Éleveurs spoliés, abattoir bloqué !
Le blocage de l’abattoir Bigard de Feignies a été lancé dimanche soir, à 21 h, par les Frsea et JA Nord-Pas-de-Calais-Picardie.

«Nous tiendrons le siège aussi long-temps qu’il faudra. C’est notre revenu et notre survie qui sont enjeu.» C’est le mot d’ordre lancé par Jean-Christophe Rufin, président de l’Union agricole d’Avesnes, lors de l’installation du barrage dimanche soir. Depuis, ils sont en permanence une cinquantaine devant les grilles de Bigard, venus en réponse à l’appel à mobilisation de la Fnsea, des Jeunes agriculteurs et de la Fédération nationale bovine(FNB).
Pour la grande région Nord-Pas-de-Calais-Picardie, c’est Feignies, l’un des plus gros sites du nord de la France, qui a été retenu. L’action de blocage fait partie de la vingtaine d’opérations lancée sur toute la France, en préparation et dans l’attente des résultats de la table-ronde prévue le 17 juin au ministère de l’Agriculture. Elle rassemblera les principaux opérateurs de la filière et les producteurs. «Nous voulons un engagement de tous les acteurs de l’aval de la filière, soit l’engagement d’agir sans délai pour restaurer les prix payés aux producteurs, en mobilisant des actions concrètes qui doivent permettre à nos filières de s’inscrire durable-ment dans une logique de croissance et de valorisation des pro-duits, et non dans la spirale de baisse des prix», précise Ludovic Cauchois, de la FNB.
Pourquoi l’action ?
Pour Alain Dupont, président de la section bovine de la Fdsea du Nord,«la situation économique est intenable pour les producteurs. Les prix sont inférieurs de 60 centimes d’euro au kg à ce qu’il faudrait pour gagner sa croûte. L’aval de la filière doit agir immédiatement». Surtout que des opportunités de marché sont présentes. La fin des contraintes ESB grâce à l’évolution du statut de la France ouvre des nouveaux marchés, notamment asiatiques et, de plus, il baisse les charges des entreprises. Sur le marché européen, les prix de nos principaux concurrents n’ont jamais été aussi élevés par rapport au niveau en France et la demande mondiale est bien présente, durablement, et avec des prix rémunérateurs.
La France est l’un des pays à disposer de la capacité à répondre à cette demande mondiale. Mais la valeur produite par les éleveurs est captée par l’aval. Le dernier Observatoire des prix et des marges confirme le transfert de valeur sur les bovins finis d’au moins 300 mil-lions d’euros depuis 2014 en faveur de l’aval au détriment des éleveurs.Et la situation se détériore plus encore en 2015. Dans le cadre du Cice, la grande distribution a bénéficié de plusieurs centaines de millions d’euros. En vingt ans, cette captation de la valeur du travail et du savoir-faire des éleveurs s’est traduite par une divergence accrue entre l’évolution des prix à la distribution et les prix à la production dans un contexte de forte évolution des charges d’exploitation. Pour la FNB, «les outils d’abattage sont parfaitement informés du marasme dans lequel sont les éleveurs. Mais ils s’arrêtent au constat et n’agissent pas. Pire, ils persistent, comme une fatalité, dans la guerre des prix sans merci, et en reportent les effets sur les éleveurs.
Nous demandons aux industriels d’être aux côtés des producteurs pour qu’enfin cela change. Les prix producteurs ne peuvent pas être éternellement déconnectés des réa-lités économiques». Les Jeunes agriculteurs alertent :«En cinq ans, la filière viande bovine constate une baisse de30 % des installations. Sans revenu, les exploitations ne peu-vent plus être transmises et aucun jeune ne peut se lancer convenablement dans son projet professionnel. Sans renouvellement des générations, la filière risque de s’éteindre rapidement.»
Combien de temps le siège sera-t-il tenu ?
La mobilisation syndicale s’inscrira dans la durée s’il le faut. L’ensemble des responsables et agriculteurs présents sont déterminés à avoir des résultats. Il s’agit d’une première étape. D’autres actions prendront le relais si l’aval ne s’engage pas à payer correctement les producteurs. Les actions se poursuivront et s’amplifieront tant que la situation économique des producteurs ne sera pas rétablie.
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