CatAgri : l’assurance face aux risques climatiques ?
La FFA a présenté aux membres du Caf une proposition de contrat d’assurance climatique baptisée CatAgri. Ce projet préconise un seuil de déclenchement et une franchise de base à 50 % à prix modique pour l’exploitant.
La Fédération française de l’assurance (FFA) planche sur un projet de couverture pour les catastrophes climatiques en agriculture baptisé CatAgri. D’après un document de travail émanant de la FFA et daté du 22 juin qu’Agra Presse a pu consulter, la CatAgri a été pensée comme un dispositif d’assurance «universel non obligatoire» mais «fortement incitatif».
Il s’agit de répondre «aux besoins d’un véritable contrat coup dur pour l’exploitant», explique la fédération dans le document. «On est vraiment sur un schéma macro et puis derrière on peut tout ajuster», précise le directeur général adjoint de l’Étoile Assurance Emmanuel Lelièvre.
Seuil de déclenchement à 50 %
Contre une cotisation modique à l’hectare et différenciée par groupe de cultures, les producteurs seraient indemnisés à 100 % pour les pertes de récoltes situées au-dessus d’un seuil de déclenchement établi à 50 % des pertes, avec une franchise alignée sur ce seuil. La cotisation payée par le producteur pour s’assurer (prime) serait subventionnée à 90 % par les aides publiques (au lieu de 65 % actuellement).
Les exploitants auraient la possibilité d’abaisser le seuil de déclenchement jusqu’à 5 % via le rachat de franchises. «En option, [ils pourraient souscrire à] des garanties complémentaires sur les risques intermédiaires telles qu’elles existent actuellement», dit le document. Pour ces garanties, le taux de subvention appliqué serait compris «entre 15 % et 50 % [...] en fonction des groupes de cultures». Enfin, la FFA estime qu’une CatAgri à échelle de l’exploitation «pourrait être mise en place», mais que les modalités d’application restent à définir.
Prix bas et «équilibre technique»
Ainsi conçue, la CatAgri permettrait de baisser le prix de l’assurance de manière drastique. En effet le reste à charge d’un agriculteur serait de 3 €/ha en grandes cultures, 81 €/ha en arboriculture, 24 €/ha en viticulture et 1 €/ha en prairies, selon le document. La FFA estime que pour financer le dispositif (CatAgri + garanties supplémentaires), il faut une enveloppe de subventions publiques de 1,07 Md€. Soit le même montant qu’il faudrait mobiliser aujourd’hui si 100 % de la Ferme France était assurée dans le cadre de la MRC. «Aujourd’hui, le contrat MRC ne mobilise que 130 M€ au regard des surfaces assurées, en gros on est à 20 %», explique Emmanuel Lelièvre. «Si on considérait que l’ensemble des surfaces étaient assurées en MRC, on estime que le besoin serait de 1,07 Md€.»
Dans ces conditions, la FFA pense pouvoir massifier le recours à l’assurance climatique. Elle table sur un taux de diffusion de la CatAgri de 70 % au bout de trois ans (contre 31 % en grandes cultures, 32,5 % en viticulture et 2,5 % en arboriculture pour la MRC actuellement) ce qui permettrait aux assureurs d’avoir un produit rentable alors qu’ils perdent de l’argent actuellement. En effet, un critère d’équilibre pour les assureurs est d’atteindre un rapport sinistres/primes de 70 %. «Quand on prend globalement 100 de cotisations, il faut qu’on ait a réglé 70 d’indemnité», explique Emmanuel Lelièvre. Or ce taux a atteint 93 % en 2018, 106 % en 2017 et 226 % en 2016 d’après les données du CNGRA. «L’idée, c’est de mettre les conditions tarifaires qui nous permettent à nous, assureurs, d’avoir un équilibre technique et de nous engager pour la Ferme France pour les années à venir», indique le directeur général adjoint de l’Étoile.
Deux freins à lever
Mais deux freins majeurs restent à lever selon la FFA. Premièrement, pour atteindre un niveau de subvention à 90 %, il faudrait «déroger aux règles juridiques en cours» car le taux de subvention maximum autorisé par le règlement européen Omnibus est de 70 %. Deuxièmement, il faut «une enveloppe de subvention sécurisée estimée entre 720 et 830 ME pour la CatAgri», dit le document.
Comment trouver cette manne budgétaire ? «Ça, c’est plutôt du ressort des politiques et des OPA», répond Emmanuel Lelièvre rappelant au passage que les subventions ne transitent pas par les assureurs mais qu’elles sont versées directement aux assurés. Il voit cependant deux scénarios possibles. «C’est soit un arbitrage qui se fait dans le cadre de la Pac entre les OPA, les syndicats d’exploitants agricoles qui se disent : la gestion des risques devient une priorité dans le monde agricole donc on décide d’orienter plus de fonds pour pouvoir accompagner ce dossier-là, au détriment d’autre chose.» Ou, il faut trouver l’argent ailleurs. «On a invité les représentants des différents ministères à explorer toutes les pistes qui permettraient de trouver des financements complémentaires», assure-t-il.
Gouvernance simplifiée
Sur la gouvernance de la CatAgri, la FFA souhaite «une claire répartition des rôles de chacun» et «la suppression des doublons». Elle propose que l’État soit «garant» du dispositif : c’est-à-dire qu’il établisse les règles d’éligibilité aux subventions, gère les aides à l’assurance, réalise les contrôles et organise la gouvernance du dispositif en accord avec les règles européennes. De leur côté, les assureurs veulent être «les gestionnaires uniques des contrats d’assurance (souscription et indemnisation)». Ils proposent aussi «à terme» de «gérer l’indemnisation des règlements dont le niveau ou la nature relèveraient d’une intervention de l’État (FNGRA)».
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