L'Oise Agricole 06 juillet 2023 a 08h00 | Par Alix Pénichou

Les coopératives linières sèment une filière chanvre textile régionale

Quatre coopératives linières régionales (L.A. linière, Opalin, Lin 2000 et Calira) se sont associées au sein d'un GIE pour développer une filière chanvre textile. 30 ha poussent notamment dans la Somme. La Calira présentait le projet lors de sa journée technique, le 20 juin, à Martainneville.

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Environ 150 ha de chanvre sont cultivés cette année dans le Nord, le Pas-de-Calais, l'Oise et la Somme
Environ 150 ha de chanvre sont cultivés cette année dans le Nord, le Pas-de-Calais, l'Oise et la Somme - © A.P

Elle atteint deux mètres de haut, ne nécessite aucun fongicide ni insecticide, pas de désherbage une fois implantée, laisse une excellente structure de sol, et présente une fibre longue, solide, bien que moins fine que le lin. Le chanvre textile présente des atouts qui suscitent l'intérêt. Mais l'enjeu d'une filière est de taille : «il faut pouvoir récolter la plante, puis ensuite la valoriser sur un marché qui est tout juste émergeant», présente Fabien Leroy, responsable culture lin, lors de la journée technique de la Calira (Coopérative agricole linière de la région d'Abbeville), le 11 juin.

Pour relever un tel défi, quatre coopératives linières des Hauts-de- France ont créé un GIE (groupement d'intérêt économique) : L.A. Linière à Bourbourg (59), Opalin au Parcq (62), Lin 2000 à Grandvillers (60) et la Calira à Martainneville (80). 150 premiers hectares poussent cette année en Hauts-de-France, dont 30 ha dans les terres samariennes. La Calira pourrait accueillir 100 ha pour la prochaine campagne. L'intérêt de l'association est de mutualiser les essais (conduite culturale, de récolte, de transformation...). Elle a déjà permis l'achat d'une faucheuse automotrice Hyler Sativa 200 pour la récolte du chanvre. «Sans équipement adapté, la plante est très difficile à récolter.» Une fois fauché, le chanvre se conduit comme le lin : retournage, enroulage, puis teillage sur les mêmes machines que le lin.

Pour les liniculteurs, cette plante est l'opportunité d'intégrer une nouvelle culture dans la rotation. «Le chanvre est une sous-espèce de Cannabis sativa, famille des Cannabacées. Elle est donc à intégrer en plus du lin. Elle peut même être envisagée en précédent lin», acquiesce Fabien Leroy. Reste que l'itinéraire technique de cette plante à cycle court (deux à deux mois et demi) est à peaufiner. Les semis se font début mai, dans une terre suffisamment réchauffée. Contrairement au lin, plus exigeant, tous types de terres semblent convenir... à la condition qu'elle soit relativement propre. «On pourra par exemple travailler les faux-semis. Mais une fois bien implantée, la forte biomasse du chanvre étouffe les adventices. Elle présente un fort pouvoir nettoyant.» Ses seuls ennemis sont les oiseaux. «Il faut installer des cerfs-volants partout.» La culture devrait lever en cinq à sept jours.

Une marge similaire à un lin moyen

Côté économique, comptez environ 1 500 EUR de charges à l'hectare, dont 500 EUR de semences et le reste de mécanisation pour la récolte. La marge espérée, elle, «équivaut à celle d'un lin moyen», présente Fabien Leroy. En plus de la fibre, la valorisation des co-produits, que sont les étoupes et les chènevottes, est possible. De par ses atouts environnementaux (moins d'IFT et 8 à 15 tonnes de carbone absorbés par hectare), le chanvre pourrait aussi être un atout pour les agriculteurs engagés dans des filières environnementales.

Reste que la commercialisation est «entièrement à construire». L'Alliance du lin et du chanvre européens y travaille. Elle vient justement d'annoncer qu'elle s'associait en tant que partenaire auprès de Valbiom, l'association wallonne de solutions durables en économie biosourcée, dans le projet Hemp4circularity. Son objectif : développer à échelle industrielle des fibres longues de chanvre, du champ à la mode et recyclage, pour une filière chanvre textile locale et circulaire en Europe du Nord-Ouest.

Des vêtements Bleu Blanc Lin et Chanvre

L'Union des Industries Textiles (UIT) et InterChanvre, l'interprofession du chanvre, viennent de lancer «Bleu Blanc Lin» et «Bleu Blanc Chanvre». Ces deux structures, qui sont abritées par l'UIT, ont pour ambition de «faire renaître une filière lin et chanvre pour un textile 100 % made in France», et de lui permettre de se développer. Ces filières connaissent un regain d'intérêt depuis ces dernières années. Ainsi, les filatures Safilin dans les Hauts-de-France et La French Filature en Normandie ont vu le jour en 2022, et la création d'une filature de lin en Bretagne, Linfini, est en projet. La création de Bleu Blanc Lin et Bleu Blanc Chanvre, officiellement annoncée le 22 juin, est le fruit de travaux menés par les filières en 2022. Pendant une année, une vingtaine d'entreprises (filateurs, tisseurs, tricoteurs, ennoblisseurs*...) ont travaillé sur ce projet. Une charte pour ces deux structures a été présentée. «Tous les acteurs du lin et du chanvre français et tous ceux qui auraient envie de le devenir sont invités à nous rejoindre et à signer notre charte», explique Olivier Ducatillion président de l'UIT.

* l'ennoblisseur textile confère aux étoffes leurs couleurs, leur aspect et certaines propriétés d'usage.

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