L'Oise Agricole 30 juin 2021 a 17h00 | Par Antonin Garnier

Un accord trouvé, mais encore quelques questions

Trois ans après les propositions initiales de la Commission européenne, un accord politique a été trouvé sur les grandes lignes de la future Pac qui entrera en vigueur le 1er janvier 2023. Parmi les derniers compromis conclus figurent : une enveloppe de 25 % pour les éco-régimes, un dispositif de redistribution des aides vers les petites exploitations et les régions aux niveaux de soutien les plus faibles, mais aussi un alignement de la Pac avec les objectifs du Green deal européen.

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Le ministre de l'Agriculture, Julien Denormandie, s'est félicité le 28 juin
de l'accord sur la Pac conclu à Luxembourg, le qualifiant de «bon accord
pour la France et pour l'Europe».
Le ministre de l'Agriculture, Julien Denormandie, s'est félicité le 28 juin de l'accord sur la Pac conclu à Luxembourg, le qualifiant de «bon accord pour la France et pour l'Europe». - © Agence de presse

Réunis le 28 juin à Luxembourg, les ministres de l'Agriculture de l'UE ont avalisé le compromis sur la future Pac trouvé quelques jours auparavant entre la présidence portugaise du Conseil et le Parlement européen. La ministre portugaise Maria Ceu Antunes a été chaleureusement applaudie pour avoir dégagé un accord qui respecte les grandes lignes de la position des Vingt-sept, même si le Parlement européen est parvenu à obtenir quelques concessions de dernières minutes - notamment un engagement d'alignement des plans stratégiques nationaux (PSN) avec les objectifs du Green deal. Après l'échec des pourparlers fin mai, les négociateurs des trois institutions européennes ont finalisé, le 25 juin, à l'issue de deux journées de discussion en trilogue, un accord sur les trois règlements de la future Pac. Un compromis a, en particulier, été trouvé sur le point le plus épineux : les plans stratégiques et leur architecture verte.

Il s'agit de «la réforme de la Pac le plus ambitieuse depuis les années 1990», se sont félicités à l'unisson le commissaire européen à l'Agriculture Janusz Wojciechowski et le président de la commission de l'Agriculture du Parlement européen. «Même si j'aurai bien sûr aimé aller un peu plus loin sur l'environnement, je crois que si nous concrétisons les engagements pris aujourd'hui dans le cadre des futurs plans stratégiques, cet accord va réellement donner un cap plus vert à la Pac», a renchéri le vice-président en charge du Green deal, Frans Timmermans.

Interrogations sur l'alignement avec le Green deal

Sur les éco-régimes, le compromis prévoit une part de 25 % des fonds du premier pilier, avec un plancher à 20 % pour les deux premières années de mise en oeuvre (2023 et 2024). Concernant l'obligation de rotation des cultures (conditionnalité des aides), la diversification peut être reconnue comme équivalente sous certaines conditions. Une part minimale d'au moins 4 % des terres arables au niveau de l'exploitation devra être consacrée à des zones non productives. Ce pourcentage est porté à 7 % si des cultures fixatrices d'azote ou des cultures intermédiaires sont comptabilisées. Une part de 35 % des fonds du second pilier doit être réservée à des actions en faveur de l'environnement et du bien-être animal.

Sur l'alignement des plans stratégiques avec les objectifs du Green deal, une note de bas de page indique que «lors de l'évaluation des plans stratégiques, la Commission devrait évaluer leur cohérence et leur contribution aux engagements de l'UE pour 2030» prévus dans les stratégies De la ferme à la table et Biodiversité (-50 % de pesticides, 25 % de surfaces bio, etc.). De plus, la Commission se garde le droit d'ajouter des indicateurs de suivi en cours de période. Ces deux dernières dispositions inquiètent beaucoup d'États membres (France, Espagne, Allemagne notamment) qui craignent une instabilité juridique.

«Davantage de régulation»

Autre volet central des discussions finales sur lequel un accord a pu être conclu : la redistribution des aides. Un paiement redistributif vers les premiers hectares des exploitations d'au moins 10 % des paiements directs doit être obligatoirement mis en place (sauf si l'État membre prouve qu'il peut obtenir le même résultat avec d'autres mesures comme la dégressivité ou le plafonnement). Et une convergence du niveau des aides à l'hectare au sein d'un même État membres à hauteur de 85 % est prévue en fin de période (2027). Enfin, 3 % des aides de la Pac devront être réservés aux jeunes agriculteurs et aux nouveaux entrants dans le secteur.

Les pourparlers sur les deux autres textes de cette future Pac (OCM unique et règlement horizontal sur la gestion et le financement) ont également été bouclés. Ces deux dossiers avaient déjà fait l'objet d'un accord partiel à la fin du mois de mars. Sur l'OCM, il avait été convenu : une prolongation des autorisations de plantation des vignes jusqu'en 2045 (avec un réexamen en 2028 et 2040), les dispositions encadrant les vins désalcoolisés et l'étiquetage nutritionnel. Un accord avait aussi été trouvé sur la gestion de l'offre par les interprofessions, qui sera étendu à tous les produits agricoles sous IGP/AOP. Négociateur parlementaire sur ce texte, le Français Éric Andrieu se félicite d'un accord qui, pour la première fois, «se conclut par davantage de régulations que de dérégulation». Il n'a néanmoins pas obtenu l'interdiction des produits importés comportant des pesticides non tolérés en Europe. Les États membres ont également refusé jusqu'au bout d'intégrer le sucre dans la liste des produits pouvant bénéficier de l'intervention publique.

Validation par Bruxelles

Concernant le suivi et le contrôle de la Pac, il était déjà prévu qu'un examen bisannuel de la performance, avec des pourcentages de déviation par rapport aux objectifs des plans stratégiques (35 % en 2025 et 25 % en 2027). Les discussions du 25 juin ont permis de clore la question du financement de la réserve de crise de 450 millions d'euros par an. Les six prochains mois vont maintenant être consacrés à la transposition juridique de cet accord politique en vue de son approbation définitive espérée cet automne. Les États membres devront également présenter d'ici le 31 décembre leurs projets de plans stratégiques nationaux, qui devront être validés par la Commission européenne au premier semestre 2022. L'objectif : une entrée en vigueur le 1er janvier 2023.

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