La contractualisation laitière tarde
L’ensemble des contrats laitiers ne sont toujours pas mis en conformité avec la loi Egalim. Saisi par France OP Lait, le médiateur demande aux organisations de producteurs et aux laiteries de conclure les accords-cadres d’ici décembre. À défaut, la construction des prix lors des prochaines négociations annuelles ne se fera toujours pas «en marche avant».

«Je souhaite que les accords-cadres soient conclus avant le 1er décembre prochain, quitte à ce que je recommande, en temps utile et au besoin, aux ministres concernés de sanctionner sur le fondement de l’article L. 631-25 du Code rural la poursuite de l’achat de lait dans des conditions non conformes aux exigences de la loi», répond Francis Amand, médiateur des relations commerciales agricoles à la saisine de France OP Lait dans un courrier le 13 mai. L’objectif est d’aborder sereinement les prochaines négociations annuelles entre la grande distribution et ses fournisseurs qui débutent chaque année officiellement en décembre et se terminent le 1er mars. Depuis l’adoption de la loi Egalim le 1er novembre 2018, la construction des prix doit se faire de l’amont vers l’aval à partir notamment du coût de production des agriculteurs. Si la contractualisation est obligatoire dans le secteur laitier, sa formalisation et sa mise en conformité avec la loi Egalim tardent.
L’excuse du Covid-19
France OP Lait (syndicat des OP laitières) a saisi le 14 avril le médiateur. «Prétextant de la crise du Covid-19, de nombreux industriels n’ont pas respecté les accords ou les contrats avec les OP en imposant unilatéralement et brutalement des réductions de prix», assure France OP Lait. «Il est vrai que certaines laiteries n’ayant pas encore conclu d’accords ont fixé les prix de manière unilatérale en anticipant une baisse sans trop d’égard pour les différents déterminants qui étaient jusque-là en discussion, et notamment les coûts de production», convient le médiateur. «Certains en profitent également pour reporter aux calendes grecques la mise en conformité de leurs relations commerciales avec les Organisations de producteurs conformément aux exigences de la loi Egalim», renchérit France OP Lait. «Nous ne sommes en effet pas aussi loin qu’on l’avait espéré et qu’il faudrait. Mais il y avait des accords partiels ou provisoires, des formules mises en test, qui traduisent une meilleure compréhension entre les parties qui reste à concrétiser dans la durée, observe Francis Amand. Le contretemps du Covid-19 a joué défavorablement en suspendant les discussions.»
La pièce manquante
L’absence de contrôle de la part de l’administration n’est pas de nature à pousser les parties à s’accorder. La loi Egalim a prévu une sanction pour les laiteries qui collecteraient du lait sans avoir un contrat avec l’éleveur conforme avec la loi Egalim, mais «ce dispositif est fragile juridiquement tant que le décret d’application n’a pas été pris», explique le médiateur des relations commerciales. Sur le terrain, ce n’est pas pour autant la jungle. Des accords-cadres sont signés entre OP et laiteries. «Il y a des accords pour un certain nombre de petites laiteries se fournissant auprès d’éleveurs localisés à proximité et peu exposées sur les marchés internationaux», observe Francis Amand. De grands industriels privés ont également conclu des accords pour tout ou partie de leur approvisionnement. Et si la formalisation des contrats dans le cadre strict de la loi Egalim n’est pas toujours au rendez-vous, «l’idée qu’il faille tenir compte des coûts de production a au moins percolé», se réjouit le médiateur.
Lactalis : presque 20 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2019
Lors de la présentation de ses comptes annuels 2019, le 4 juin en Seine-et-Marne, Emmanuel Besnier, PDG de Lactalis, a dévoilé que son groupe avait réalisé 19,96 milliards d’euros de chiffre d’affaires, soit une augmentation de 8 % par rapport à 2018 (18,5 milliards) et de plus de 15 % depuis 2016 (17,330 milliards). «Il y a dix ans, notre objectif était d’atteindre 20 milliards d’euros. Nous avons un an d’avance», s’est-il félicité. Lactalis qui a acquis neuf entreprises en 2019 dont la division fromages de Kraft Heinz au Canada, a investi 200 millions d’euros dans ses outils industriels en France et 400 millions supplémentaires à travers le monde. Le groupe est le troisième collecteur mondial avec 20 milliards de litres par an, dont plus de 5 Mds en France. «Nous sommes aussi une fromagerie artisanale et traditionnelle et le producteur du plus grand plateau d’appellations d’origine au monde avec 38 d’entre elles», s’est réjoui Emmanuel Besnier. Cependant, la crise du Covid a affecté les cours mondiaux de la poudre de lait qui ont chuté de 30 % et le prix payé aux éleveurs devrait lui aussi être impacté. «Nous verrons en 2020 si l’ensemble de la filière joue le jeu de cette préservation des marchés français par rapport à un prix moyen qui peut évoluer différemment», a indiqué le PDG de Lactalis.
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