De la luzerne à la rescousse de l’archéologie
Une quarantaine d’élèves du lycée agricole de Venours, dans la Vienne, ont planté près de 6 000 plants de luzerne sur le site gallo-romain de Sanxay.Une expérience qui devrait permettre de révéler des vestiges d’habitations.
D’habitude, la luzerne, on la sème. Mais ici, tout est compliqué. À quelques mètres de l’amphithéâtre gallo-romain, la prairie qui est uniquement fauchée, est compliquée à travailler. «Il y a deux ans, on a semé de la luzerne, mais c’est une plante qui se développe peu quand il y a de la concurrence, et elle n’a donc pas beaucoup poussé», explique Bertrand Minaud. Le directeur de l’exploitation du lycée agricole de Venours, situé à quelques kilomètres de Poitiers, ajoute que désherber avant ces semis n’était pas possible. «Puisque cette parcelle se situe au-dessus de vestiges, on ne peut ni utiliser de produit, ni labourer…».
Depuis 4 ans, un travail est mené sur le site, en lien avec le site de Sanxay, l’Inrae, les Musées nationaux, l’Université de Poitiers et Jouffray Drillaud, avec un objectif : révéler des vestiges enfouis, sans creuser, et uniquement grâce à de la luzerne. «Cette légumineuse a des racines très profondes, et dès qu’elles vont atteindre les murs des vestiges, elles vont se retrouver bloquées physiquement, mais aussi parce qu’elles n’aiment pas le calcaire. Et cela va limiter leur pousse», explique Abraham Escobar Gutiérrez, président de l’Inrae de Lusignan.
Puisque sur ce site, la présence des vestiges est avérée (notamment grâce à des fouilles mais aussi des clichés réalisés durant la sécheresse de 1976), l’expérience devrait permettre de valider un protocole d’exploration d’un sol, sans aucune fouille.
Les semis réalisés il y a deux ans n’ayant pas été concluants, c’est une plantation de luzerne qui a cette fois été choisie. Des plants fournis par Jouffray Drillaud, dont le site régional est situé à quelques kilomètres, et multipliés par l’Inrae, implantés sur une bâche, pour éviter toute concurrence, et sur une surface limitée : deux bandes de 50 cm de large, de 150 et 160 mètres chacune, qui se croisent au milieu du terrain. «Nous avons passé un petit rotovateur pour préparer le sol, et on a cassé 6 boulons de sécurité !» lance Bertrand Minaud. Les vestiges des bâtiments, qui semblent être des habitations se trouvent donc à 10 ou 15 cm sous terre. Quelque 40 élèves de seconde générale du lycée de Venours ont participé à la plantation, qui s’est déroulée sur deux. Il faudra désormais attendre deux ans, et la pousse de la luzerne pour voir si la luzerne est un archéologue pertinent.
Le site
Situé entre Poitiers et Niort, dans le cadre verdoyant de la vallée de la Vonne, le site archéologique de Sanxay, est une des agglomérations gallo-romaines majeures de l’antique territoire Picton, occupée du Ier au IVe siècle de notre ère et dont plusieurs monuments publics ont été mis au jour par le Père Camille de La Croix de 1881 à 1883 : théâtre, thermes et sanctuaire. Les plantations ont-elles été faites au-dessus d’habitations urbaines, qui permettaient d’accueillir les gens de passage et «touristes» de l’époque. Le lieu peut être visité et le théâtre sert chaque année de cadre pour les «Soirées Lyriques de Sanxay» : trois représentations d’opéra, qui se déroulent en plein air. Cette année, c’est Carmen de Bizet, qui sera joué les 10, 12 et 14 août.
Plus d’infos sur www.sanxay.fr et www.operasanxay.fr
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