L'Oise Agricole 02 décembre 2021 a 08h00 | Par Dominique Lapeyre-Cavé

Les planteurs à la recherche d'un prix de betteraves rémunérateur

C'était le thème de la conférence annuelle de la CGB 60, ce mardi 30 novembre à Estrées-Saint-Denis, qui a aussi permis de faire le point sur les nombreux dossiers en cours, en présence de Franck Sander, président de la CGB.

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Le président Alexis Hache pense que le marché à terme pourrait être une solution pour mieux vendre le sucre et ainsi espérer que les betteraves soient mieux payées par les industriels.
Le président Alexis Hache pense que le marché à terme pourrait être une solution pour mieux vendre le sucre et ainsi espérer que les betteraves soient mieux payées par les industriels. - © DLC

«La betterave sucrière fait partie de l'ADN de l'agriculture de l'Oise mais, depuis quelques années, elle a subi de nombreuses turbulences : abandon des quotas, baisse des prix, jaunisse, gel...», rappelait en préambule le président Alexis Hache. Et, comme le démontre l'année syndicale 2021, les sujets ne manquent pas. D'abord, l'indemnisation de la jaunisse 2020 grâce au travail de la CGB, quand même 75 millions d'euros pour la filière, puis l'obtention de la dérogation d'utilisation des NNI pour les semis 2021, assortie d'une succession culturale insatisfaisante et réductrice.

Ensuite, les difficultés avec deux produits phytosanitaires non conformes, Goltix et Marquis, dont le premier a touché des surfaces dans l'Oise. Enfin, un accord entre les planteurs et Saint Louis Sucre à propos de la Scica déshydratation de Roye et un engagement de l'industriel à plus de transparence.

Sans oublier le gel tardif de 2021 qui a touché 3.500 ha dans l'Oise, soit 10 % des surfaces. Heureusement , la mobilisation de la CGB et de Franck Sander a permis aux planteurs touchés de resemer des betteraves NNI. Mais l'inquiétude d'Alexis Hache se porte sur l'évolution des surfaces betteravières dans le département qui avaient augmenté de 19 % à la fin des quotas pour revenir à 35.700 ha aujourd'hui, soit 1.500 ha de moins qu'en 2015.

Une question de prix

«Quelles informations positives pouvons-nous donner aux planteurs pour qu'ils aient envie de continuer ? Le pire est que les prix mondiaux du sucre ont beaucoup augmenté. Les signaux du marché sont encourageants et les prix des betteraves devraient être supérieurs à ce qu'ils sont», déplore-t-il. Et de se demander si les pratiques de commercialisation des sucriers sont bien adaptées. «Ils vendent tout rapidement, avec un prix fixé en amont. Résultat, quand le marché remonte, ils n'en profitent pas car ils ont déjà tout vendu. Et nous non plus», se désole Alexis Hache. D'où le souhait d'évoquer le marché à terme au cours de cette réunion (voir ci-dessous).

Au delà du possible marché à terme, Franck Sander porte des espoirs dans la loi Egalim 2 «qui peut être une opportunité et donner aux planteurs l'envie de semer des betteraves. Il faut des annonces de prix car la betterave est en concurrence avec d'autres cultures.» Cette loi est un outil parmi d'autres, à disposition des vendeurs de sucre afin de les sécuriser et, par effet, de peut-être donner plus de lisibilité aux planteurs.

De même, la CGB pousse à l'expérimentation d'un autre outil de la filière, l'instrument de stabilisation du revenu (ISR) avec l'aide des Régions Hauts-de-France, Île-de-France et Grand-Est et abondé par des fonds du second pilier. S'il fonctionne, cet outil devra être pérennisé par l'État et non pas régionalisé. À rapprocher de l'assurance récolte pour laquelle le gouvernement doit faire des annonces rapidement.

Et d'agronomie

Mais le président Sander voulait rappeler que si le dossier NNI est une belle victoire pour 2021, une nouvelle demande pour les semis 2022 a été formulée, qui pourrait aboutir pour fin janvier. Néanmoins, en ce qui concerne la succession culturale imposée, elle dépendra de l'avis de l'Anses. «Personne ne pourra s'y opposer mais je souhaite que ce dossier soit traité avec un regard technique et non pas politique.»

