L'Oise Agricole 28 mai 2025 a 15h00 | Par Dominique Lapeyre-Cavé

Les agriculteurs de l'Oise n'entendent pas se laisser enterrer

À quelques jours de son vote prévu à l'Assemblée Nationale, les agriculteurs, partout en France, se sont mobilisés contre la dernière version de la PPL Duplomb-Mennonville qui devait limiter les entraves à l'agriculture mais qui avait été vidée de son contenu au profit de mesures encore plus contraignantes.

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La créativité vient en manifestant. Encore plus fort, en termes de symbolique que les panneaux «Vous détricotez la loi, on tricote la révolte» ou «on nourrit la France et on crève en silence», le cercueil de l’agriculture française a présidé à cette mobilisation commencée jeudi 21 mai à midi devant la préfecture de l’Oise à Beauvais. Candélabres, bougies, fleurs, tout symbolisait la trahison des députés vécue comme un enterrement première classe de l’agriculture.
«Cette loi dont le vote a finalement été reporté au 3 juin, signe d’une certaine fébrilité à Paris, est une épée de Damoclès au dessus de nos têtes. Pourtant, il y a 15 mois, pendant notre mobilisation historique sur les autoroutes, les politiques sont tous venus nous assurer de leur soutien pour aider au maintien du revenu des agriculteurs, à la simplification des procédures administratives, à la lutte contre les distorsions de concurrence. Et là, que voit-on ? Le détricotage de la proposition du Sénat, l’ajout d’articles et la mise en danger imminente de nos outils de productions. Car la PPL Contraintes contient des dispositions sur les phytos, mais aussi sur l’eau, l’irrigation. Je vous annonce les meilleures : des ZNT de 200 mètres et l’interdiction des phytos et des engrais, mêmes organiques, dans les bassins d’alimentation de captage. Autant dire la fin de la bio», s’exclame au micro Régis Desrumaux. Et de s’insurger contre cette trahison, ourdie par des députés parisiens bien éloignés des réalités agricoles et à laquelle les élus de la ruralité n’ont pas su s’opposer.
«En effet, la Commission des affaires économiques et celle du Développement durable et aménagement du territoire ont vu le mariage de la carpe et du lapin : des députés opposés ont voté ensemble des mesures contre le stockage de l’eau. Cette loi devait nous assurer une boîte à outils pour pouvoir travailler, elle nous plombe. Pourtant, les membres du gouvernement sont tous venus pendant le Salon de l’agriculture nous dire qu’il fallait produire, assurer la souveraineté alimentaire et se battre à Bruxelles pour enfin harmoniser les règles», renchérit Luc Smessaert, président de la Chambre d’agriculture.
Matthieu Carpentier, président de JA Oise, rappelle que les agriculteurs sont des professionnels responsables, qu’ils savent ce qu’ils font des produits phytosanitaires et qu’il faut leur faire confiance. «Avec cette loi, on n’installera plus aucun jeune.»
Pour Alexis Hache, président de la CGB 60, les distorsions de concurrence seront amplifiées. Par exemple, l’acétamipride est encore autorisée dans de nombreux pays d’Europe et ne sera pas réautorisée comme demandé dans la loi Entraves. De son côté, Geoffroy d’Évry, président national des producteurs de pommes de terre, insiste sur le coût social de telles mesures. «Les agriculteurs, généralement résilients, vont se décourager. Il faut donner des perspectives aux jeunes.»

Blocage de l’A16
Devant la cinquantaine de tracteurs massés autour de la préfecture, la bonne centaine d’agriculteurs présents a partagé sandwichs et bières avant de se diriger vers l’autoroute A 16 en début d’après-midi. Ils ont repris leurs habitudes de l’an passé et se sont installés sous le même pont en direction de Paris qu’à l’hiver 2024. Dîner barbecue et pour une dizaine d’entre eux, dont Régis Desrumaux, la nuit sur place. Ce n’est que le vendredi après déjeuner qu’ils ont quitté les lieux, rendant l’A16 aux automobilistes.
Prochaine étape prévue à ce moment-là : le siège devant l’Assemblée Nationale avec un roulement des régions syndicales pour assurer une présence continue et «motiver» les députés à voter la loi initiale. Les Hauts-de-France devaient faire le voyage à la capitale mercredi 28 mai. Parallèlement, les agriculteurs de l’Oise avaient rencontré certains de leurs députés. Au final, pour une fin heureuse avec le rejet de la loi par ceux qui la promouvaient au départ.

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