrêté régional donne plus de la souplesse que le régime Pac précédent sur le déplacement de prairies permanentes puisque le retournement de prairies et réimplantation d'une surface au moins équivalente ailleurs est possible sur simple déclaration en DDT(M).
Attention néanmoins, pour tout déplacement de prairies supérieur à 4 ha, il est nécessaire de procéder à une demande d'examen au cas par cas auprès de la Dreal qui jugera si le déplacement de prairies doit être soumis ou non à étude d'impact.
Pour être déclarés correctement dans la déclaration Pac 2024, les retournements et réimplantations devront être effectués pour le 15 juillet 2024. Les surfaces réimplantées devront être maintenues pendant cinq ans.

Retournements soumis à autorisation
Le retournement de prairies sans réimplantation est soumis à autorisation délivrée par la DDT(M). Les demandes sont à formuler avant le 31 décembre. Le retournement sans réimplantation est limité à 300 ha pour la région.
Aussi, un ordre de priorité a été établi. Seuls peuvent demander un retournement de prairies, et dans cet ordre :
- les agriculteurs en difficulté (engagés dans une procédure « agridiff ») et les agriculteurs rencontrant une incapacité définitive à poursuivre leur activité d'élevage, reconnue par la MSA ;
- les éleveurs ayant plus de 75 % de prairies permanentes dans leur SAU ;
- les jeunes agriculteurs éleveurs ;
- les installations en maraîchage.
Pour les trois derniers cas, le retournement ne peut dépasser 25 % de la surface en prairies de l'exploitation. Les autorisations seront délivrées par la DDT(M) avant le 15 mars 2024. Les retournements devront être réalisés avant le 15 juillet 2024.

Des obligations supplémentaires liées à l'azote
S'agissant d'un arrêté pris dans le cadre de la directive nitrates, l'administration impose la réalisation de reliquats sortie d'hiver pendant deux ans suivant le retournement de la prairie, donc en 2025 et 2026 pour une surface retournée au printemps 2024.

- © AAP

La prairie mal traitée par la réglementation


Voila une réglementation supplémentaire qui va s'appliquer à l'élevage et aux prairies. L'objectif à la base est louable et partagé : préserver les surfaces en pairies dans la région. Cependant, la superposition des réglementations ne joue pas en faveur du maintien des prairies.
En effet, à compter de 2024, il y aura obligation d'implanter des jachères au titre de la Pac. Toutes les surfaces historiquement en jachères et requalifiées en prairies depuis quelques années par l'administration ne pourront pas être déclarées en jachères en 2024. Pour les agriculteurs concernés, c'est la double peine : devoir maintenir des prairies qui n'en sont pas vraiment d'un point de vue économique et implanter des jachères ailleurs.
Et ne parlons pas des haies dont l'intérêt environnemental ne peut être reconnu dans la Pac si elles sont autour des prairies, on marche sur la tête encore une fois !
Tout concorde à ce que la prairie soit perçue comme une contrainte pour l'agriculteur. C'est tout le contraire que nous souhaiterions mettre en avant. La culture de l'herbe, qu'elle soit temporaire ou permanente, doit être mise en avant, réellement travaillée techniquement et soutenue réglementairement.
Ce nouvel arrêté, en imposant des reliquats pendant deux ans après retournement et en limitant la possibilité d'autonomie alimentaire à une très faible surface, passe à côté d'une partie des enjeux.
Aussi, les FDSEA et la FRSEA déposeront un recours au tribunal administratif pour tenter de lever cette contrainte et inciter administration et profession à se mettre réellement au travail pour le maintien de l'herbe productive et efficace pour l'élevage et pour l'environnement.

Marie-Françoise Lepers, sécrétaire générale de la FRSEA Hauts-de-France

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