De même, le président s'inquiétait de la hausse des intrants et faisait part de ses espoirs sur l'avancée de la génétique vis-à-vis d'une tolérance jaunisse. Il plaidait aussi pour moins de retour de betteraves dans les assolements, pour une approche système afin de lutter contre les résistances.

Timothé Masson, Franck Sander et Jean-Xavier Mulie à la table ronde.
Timothé Masson, Franck Sander et Jean-Xavier Mulie à la table ronde. - © DLC

Le marché à terme, adapté aux céréales mais inexistant en betteraves

Timothé Masson, responsable économique à la CGB, rappelle que le marché du sucre est déficitaire en Europe et que la hausse des prix du sucre ne se répercute pas sur celui des betteraves. «Le prix auquel les industriels vont vendre leur sucre en 2022 a été fixé cet été 2021. Depuis, le prix mondial est à la hausse, mais personne en Europe n'en profitera. Il y a une totale décorrélation entre l'Europe et le reste du monde dans lequel tous les signaux sont au vert : forte demande en éthanol, en sucre. Les betteraves 2022 devraient être mieux payées qu'en 2021.» Le marché à terme du sucre n'existe pas en Europe et c'est dommage car la filière doit être plus réactive pour mieux vendre.

Jean-Xavier Mullie, ancien directeur de la coopérative Agora mais surtout ancien président de Ceremis, structure de commercialisation, qui traitait 3 à 4 millions de tonnes, témoignait : «Le marché à terme est un marché financier, un marché papier, qui ne sert pas à commercialiser mais à fixer un prix. On fixe un prix et le dénouement des opérations se produit à une date ultérieure. Par exemple, aujourd'hui, on peut vendre la récolte 2022 et même la récolte 2023, ce qui sécurise le revenu». Le marché à terme des céréales s'est développé à la fin de l'intervention, en 2007. «Les céréaliers n'y étaient pas favorables au début, mais les financiers ont apporté de la liquidité. On vend sans se poser la question de savoir si quelqu'un achète. Le marché Euronext a une activité 15 fois plus importante en volume (560 millions de tonnes) que la récolte (97 millions de tonnes). Les actes d'achat et de vente sont découplés. Et puis le marché est transparent, on négocie sur le transport, les marges, les réfactions ou bonifications qualité, la prime Rouen», assure l'intervenant qui y voit beaucoup d'avantages : transparence, anonymat, contrepartie nulle, facilité d'exécution, arbitrage. L'idée serait que les groupe sucriers s'emparent de cet outil pour mieux vendre, mais cela les obligerait à une transparence sur leurs marges et, surtout, il faudrait trouver un moyen d'indexer le prix des betteraves sucrières dessus. C'est ce qu'expérimentent des planteurs anglais qui n'ont qu'un seul industrie,l British Sugar. À partir du prix du marché à terme, un prix de betteraves journalier est fixé, auquel peuvent contractualiser les planteurs. «Il faut convaincre l'industriel que seul un prix attractif pourra décider les planteurs à semer. Nous devons partager les bons et mauvais moments», témoigne un planteur anglais.

Ford mise sur l'E85

Vincent Badetz, responsable de la marque américaine sur la zone Nord de Paris, a présenté la gamme du constructeur qui croit en ce carburant depuis 2009. «Nous croyons au bioéthanol depuis longtemps et nos modèles, qui roulent au E85, séduisent de plus en plus de clients pour qui participer à la transition énergétique est le critère de choix prépondérant dans l'acte d'achat. Nos boîtiers sont montés en usine, ce qui est rassurant pour eux», assure-t-il.

Certes, la consommation d'un moteur à l'E85 est supérieure de 15 à 20 % à un moteur diesel, mais vu le prix de l'E85, environ 0,70 EUR/l actuellement, ce choix est économiquement très intéressant. «Il faut noter que le prix de l'E85 est stable contrairement aux autres carburants qui s'envolent et, surtout, le nombre de pompes proposant l'E85 augmente très vite. En septembre, on en relevait 2.583. Maintenant, 28 % des stations proposent de l'E85, dont les Intermarché», précise Vincent Badetz. L'économie réalisée en carburant sur une année peut être estimée de 900 à 1.000 EUR pour 15.000 km roulés.

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