Une auge à ciel ouvert avec la betterave fourragère
Une opération «portes ouvertes» s'est tenue la semaine dernière sur le littoral de la Côte d'Opale pour vanter l'intérêt du pâturage d'une parcelle de betteraves fourragères par des bovins laitiers
Pour les animaux qui profitent d'un accès direct à la parcelle, c'est «une friandise» à en croire Rémi Pigneaux, conseiller fourrages et pâturages d'Agro Fourrages. Pour Mathieu Crepin, l'éleveur qui expérimente la pratique à Saint-Inglevert (62), il s'agit d'une mise en place relativement simple, et des avantages nombreux.
Fin de semaine dernière, Agro Fourrages, le semencier KWS Momont et Semae organisaient une opération «portes ouvertes» à l'EARL du Haut-Buisson pour vanter les mérites du pâturage de la betterave fourragère en élevage bovin (laitier ou viande). La technique consiste à implanter des betteraves dans une parcelle dédiée où les bovins ont accès une fois par jour pour les consommer en complément d'une ration alimentaire «classique». Si la démonstration portait sur les bénéfices de l'apport de betteraves fourragères en élevage laitier, celles-ci peuvent aussi servir à l'alimentation d'autres animaux, dont les ovins et les caprins.
Effet bénéfique sur les taux
Pour Rémi Pigneaux, l'intérêt d'intégrer le pâturage de la betterave fourragère dans un bilan fourrager est d'abord de «compenser un manque de fourrage dans un contexte tendu», qu'il s'agisse d'un manque lié à un épisode de sécheresse ou d'un rationnement d'autres matières, comme la pulpe de betteraves sucrières.
L'expert est formel : «C'est une technique connue des éleveurs, mais pas forcément utilisée...» Responsable de marché au sein de la maison de semences KWS Momont, Thierry Chesneau confirme : «On sort d'une période où la betterave fourragère était tombée en désuétude et sortie des systèmes fourragers dans un objectif de simplification. Mais aujourd'hui, on sent un regain d'intérêt pour la betterave fourragère...»
KWS Momont la présente comme une culture aux multiples avantages : «riche en énergie avec une production entre 15 et 20 000 UF/ha», «amélioration de la qualité du lait avec une augmentation des taux TB et TP», «fourrage très appétant», «concentré énergétique pour le rumen», «augmentation des poids de carcasse et amélioration de la santé des animaux». À l'EARL du Haut-Buisson, l'intégration de la betterave fourragère dans la ration a permis un gain d'un point de TP et d'un point de TB. L'éleveur explique «ne pas avoir diminué la ration de base», mais se réjouit de constater que «cela a amélioré la qualité du lait». L'acidose ? «Évidemment, il y a un risque si on en donne trop, rappelle le spécialiste d'Agro Fourrages. C'est pour cela que l'accès à la parcelle est limité par un fil qu'il faut déplacer quotidiennement.»
Améliorer l'autonomie fourragère
Agronomiquement, la betterave fourragère a l'avantage de plutôt bien résister aux aléas climatiques, dont la sécheresse. Pour toutes ces raisons, «KWS Momont n'a jamais abandonné la recherche et la sélection variétale en betteraves fourragères», indique Thierry Chesneau. Pour lui, la première motivation des éleveurs à se porter sur la betterave fourragère est «la recherche d'autonomie fourragère».
«La betterave fourragère est coûteuse à l'implantation, mais par rapport au taux de matière sèche qu'elle rend (de 13 à 25 %, ndlr), c'est intéressant par rapport à d'autres fourrages», constate Rémi Pigneaux. En 2022, chez Mathieu Crepin, «malgré un feuillage peu développé, le rendement en feuilles était de 4 t/ha. Cette année, il est d'environ 7t/ha», rappelle M. Pigneaux pour qui l'ingestion des feuilles de betteraves fourragères par les bovins apporte de l'azote de l'énergie en quantité. Grâce à une bonne conduite de la culture, on peut espérer une production de 15 à 20 tonnes de matière sèche par hectare (racines et feuilles).
Cinq variétés pour des utilisations diverses
Au catalogue de KWS Momont, on trouve cinq variétés de betteraves fourragères. «Le choix est fonction de l'utilisation qu'on veut en avoir», assure M. Chesneau. Blanche, jaune rose ou rouge ? «La couleur permet d'identifier la variété en fonction de sa matière sèche», explique-t-on chez KWS Momont. C'est aussi en fonction de cette couleur que l'on sait si une betterave sera plus ou moins adaptée au pâturage, à une récolte mécanique... ou aux deux.
La plupart des volumes de semences de betteraves fourragères sont aujourd'hui traitées pour offrir une protection insecticide et fongicide. Elles sont également activées (Activ Boost) «pour réduire la période de risque entre le semis et la levée». L'activation des semences permet ainsi «jusqu'à 40 % de plantes levées en plus entre le semis et quinze-vingt jours après». Outre le désherbage «à ne pas louper», la date de semis est aussi un point de vigilance : «La betterave devra avoir une taille suffisante pour être correctement pâturée», souligne le représentant des KWS Momont. L'optimum se situe entre le 15 mars et le 15 avril.
En 2023, les vaches de Mathieu Crepin ont eu accès à la parcelle de betteraves fourragères à partir du 16 août. Après leur passage, il ne reste en général qu'un sol nu... Pour Rémi Pigneaux, le plus difficile reste de trouver une parcelle où la pose d'un fil permettra de gérer le front d'attaque de ce silo à ciel ouvert par les animaux.
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