Les plantes de Mathilde poussent au prieuré de Bray
C'est une question d'harmonie entre un lieu fait de pierres millénaires et de nature préservée, et l'itinéraire riche et construit d'une jeune femme vers la production de plantes médicinales et aromatiques.
Tout respire le calme et la beauté au prieuré de Bray, sur la commune de Rully, à quelques kilomètres de Senlis. Là, au milieu des champs de céréales et de betteraves, coule l'Aunette dont la vallée accueille les magnifiques bâtiments en pierres blanches d'une ancienne ferme du XIIIe siècle, tenue alors par des chanoines. En témoignent entre autres la grange, le pigeonnier et la chapelle achetés et restaurés petit à petit depuis plus de vingt ans par Laurent Sirot, originaire du Nord. «Avec des amis, nous redonnons vie à cet ensemble incomparable et notre idée est qu'il soit un lieu collectif de vie, avec des productions agricoles en accord avec son histoire, et qu'il accueille aussi des artistes, des expositions, des concerts».
Le prieuré de Bray ne pouvait alors être que l'endroit idéal pour le projet d'installation agricole de Mathilde Perrichon, aujourd'hui 41 ans. Rien, ou plutôt tout, ne prédestinait cette diplômée en lettres supérieures, à un retour à la terre. Rien, car la jeune femme, dont les parents ne sont pas agriculteurs, a suivi des études de lettres supérieures et de communication avant de travailler à l'Établissement français du sang à Paris, puis à l'Irqua (Institut régional de la qualité agroalimentaire) au sein de la Chambre régionale de Normandie, à Caen. «C'était ma première incursion professionnelle dans le milieu agricole. J'avais des grands-parents dans le Berry, un grand-père salarié de coopérative et vigneron à Menetou-Salon. Que ce soit du côté paternel ou maternel dans la Manche, mes grands-parents avaient des potagers où je passais beaucoup de temps», confie la jeune installée.
Tout, car ses lectures la portent à s'intéresser au lien entre agriculture, histoire, alimentation, santé et société. «Mon travail à l'Irqua m'a permis de rencontrer toute sorte d'agriculteurs, des bio ou des conventionnels. Du coup, j'ai un regard très nuancé car je sais que ces notions sont beaucoup plus complexes que celles, stéréotypées, développées dans certains médias. J'ai un profond respect pour ceux qui font de leur mieux, quel que soit leur système d'exploitation», explique Mathilde Perrichon. Elle intègre ensuite Isagri et son service communication. «J'ai visité beaucoup d'exploitations, notamment des laitières, et j'ai alors compris que la France est un grand pays agricole, c'est le résultat de son histoire.»
Lorsqu'Isagri acquiert le journal La France agricole, elle est en Afrique du Sud où elle a repris son métier d'enseignante en lettres, sa première passion. À son retour, elle réintègre le service communication du groupe France agricole. «Travailler avec les journalistes m'a fait découvrir toutes les facettes du métier d'agriculteur et je me suis particulièrement intéressée aux sujets qui faisaient leur apparition dans les pages : on y parlait circuits courts, diversification, bien-être animal, attentes sociétales, face à des visions plus conventionnelles de l'agriculture. Sans être dans le jugement, ces débats de fond ont sans doute contribué à façonner ce qui allait devenir mon projet d'installation. Le métier d'agriculteur est immensément technique et pluridisciplinaire, il faut une véritable foi pour le faire, bien loin des clichés que l'on peut entendre ou lire», témoigne-telle.
Et puis les éditions de la France agricole ont ouvert une collection de livres sur l'installation de néo-ruraux aux projets atypiques. «J'ai découvert qu'on pouvait tirer un revenu sur des surfaces très modestes. J'ai alors suivi un stage en permaculture et pris un congé individuel de formation afin de suivre un BPREA en maraîchage bio au lycée agricole de Brie-Comte-Robert.»
Premières plantes
Mathilde Perrichon suit des stages sur des exploitations du secteur et finit par rencontrer Laurent Sirot, alors en pleins travaux et à la recherche de projets pour faire vivre le prieuré dé Bray. Dès 2019, elle teste quelques cultures sur le site et suit une formation d'herboriste à l'École des plantes de Paris car elle s'intéresse aux plantes médicinales. «J'ai ainsi finalisé mon projet en liant santé, alimentation, agriculture et respect de la nature. Ma production de plantes aromatiques et médicinales se fera en bio, en préservant la biodiversité et ce type de production fait sens au regard du passé historique du lieu. J'ai alors commencé mon parcours à l'installation avec la Chambre d'agriculture de l'Oise et je me suis installée en avril 2020.» Laurent Sirot lui a signé un bail rural sur 14 ha, dont une partie en prairies où paissent des chevaux et dans lesquelles elle récolte des herbes sauvages et une autre en miscanthus qu'elle utilise pour pailler ses planches de cultures où elle a installé une quarantaine de plantes différentes, aromatiques et médicinales : astéracées, apiacées, brassicacées, lamiacées...
Elle a travaillé à perte en 2020 faute de production suffisante pour son premier exercice, mais sera bénéficiaire en 2021, malgré des récoltes compromises par les conditions météo de l'année, et elle espère pouvoir se rémunérer l'année prochaine. En attendant, elle récolte et sèche les plantes qu'elle assemble pour former des tisanes vendues dans plusieurs boutiques de produits de terroir à Rully, Orry-la-ville, Coye-la-Forêt, Le Plessier-sur-Bulles... ainsi que dans trois Amap. Elle vend aussi tisanes et plantes fraîches au marché de Villers-Saint-Frambourg.
L'hiver, quand les plantes sont au repos, Mathilde Perrichon donne des cours aux lycées agricoles de Brie-Comte-Robert et d'Airion. En attendant la prochaine belle saison des plantes au prieuré de Bray.
Les Plantes de Mathilde
- lesplantesdemathilde.fr/
- Chaîne YouTube : les plantes de Mathilde
- lesplantesdemathilde@gmail.com
- Pour tout savoir sur le prieuré de Bray et ses nombreuses animations, page Facebook du Prieuré Saint-Victor de Bray et www.facebook.com/LesRendezVousdeBray/
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