L'Oise Agricole 13 avril 2023 a 08h00 | Par Dominique Lapeyre-Cavé

«Ce qui m'intéresse, c'est parler de mon métier au public agricole ou non agricole»

Fils d'exploitant près de Beauvais, Lucas Loncke a créé autour de lui une belle communauté de followers grâce à des vidéos où il raconte son quotidien de salarié agricole.

Abonnez-vous Reagir Imprimer
- © DLC

«L'idée m'est venue il y a plus d'un an, en février. Mon père avait acheté un tracteur Claas Axion 830 un peu particulier, avec des pneus particuliers et j'en ai fait une vidéo sur Tiktok, application que j'avais téléchargée un peu comme tout le monde», raconte Lucas, jeune salarié agricole de 22 ans. Qu'elle n'a pas été sa surprise de voir que sa vidéo a aussitôt suscité de nombreux commentaires et des questions de la part de parfaits inconnus ! «Devant cet intérêt inattendu, cela m'a donné envie de faire d'autres vidéos et de parler ainsi de mon métier, même si je sais que je le dois à ce tracteur si particulier, customisé depuis.»
Il filme alors ses pratiques avec Crop Sensor, pour ajuster la fertilisation azotée et en profite pour faire de la pédagogie sur les pratiques agricoles en termes de gestion d'intrants. Là encore, il rencontre un succès inattendu, que ce soit auprès d'agriculteurs ou de personnes bien éloignés de l'agriculture.
«Au travers des questions des non agriculteurs, je me suis alors rendu compte que beaucoup avait une image très arriérée de l'agriculture, négative, et surtout bien éloignée de la technicité et des matériels que nous utilisons actuellement. Cela a vraiment fini de me convaincre que faire ces vidéos était utile pour mieux communiquer», confirme Lucas.

Rapide succès
Comme TikTok ne permet que de publier des vidéos, Lucas a créé un compte Instagram sur lequel il poste surtout des photos de matériel et de chantiers. «C'est avec Instagram que je peux échanger avec les personnes qui me suivent et elles sont rapidement devenues nombreuses», avoue-t-il, un peu gêné. En effet, il compote à ce jour presque 100.000 followers sur TikTok et presque 10.000 sur Instagram.
Les statistiques de son compte TikTok lui annoncent que ceux qui le suivent sont à 25 % des femmes et que la grande majorité, 56 %, a entre 18 et 25 ans. 25 % sont dans la tranche 25-35 ans, le reste au-delà. 80 % sont français, 7 % sont aux USA et 5 % en Belgique. «Cela me confirme que je cible finalement plutôt bien le public auquel je m'adresse. Mais comme certains sont du milieu agricole et d'autres pas, je dois faire très attention au vocabulaire que j'utilise. Assez technique pour intéresser les agriculteurs, mais aussi assez pédagogique pour ne pas perdre les non agricoles, c'est toute la difficulté», confie-t-il.
Les vidéos qui recueillent le plus de vues sont celles sans commentaires («sans doute la barrière de la langue») et celles dans lesquelles Lucas évoque la pulvérisation ou l'élevage ovin de la ferme paternelle suscitent parfois de vives réactions chez ceux qui méconnaissent le métier. «J'essaie pourtant de montrer que le pulvérisateur sert aussi à épandre des engrais ou des biostimulants et que, de toute façon, le traitement phytosanitaire n'est effectué que si les seuils sont atteints, au bon moment, avec un raisonnement à la clé», détaille le jeune adepte des réseaux sociaux.
Au départ, lorsqu'il a commencé, Lucas utilisait un appareil photo et même un drone pour filmer ses chantiers agricoles. «Cela me prenait du temps de filmer puis de monter et c'est devenu trop consommateur de temps», témoigne-t-il.
Aujourd'hui, pour aller plus vite dans sa production, il filme et monte ses vidéos ave un IPhone 14 pro, qui propose une belle qualité d'images et des facilités pour le montage.
Car le jeune homme a des journées bien remplies. Il est en effet salarié pour moitié de son temps de l'exploitation familiale qui accueille aussi une entreprise de travaux agricoles et, pour l'autre moitié sur la ferme de son ancien maître d'apprentissage qu'il a connu pendant sa scolarité de BTS Acse (Analyse, conduite et stratégie de l'entreprise agricole). «Je m'entends très bien avec Pascal Verbeke, nous avons le même sens du travail et c'est une chance pour moi de continuer à travailler chez lui», se réjouit Lucas.
Cela lui a quand même permis de développer l'ETA familiale qui est montée en puissance pendant que l'effectif ovin, à 500 brebis il y a quelques années, se réduisait. On ne peut pas être au four et au moulin mais Lucas a quand même pu développer l'activité transport de l'ETA. «Je travaille un mois au printemps et un mois à l'automne pour transporter de l'ensilage destiné à alimenter des méthaniseurs».

Et demain ?
Lucas est encore tout étonné de ce moment de célébrité que n'aurait pas renié Andy Warhol. C'est vrai qu'il est parfois invité sur des stands pendant des salons agricoles ou que lui-même donne rendez-vous à ses fans lors de ces événements. «D'ailleurs, c'est presque un peu gênant de ces personnes qui me connaissent que par TikTok alors que je ne sais rien d'eux. Parfois, certains me reconnaissent mais n'osent pas venir me parler. Moi qui suis plutôt quelqu'un de timide, je les comprends», confie-t-il. Justement, cet usage des réseaux sociaux l'a obligé à parler de son métier, lui a permis de prendre confiance en lui et de vaincre sa réserve naturelle.
Certains de ses abonnés le sollicitent pour qu'il crée une chaîne Youtube mais lui ne se voit pas poursuivre plus loin l'aventure du numérique, faute de temps à y consacrer. Dans quelques années, il s'installera sur la ferme familiale mais son père n'ayant que 50 ans, rien ne presse.
D'ici là, Lucas veut pouvoir profiter de ces rencontres virtuelles, faire de la moto le week-end, son autre passion. «Même si cette modeste célébrité a un peu changé ma vie, je veux rester moi-même. Je continue tant que ça me plaît». Parole de jeune geek avec une tête bien faite.
Dominique Lapeyre-Cavé

Pour suivre Lucas

Sur TikTok Lucaslck3

Sur Instagram lucaslck3

Réagissez à cet article

Attention, vous devez être connecté en tant que
membre du site pour saisir un commentaire.

Connectez-vous Créez un compte ou

Les opinions emises par les internautes n'engagent que leurs auteurs. L'Oise Agricole se reserve le droit de suspendre ou d'interrompre la diffusion de tout commentaire dont le contenu serait susceptible de porter atteinte aux tiers ou d'enfreindre les lois et reglements en vigueur, et decline toute responsabilite quant aux opinions emises,

A LA UNE DANS LES REGIONS

    » voir toutes 1 unes regionales aujourd'hui