«Maintenant, on veut des actes !»
C'est en ces termes que Régis Desrumaux, le président de la FDSEA de l'Oise, a résumé le sentiment dominant des agriculteurs en colère qui dénoncent, pêle-mêle, la surtransposition françaises des textes européens, la fin de la détaxation du GNR, l'empilement des réglementations toujours plus contraignantes et incohérentes entre elles, les contrôles à charge...

Les choses sont allées très vite, preuve que les agriculteurs de l'Oise lorgnaient sans soute avec envie leurs collègues allemands, en manifestation depuis une dizaine de jours. Le mot d'ordre national de la FNSEA et de JA a été lancé en début de semaine et les responsables FDSEA et JA de l'Oise ont tout organisé lundi.
Avec succès : dès le mardi fin de matinée, une cinquantaine de tracteurs et une centaine d'agriculteurs s'installaient sur l'autoroute A 16 direction Paris, sortie Beauvais Nord. C'est sous un pont qu'ils installaient ce qui allaient être leur point de ralliement, avec la ferme intention d'y rester tant que le gouvernement n'aura pas annoncé des mesures concrètes, avec des impacts mesurables sur les exploitations. Tentes, sono, paille, barbecues, groupe électrogène, tables, chaises et du ravitaillement solide et liquide pour ce camping improvisé. Plus d'une trentaine sont restés dormir le mardi soir et se préparaient pour une seconde, voir une troisième nuit au besoin.
Après la rencontre des responsables nationaux, Arnaud Rousseau pour la FNSEA, et Arnaud Gaillot pour les JA, avec le Premier ministre, une réponse du gouvernement est attendue pour la fin de la semaine (voir page 10). D'ici là, partout en France et même si certains ont commencé depuis le 18 janvier, il s'agit de faire pression afin que les réponses gouvernementales soient à la hauteur des attentes des exploitants agricoles.

Revendications
Car les raisons de la colère sont nombreuses : des retraits franco-français de matières actives alors qu'elles sont encore utilisées chez les voisins, des importations de sucre, de céréales et de volailles pour permettre à l'Ukraine de financer la guerre, des réglementations nombreuses et incohérentes (les 12 fameuses qui régissent les haies), la fin de la détaxation du GNR, des prix agricoles en baisse alors que les charges augmentent, le mal-être, l'impossibilité d'entretenir les cours d'eau, les contrôles à charge... La barque est pleine et va couler si rien n'est fait.
La mobilisation s'est vite répandue dans toute la France et ce mercredi fin d'après-midi, 87 points de blocage étaient installés en France.

Couverture médiatique
Les agriculteurs de l'Oise doivent à leur proximité avec la capitale la visite de nombreux médias nationaux, locaux bien sûr mais aussi étrangers. «On a eu la visite de la télé allemande, autrichienne, belge», témoignent-ils. Ils ont aussi été interrogés par des journalistes venus les rejoindre sur leur point de ralliement. Ici, un éleveur face caméra parle de sa surcharge de travail pour un revenu final faible ; là, un autre témoigne devant un micro tendu des contrôles qu'il a subis.
Bien entendu, les manifestants ont reçu la visite de politiques. Mardi après-midi, c'est Xavier Bertrand, président de la Région Hauts-de-France, qui est venu à Beauvais assurer aux agriculteurs de son soutien. Mercredi fin de matinée, Fabien Roussel, député communiste du Nord, passait pour un long échange avec Régis Desrumaux en présence de nombreux journalistes.
Puis Nadège Lefebvre, présidente du Conseil départemental, a annoncé la mise en place d'un comité de travail autour de l'agriculture afin d'éviter que des affaires comme celles de Vincent Verschuere ne se reproduisent pas. Fin d'après-midi, c'est Philippe Ballard, député RN de la deuxième circonscription de l'Oise, qui allait à la rencontre des manifestants.
Rendez-vous à la préfecture
À 13 heures, une délégation était reçue en préfecture. Ses membres ont pointé la surtransposition française des textes européens, notamment en matière environnementale, et les importations ukrainiennes qui viennent perturber les marchés. «C'est une véritable concurrence déloyale», clament les responsables.
Autre sujet qui fâche : la gestion de l'eau et notamment les restrictions d'irrigation qui pèsent lourd pour ceux qui ont récemment investi dans des équipements. Sans compter l'entretien des cours d'eau, impossible à réaliser sans demande d'autorisation, avec étude d'impact. Mais quel agriculteur peut se plier à une telle réglementation ? Même les communes n'osent pas effectuer les travaux. Pourtant nécessaires si on considère les inondations dans le Pas-de-Calais notamment. «Madame la préfète a été très à l'écoute. Pour les dossiers sur lesquels elle a la main, elle a promis de venir sur le terrain prochainement. Pour ce qui est de nos revendications nationales et européennes, elle les transmettra au Premier ministre», assure Régis Desrumaux.
Il interroge alors la centaine d'agriculteurs présents sur la suite à donner à la mobilisation. Alors que la FNSEA, en la parole de son président Arnaud Rousseau, appelle à amplifier le mouvement, les manifestants de l'Oise, à l'heure où nous écrivons ces lignes, se préparent à descendre plus au sud sur l'A 16 et à converger vers Paris si aucune réponse satisfaisante n'est apportée par le gouvernement.
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