La filière des grandes cultures veut être payée de ses efforts
Les secteurs des céréales, betteraves et oléoprotéagineux ont tenu bon en pleine crise Covid-19, mais espèrent une prise en compte de leurs efforts, ont-ils souligné le 10 juin à l’occasion du conseil spécialisé grandes cultures de FranceAgriMer.
Jean-François Loiseau, le président d’Intercéréales déplore : «Le secteur a fait le job», mais n’est «pas ou peu reconnu par les pouvoirs publics». Des surcoûts apparaissent avec la pandémie, qui n’ont pu être répercutés jusqu’aux clients, d’après lui. Ils sont liés au transport, avec «régulièrement 30 à 35 %» de frais additionnels pour des distances de 300/600 km jusque les fabricants bretons d’aliments du bétail ou les silos portuaires. Aux heures supplémentaires (travail de nuit, le week-end) occasionnant «un petit 10 % et jusqu’à 20 %» de charges en plus selon les entreprises. En conférence de presse, le président de l’interprofession céréalière s’est inquiété de la performance économique du secteur, vu «les charges, le poids de la réglementation très lourds en France par rapport au reste de l’Union européenne». Et de critiquer à la fois les discours ambiants sur la souveraineté alimentaire, la production locale, et les projets européens autour du Green deal : «On a le devoir d’être de plus en plus décarboné, tracé, sain, efficace. L’État a le devoir de promouvoir cette agriculture et alimentation.»
Inquiétude sur les biocarburants
Franck Sander, vice-président du conseil spécialisé grandes cultures de FranceAgri- Mer et patron de la CGB (betteraviers), a témoigné d’un malaise paysan lié au sentiment qu’«on a su nourrir les citoyens, mais il manque du revenu sur l’exploitation». Au centre de ses préoccupations figurent les moyens de production. Avec le Green deal, Franck Sander a l’impression d’«une marche forcée» vers un nouveau modèle qui laisse «beaucoup de filières dans des impasses» techniques. Exemple avec l’invasion actuelle de pucerons sur les betteraves pour lesquelles les néonicotinoïdes ont été interdits. «Je veux bien qu’on change de modèle mais pas qu’on soit face à des impasses», a-t-il martelé. Et de réclamer les mêmes normes pour les produits importés : «N’importons pas l’agriculture dont on ne veut pas.»
Coup de pouce attendu pour les biocarburants
Antoine Henrion et Jean-Philippe Garnot, respectivement président des interprofession Terres Univia (huiles et protéines végétales) et AIBS (betterave et sucre), ont tous deux réclamé des mesures pour les filières des biocarburants, très affectées par le Covid-19. Concernant l’ester de colza, le secteur plaide en faveur d’«une fiscalité aménagée pour les six mois qui viennent», à savoir une baisse de la TICPE (taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques), des règles d’incorporation étendues. De son côté, Jean-Philippe Garnot juge «dommage» que le plan de relance automobile, annoncé le 26 mai, ait «oublié l’éthanol».
Moisson 2020, les premières prévisions
Le service statistique du ministère de l’Agriculture (Agreste) a livré le 9 juin ses premières estimations de récolte, montrant des orges d’hiver en fort décrochage, un colza stable. En 2020, la production s’achemine vers «une nette baisse en orges d’hiver (- 11,7 % sur un an) et une stagnation du colza à un niveau bas (3,46 Mt)», selon une note. L’orge d’hiver a connu des «difficultés d’implantation à l’automne, qui ont pesé sur les surfaces» (- 1 %), puis une «sécheresse printanière, en particulier dans le Nord-Est». Sa production est annoncée à 8,17 Mt, avec «un recul significatif du rendement qui s’établirait à 63,2 q/ha» (70,9 q/ha en 2019). Décrochage qui apparaît limité dans le Centre, principale région productrice, à - 4,7 q/ha, plus fort en Champagne-Ardenne (- 13,7 q/ha) ou en Pays de la Loire (- 11,5 q ha), indique Agreste. La récolte de colza est prévue à 3,46 Mt, un chiffre quasi-identique à l’an dernier (+ 0,1 %) mais loin de la moyenne quinquennale (- 7,3 %). Côté rendement, 31,8 q/ha sont annoncés soit + 1,5 % sur un an mais - 4,3 % par rapport à 2015-19. Les surfaces régressent (- 1,4 % sur un an), avec des disparités : plusieurs régions marquent une nette hausse, comme Midi-Pyrénées (+ 30,5 %), l’Ile-de-France (+ 20 %), Poitou-Charentes (+ 15,6 %), mais «sans compenser les baisses importantes des années précédentes», d’autres dégringolent, notamment l’Auvergne (-42 %), la Bourgogne (- 22,6 %).
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