La meunerie face aux défis démographiques et technologiques
Pour résoudre les défis qui nous attendent en matière démographique et climatique, les meuniers comptent sur la science et la technologie pour ouvrir de nouvelles perspectives.

«Le monde a soif de blé». C'est par ces quelques mots que Sébastien Abis, directeur général du Club Demeter, a introduit son propos à la Convention de l'Association nationale de la meunerie française, consacrée à «Défi blé 2040», le 16 juin à Paris. En effet, la croissance démographique va encore se poursuivre dans les années qui viennent, avant d'entamer un déclin. Mais en 2040, notre planète aura encore gagné un milliard d'habitants.
La production agricole, en particulier celle de blé, devra augmenter dans les quinze ans qui viennent pour satisfaire ces besoins croissants. Mais avec des contraintes supplémentaires : la terre qui se raréfie, le réchauffement climatique qui va entraîner une modification de la géographie de la production et une baisse des rendements. «Il faudra faire beaucoup mieux avec beaucoup moins», avertit-il.
Géographie des productions et de la démographie
Parallèlement les courants d'échanges vont évoluer au gré des évolutions de la population et de la production. Le sud-est asiatique dont la population a explosé va importer beaucoup plus, davantage que la Chine dont la démographie se stabilise. Mais le principal réservoir de croissance de la population reste l'Afrique. Sera-t-elle en mesure de satisfaire ses besoins ? En tout cas les importations vont s'amplifier sur la façade sud de la Méditerranée qui concentre un tiers des achats mondiaux pour 4 % de la population, note Sébastien Abis. L'Europe sera-t-elle en mesure de répondre à cette demande croissante ? Rien n'est moins sûr en raison du réchauffement climatique et de la raréfaction de l'eau, en Espagne par exemple, qui pèsent sur les rendements. Néanmoins, l'Europe a encore des ressources.
«Elle doit se remettre au combat. La France a des atouts, encore faut-il être déterminé», conclut-il. Mais le défi qui nous attend n'est pas que démographique. Il est aussi climatique, ce qui nécessite de promouvoir une agriculture plus durable, économe en engrais et en produits phytosanitaires, pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Christian Huyghe, directeur scientifique Agriculture de l'Inrae, a dressé les pistes sur laquelle la recherche travaille et qui pourraient être le quotidien des agriculteurs à l'horizon 2040. Ainsi a-t-il évoqué les perspectives ouvertes par le microbiote végétal. En enrobant les semences par une communauté microbienne, il serait possible de protéger les plantes contre les maladies foliaires et de s'affranchir des produits phytosanitaires chimiques.
Les ressources de la recherche
Pour améliorer le taux de protéine des farines, il propose de faire évoluer les rotations, en introduisant davantage de pois protéagineux, de légumineuses, soit en association avec les céréales, soit en interculture. Ce qui permettrait de remplacer les engrais azotés, source de protoxyde d'azote, un gaz à effet de serre puissant. Face à la résistance croissante des mauvaises herbes aux herbicides, il préconise la vulgarisation de nouvelles rotations, la mise au point de bineuses plus performantes. Pour ce qui est de l'irrigation de nouvelles techniques apparues aux États-Unis qui réduisent l'évaporation et donc la consommation d'eau pourraient être utilisées. De nouvelles espèces, comme le sarrasin qui favorise la solubilisation du phosphore et sa disponibilité pour les plantes, pourraient être développées.
Des cultures, comme le blé associé au pois, pourraient être conduite en mélange. Ce qui permettrait d'économiser de l'azote et d'améliorer la qualité des farines. Autres pistes qui préfigurent l'agriculture du futur : la conduite en bandes de plusieurs cultures dans le même champ, la mise en place de bandes enherbées couvertes de panneaux photovoltaïques pour réduire la consommation d'énergie fossile de l'exploitation, l'introduction du moteur à hydrogène pour les machines agricoles... Conclusion de Christian Huyghe : «Les transitions sont possibles, toutes les briques sont déjà présentes.»
Les opinions emises par les internautes n'engagent que leurs auteurs. L'Oise Agricole se reserve le droit de suspendre ou d'interrompre la diffusion de tout commentaire dont le contenu serait susceptible de porter atteinte aux tiers ou d'enfreindre les lois et reglements en vigueur, et decline toute responsabilite quant aux opinions emises,