«Saisir l'opportunité du plan de relance»
Dans une note publiée le 10 septembre, le Conseil d'analyse économique (CAE), instance qui conseille le Premier ministre, propose une approche économique intégrant la production de valeur de la biodiversité. L'agriculture est concernée.
Comme en écho au congrès de la FNSEA qui s'est déroulé le 10 septembre à Villejuif (Val-de-Marne) et qui présentait son rapport d'orientation «Faire du défi climatique une opportunité pour l'agriculture» (lire en page 5), le Conseil d'analyse économique (CAE) rendait publique, le même jour, une note intitulée «Biodiversité en danger : quelle réponse économique ?». Les trois rédacteurs de cette note partent du postulat que «la biodiversité est le garant de biens et services irremplaçables, préservant la capacité de la nature à fournir nourriture, matières premières, (...], à nous protéger contre les risques naturels, à stocker du carbone, recycler des déchets, et à contribuer à la qualité de notre cadre de vie». Tout comme la FNSEA, elle établit le constat qu'en France «l'artificialisation des sols, la fragmentation des milieux naturels, les pratiques agricoles [...]» affectent l'environnement.
Artificialisation des sols
S'appuyant sur des rapports internationaux et scientifiquement reconnus, tel que celui de la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES), le CAE affirme que la biodiversité s'effondre (cf. encadré) y compris en France. Les causes sont connues : «dégradation des habitats, agriculture intensive, surexploitation des ressources renouvelables, changement climatique», cite la note du CAE. Sur le volet strictement agricole, en France, les trois corédacteurs pointent du doigt «l'artificialisation des sols [comme] un facteur majeur de déclin de la biodiversité». Ainsi que le rappelait Henri Biès-Péré, 2e vice-président de la FNSEA, lors du congrès le 10 septembre, «l'artificialisation des sols fait disparaître un département français tous les cinq ans, ce qui représente 8 % du potentiel de captation de carbone» que l'agriculture pourrait reprendre à son compte. Pour lutter contre cette artificialisation, l'instance suggère de «réviser la fiscalité pour une meilleure utilisation des sols, en appliquant un «bonus-malus» sur la taxe d'aménagement et en révisant la taxe sur le foncier non-bâti, afin de ne plus inciter à la conversion des espaces agricoles et forestiers».
Le CAE prend d'autres facteurs en compte comme la fragmentation des milieux naturels, la spécialisation des exploitations, l'assèchement des zones humides, l'agrandissement des parcelles cultivées, la destruction des haies, les produits phytosanitaires, etc. Pis, selon l'instance gouvernementale, «les stratégies nationales pour la biodiversité successives n'ont pas réussi à enrayer le déclin enregistré par les principaux indicateurs de biodiversité.»
Revenu garanti
Par le biais de sept recommandations, les co-rapporteurs souhaitent rétablir l'équilibre en faveur de la biodiversité. À ce titre, ils recommandent «d'élargir et refonder» la séquence ''éviter-réduire-compenser'', mécanisme qui vise l'absence de perte nette de biodiversité. Comment ? En généralisant cette obligation à toutes les opérations d'aménagement. Le CAE suggère aussi de «réorienter les budgets agricoles du premier pilier» vers des contrats rémunérateurs, mentionnant au passage que «le verdissement des aides directes [de la Pac 2013-2019] n'a eu que d'effets» et que «les aides rémunérant spécifiquement les efforts en faveur de la biodiversité [...] ne représentent que 2 % de l'ensemble des aides publiques aux agriculteurs français». C'est pourquoi le CAE envisage d'expérimenter des contrats environnementaux avec la mise en place d'un «revenu garanti pour les agriculteurs dans les zones à haute valeur naturelle». Par souci d'équilibre commercial et financier, les co-rapporteurs recommandent également de rendre plus opérationnelles les clauses environnementales dans les accords commerciaux. Cette note, aussi louable soit-elle, reste cependant incomplète. Il manque une étude d'impact, en particulier économique. C'est un peu juste pour le Conseil d'analyse... économique.
Trame, FNCuma et Civam veulent une reconnaissance des collectifs dans la future Pac
Le 8 septembre, les trois têtes de réseau Trame, FNCuma et Civam ont présenté leurs propositions pour la déclinaison française de la future Pac, en mettant l'accent sur la transition écologique et la reconnaissance des collectifs. Les trois organisations veulent notamment «maximiser» le transfert des fonds du premier pilier vers le deuxième afin de financer les mesures de transition à long terme. Elles défendent aussi un plafonnement des aides à l'actif, sans fixer de montant, mais en y intégrant un salarié par exploitation. Le but : favoriser l'emploi, freiner l'agrandissement - ainsi que le développement du travail à façon - et «dégager du temps pour que les exploitants puissent se former», d'après Antoine Delahais, trésorier du réseau Civam. Avec Trame et les Cuma, sa fédération plaide pour que les collectifs bénéficient des éco-schémas du premier pilier.
«Ce n'est pas en engageant une seule exploitation, mais l'ensemble des exploitations qu'on va résoudre les problèmes environnementaux», a justifié l'élu des Civam, prenant l'exemple des bassins de captage d'eau potable. Pour Olivier Tourand, la future Pac doit «mieux intégrer les enjeux» du changement climatique, de l'érosion des sols et de la biodiversité, du renouvellement des générations, de l'emploi et de l'alimentation. Les organisations proposent enfin que les agriculteurs en collectif signent des «contrats de transition agroécologique et alimentaire de territoire» avec les pouvoirs publics et la structure accompagnatrice. D'une durée de cinq à sept ans, ce contrat serait une clé d'entrée pour un panel d'aides spécifiques : Maec système rénovées, aide à l'investissement ou à l'animation, financement du temps passé et des risques encourus en expérimentation agricole. Olivier Tourand attend «avec impatience la reprise des réunions au ministère sur le plan stratégique national (PSN)». D'après lui, la France doit «rendre sa copie en avril-mai».
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