L'Oise Agricole 09 janvier 2014 a 08h00 | Par Bernard Leduc

Les produits bio sont-ils meilleurs pour la santé ?

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Dans le cadre de leur module Journées prospectives en alimentation et santé, les étudiants de 5e année du parcours «marketing, communication et vente» de la spécialité Alimentation et santé de l’Institut LaSalle Beauvais étaient appelés à s’interroger sur ce sujet à controverse. L’exercice qui leur était demandé avait trait à la communication, intégrée à leur formation. Sur la question posée, à eux de tenter de se forger une opinion et de la faire partager.

Après avoir sondé les visiteurs et exposants de Natexpo, salon professionnel des produits biologiques, diététiques et écologiques, qui a eu lieu fin octobre dernier à Paris-Nord Villepinte, les étudiants devaient tenter d’élaborer leur opinion. Pour convaincre le public interne de l’institut (élèves-ingénieurs et salariés) par petits groupes, ils ont réalisé six montages pour défendre leur point de vue. Il s’agissait de pecha kucha, un standard de montage vidéo d’un peu plus de 6 minutes (*).

À l’issue de la projection de 6 petits films, l’auditoire était amené à voter pour la présentation la mieux argumentée.

Alors, les produits bio sont-ils meilleurs pour la santé ? Eh bien, vous n’aurez pas la réponse ! La majorité de groupes d’étudiants qui ont participé à cet exercice a donné une réponse évasive : ce n’est ni oui ni non. Rarement un oui affirmatif. Mais, quand même, jamais non ! à dire vrai, le sujet n’est pas simple et cela a été rappelé plusieurs fois par les étudiants, qui s’étaient bien documentés, dans ces courts montages vidéos : aucune étude scientifique, en France ou ailleurs, n’a pu apporter la preuve qu’il vaut mieux, pour sa santé, consommer des produits bio plutôt que des produits issus de l’agriculture conventionnelle. L’Inra, par exemple, dit clairement que les produits bio n’ont pas d’avantages nutritionnels.

Si très généralement, les personnes qui mangent bio sont en meilleure santé, c’est simplement parce qu’elles ont le souci d’une bonne alimentation, en termes d’équilibres nutritionnels. Mais rien ne prouve que cela vienne de la qualité des aliments eux-mêmes. Les produits bio ne se distinguent pas par des particularités physico-chimique, bien que la teneur résiduelle en pesticides soit souvent plus faible et ces produits contiendraient, selon certaines études, davantage de fer, de magnésium, de phosphore, de minéraux ou de vitamines.

 

Agriculture bio

ou conventionnelle

Mais les étudiants faisaient le parallèle avec les produits issus de l’agriculture conventionnelle, qui contiennent des résidus de produits de traitement des cultures ou des produits vétérinaires très généralement inférieurs aux normes autorisées. Le problème, comme toujours, est lié à des normes qui varient ou ont varié dans le temps et qui ne sont pas les mêmes partout.

On peut penser aux nitrates qui ne seraient peut-être pas aussi mauvais pour la santé, ce serait même le contraire selon certains scientifiques. Et il faut rappeler la réglementation de plus en plus contraignante pour les agriculteurs, du moins en France, qui a retiré des matières actives, réduit considérablement les doses et imposé des calendriers d’application pour certains produits de traitement ou de fertilisation. L’agriculture biologique répond seulement à une obligation de moyens et non de résultats. Or, ces moyens sont variables selon les pays.

Le consommateur, qui est souvent perdu dans les étiquetages ou les signes de qualité et dont la confiance en la traçabilité a trop souvent été érodée, peut se poser la question du produit réellement bio : sans aucun produit chimique, de phytopharmacie ou pharmaceutique, aucun engrais, tout au long du processus de production, y compris pour les intrants ou aliments, et dans un environnement véritablement sain.

Des produits fertilisants comme du compost urbain, ou de traitement, comme la bouillie bordelaise (à base de sulfate de cuivre), sont autorisés en France par exemple, certes à moindre dose. Est-ce neutre sur la production ? Et les produits dits naturels, comme le purin d’ortie ou de prêle, sont-ils vraiment sans risques ? Par ailleurs, les végétaux ou animaux qui pendant leur vie,n’ont pas été soignés ou protégés des bioagresseurs peuvent avoir développé des maladies. Des études ont montré qu’il y a parfois davantage de champignons, mycotoxines en particulier, ou de bactéries dans les produits issus de l’agriculture biologique, qui peuvent ainsi être des aliments dangereux pour nous. Alors, si «manger des produits bio, ça ne peut pas faire de mal», comme le disent certains, cela reste à prouver. Bien qu’un fruit ou un légume malade, en principe, ça se voit et naturellement, on préférera le jeter.

Selon un sondage repris par un groupe d’étudiants, 60 % des personnes estiment que les produits bio sont meilleurs pour la santé. On est loin de l’unanimité ! Mais consommer ces produits pourrait réduire les allergies alimentaires. Ou les troubles de la reproduction, qui pourraient être liés à l’alimentation. Mais sans jamais en être sûrs, sauf avec régimes alimentaires particuliers : c’est toujours la dose qui fait le poison !

Dans les autres arguments relevés par les pro-bio, il y a la certitude que ces aliments ne viennent pas de cultures OGM. Avec peut-être le doute sur des produits d’importation, et par ailleurs toujours cette absence de preuve que les OGM pourraient être dangereux du point de vue sanitaire. Quant au prix des produits bio, 30 % plus élevé en moyenne, il ne semble pas dissuasif au regard de la forte progression du marché.

Bref, on ne sait pas si le tout-bio est meilleur pour la santé. Cette analyse faite par les étudiants lassalliens corrobore le fait que généralement, on pense que oui, mais ce n’est qu’une impression. Finalement, côté communication, puisque cet exercice était destiné à cela, ces étudiants n’ont peut-être pas été bons, mais on ne peut pas leur reprocher : comment faire partager au public quelque chose qui n’est pas certain, surtout dans un domaine aussi sensible que celui de notre santé ? Ils sont bons, probablement, ces produits bio, mais ce n’est pas vraiment sûr !

Les étudiants ont montré dans leurs montages vidéos que les consommateurs ont choisi de manger bio, non seulement par souci pour leur santé, mais aussi pour d’autres raisons, dont la protection de l’environnement et la qualité gustative ou organoleptique des aliments : on recherche le bien manger, une alimentation saine et équilibrée restant la règle à suivre. Le bien-être en dépend.

(*) Pecha kucha est un nom japonais qui signifie bavardage.

 

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