Des parlementaires vont évaluer la séparation vente/conseil
Lancée début mai, la mission parlementaire sur le bilan de la séparation du conseil et de la vente des produits phytosanitaires devrait rendre ses conclusions en juillet.

Une mission parlementaire concernant le bilan de la séparation de la vente et du conseil en matière de produits phytopharmaceutiques a débuté le 10 mai, a confié le député de la Manche Stéphane Travert (Renaissance). Il mènera cette mission aux côtés de Dominique Potier (socialiste), député de Meurthe-et-Moselle. Tous deux devraient rendre le bilan de leur travail «avant le 14 juillet», après la tenue d’auditions auprès du ministère de l’Agriculture, des chambres d’agriculture, de l’Anses, de l’Inrae, de représentants des coopératives et des négoces ou encore d’associations environnementales dès la fin du mois de mai. Il s’agira notamment d’évaluer «si cela a permis ou non de diminuer l’utilisation de pro-duits phytosanitaires», précise Stéphane Travert. Pour rappel, l’ex-ministre de l’Agriculture lui-même qui avait signé l’ordonnance de séparation de la vente et du conseil de produits phytosanitaires issue de la loi Egalim de 2018.
«Une fausse bonne idée»
Entrée officiellement en vigueur le 1er janvier 2021, cette mesure visait «à prévenir tout risque de conflit d’intérêts qui pourrait résulter de la coexistence chez un même opérateur d’activités de conseil et de vente de produits phytosanitaires», selon le ministère de l’Agriculture. Autrement dit, les opérateurs ayant choisi de vendre des produits phytosanitaires ne peuvent plus faire une préconisation de phytos à la suite d’un diagnostic. À l’exception de Limagrain, qui doute depuis de son choix, les coopératives et négoce ont toutes choisi de conserver leur activité de vente de pesticides. Et elles ont officiellement arrêté les services de conseil, qu’il soit «spécifique» ou «stratégique». Mais deux enquêtes d’Agra Presse, en mars et en novembre 2020, ont mis en avant le faible développement de l’offre de conseil stratégique indépendant et les contournements fréquents de l’interdiction de conseil «spécifique» par les techniciens des sociétés ayant choisi la vente. Depuis, peu d’initiatives ont émergé pour structurer la fourniture du conseil spécifique. À noter l’initiative locale de la Chambre d’agriculture d’Ariège et de deux coopératives céréalières régionales, qui ont créé, début 2022, une société coopérative de conseil pour délivrer notamment du conseil spécifique. Mais elle reste pour l’instant isolée. Dans un rapport paru en février 2022, des députés de la commission des affaires économique appelaient à création d’une telle mission parlementaire. Ils estimaient «nécessaire de travailler rapidement à la cor-rection [des] effets de bord» de la séparation vente/conseil des phytos, afin de «s’assurer que l’offre de conseil se développe correctement». Ils déploraient «un affaiblissement des conseils pratiques aux agriculteurs» et un risque de remise en cause des «filières vertueuses» (HVE, bio, biocontrôle).
Réformer ou renoncer
Aux yeux de Dominique Potier – opposant de la première heure au projet –, «c’était une fausse bonne idée» qui apparaît aujourd’hui «comme un échec». Le député évoqué notamment une «déresponsabilisation des vendeurs de produits phytosanitaires» et un «affaiblissement de la mise en œuvre du dispositif du Certificat d’économie de produits phytosanitaires (CEPP)». Initialement lancé à titre expérimental en 2016, ce dispositif a été pérennisé trois ans plus tard pour permettre «de dynamiser la diffusion des pratiques économes en produits phytopharmaceutiques pour les exploitants agricoles, tout en veillant à la performance économique des exploitations», souligne le ministère de l’Agriculture sur son site. Si à l’issue de la mission parlementaire en question, le dispositif de la séparation de la vente et du conseil ne montre pas de résultats probants, il s’agira selon Dominique Potier de le «réformer» ou bien d’y «re-noncer». Supprimer cette mesure, c’est d’ailleurs ce que proposent les sénateurs de droite dans leur proposition de loi sur la Compétitivité de la ferme France, actuelle-ment examinée au Sénat.
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