Bruxelles met en demeure la France sur la directive eau potable
La Commission européenne a envoyé une lettre de mise en demeure à Paris le 30 octobre concernant l’application de la directive Eau potable. Si les seuils légaux en nitrate sont dépassés fréquemment chez près de 100 000 habitants chaque année, l’hexagone est loin d’être le plus mauvais élève de l’UE.
«L’eau potable distribuée à des dizaines de milliers de personnes en France contient des quantités excessives de nitrates», écrit la Commission européenne dans le courrier envoyé le 30 octobre concernant l’application de la directive Eau potable. Comme le rappelle Bruxelles, ce texte datant de 1993 vise «à protéger la santé contre les effets nocifs de la contamination des eaux». Un arrêté publié en 2007 en France en précise la transcription française : les foyers doivent être alimentés par une eau potable présentant des concentrations inférieures 50 mg/l en nitrate.
Dépassements récurrents
Dans 330 unités de distribution d’eau (alimentant 440 000 habitants répartis dans 44 départements), la concentration maximale aurait été dépassée au moins une fois, d’après les chiffres publiés par le ministère de la Santé pour 2018. Pire, dans 150 unités de distribution (alimentant 100 000 habitants), ces dépassements seraient même récurrents, avec des concentrations annuelles en nitrate au-delà de 50 mg/l. La plupart des sites de distribution présentant des dépassements, souligne le rapport, sont situés dans la moitié Nord du territoire métropolitain. Les départements de l’Eure-et-Loire, de l’Aube, et du Pas-de-Calais sont particulièrement concernés, avec des dépassements touchant respectivement 4 %, 4 % et 2 % de leurs populations. Le même rapport souligne toutefois que seule une unité de distribution (desservant 10 habitants dans les Yvelines) a vu sa concentration en nitrates dépasser les 100 mg/l en 2018.
La France, élève médiocre
C’est la troisième fois que la France est mise en demeure concernant les nitrates. Elle avait déjà reçu un blâme de Bruxelles 2013 concernant la directive Nitrates, ainsi qu’en 2017 pour ses manquements à la directive Eaux résiduaires urbaines. Faut-il en conclure que Paris serait mauvaise élève ? Alors que le plan d’action nitrate français est en cours d’élaboration, les documents soumis au public pour accompagner la concertation offrent une perspective européenne, qui la dépeignent simplement en élève médiocre. Sur la période 2012-2015, le taux de nitrates aurait dépassé 50 mg/l dans 13,2 % des stations de surveillance des eaux souterraines au niveau européen au total. La France, pour cette même période, se situerait à peine au-dessous de la moyenne européenne, avec 12,3 % des stations de surveillance affichant des dépassements. Si la Lituanie, la Suède, ou la Finlande sont de bien meilleures élèves, avec des dépassements sur moins de 5 % de leurs stations, l’Allemagne, la Bulgarie ou l’Espagne ont, en revanche, des taux de non-conformité dépassant 20 % des stations.
Les scientifiques alertent des effets indésirables de la directive nitrate
«L’accent mis par la législation européenne sur la réduction d’azote sans s’intéresser au phosphore pourrait par inadvertance augmenter les menaces sur des nombreuses espèces européennes déjà en danger», alertent les chercheurs dans un article publié le 2 novembre dans la revue Nature. Leurs résultats se basent sur une analyse des concentrations en azote, phosphore et potassium de 673 sites dans des écosystèmes herbacés dans huit pays du continent européen, dont la Pologne, la Belgique, les Pays-Bas ou encore la Biélorussie. Les régressions statistiques effectuées par les chercheurs sur ces échantillons montrent que la plupart des espèces en danger occupent des sols comprenant des faibles concentrations en phosphore et des ratios azote/phosphore ou potassium/phosphore élevés. «De plus, les niches des espèces menacées sont significativement plus restreintes que celles des espèces non-menacées», expliquent les chercheurs. La directive nitrate, en diminuant les concentrations en azote, et en modifiant fortement à la hausse le rapport N/P, risquerait donc d’entraîner la disparition d’espèces rares. «Une directive européenne sur le phosphore est nécessaire», concluent les chercheurs, appelant à une meilleure gestion de cet élément dans les sols.
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