L'Oise Agricole 09 février 2023 a 09h00 | Par Claire Duhar, Louise Tesse

Un plan bio régional pour doubler les surfaces d'ici 2027

Le conseil régional des Hauts-de-France a adopté un nouveau plan bio pour les cinq ans à venir. «Une ambition renouvelée pour la bio» des Hauts-de-France dans un contexte incertain pour la filière.

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Fin 2021, la région comptait 60 000 ha bio, soit 2,8 % de la SAU.
Fin 2021, la région comptait 60 000 ha bio, soit 2,8 % de la SAU. - © Nadège Petit/ FrAgTw

En séance plénière le 26 janvier, les conseillers régionaux ont adopté un nouveau plan bio 2023-2027. Un plan «pragmatique et réaliste» souligne Marie-Sophie Lesne, vice-présidente en charge de l'agriculture, qui manque d'ambitions pour les écologistes. Décryptage.

Constat

En 2017, la Région adoptait son premier plan bio quinquennal. Elle est alors la dernière région de France en bio avec seulement 32 000 hectares, soit 1,5 % de sa superficie agricole utilisée (SAU). L'objectif est de multiplier et accompagner les conversions. Objectif atteint pour la majorité régionale cinq ans plus tard : «Les Hauts-de-France rattrapent leur retard en matière de développement de l'agriculture biologique (AB) avec une dynamique de conversion à deux chiffres, supérieure à la moyenne nationale.»

Le nombre d'exploitations certifiées bio et la superficie ont quasiment doublé avec près de 60 000 hectares, fin 2021, soit «plus de 18 %» de surfaces supplémentaires converties en moyenne par an. Du progrès, mais les marges de progression sont bien réelles : «Malgré cette dynamique, les Hauts-de-France occupent encore le bas du tableau en termes de surface bio» : 2,8 % contre 10,3 % au niveau national. La région est toujours à la traîne aussi au niveau de la consommation en bio, près de deux fois inférieure à la moyenne française, et encore la dernière de France. Même si le contexte actuel n'est pas favorable à la bio, «pour autant, la bio est compétitive et les marges de progrès au niveau de la consommation restent encore importantes en région», affirme Marie-Sophie Lesne.

Acte II du plan bio

D'où l'intérêt de prolonger le soutien à la filière, estime la Région. «Ce nouveau plan bio, on y travaille depuis un peu plus d'un an avec tous les acteurs de la filière dans un contexte qui s'est retourné pour les produits bios avec une consommation globale en recul de 7,5 % en volume en 2022 en France et des déconversions qui n'épargnent par les Hauts-de-France», rappelle-t-elle. L'objectif est chiffré : atteindre, en 2027, le doublement des surfaces agricoles bio régionales par rapport à 2021. Pour y arriver, la Région s'engage notamment à «maintenir les montants de subvention annuels accordés à l'ingénierie du plan bio ; maintenir et améliorer les aides dédiées à la bio ; prioriser et majorer de manière significative les autres aides non spécifiques au bio pour les acteurs bio ; mettre en cohérence les objectifs du plan bio avec les politiques publiques de la Région et avec l'objectif d'atteindre 20 % de produits bio dont la moitié d'origine régionale dans la politique de restauration des lycées et lors des commandes publiques émises lors de réceptions, événements ou traiteurs». «Nous nous battons aussi pour la pérennité des exploitations converties pour ne pas perdre le bénéfice de ce qui a été fait et l'argent investi», insiste la vice-présidente à l'Agriculture.

«En dépit des avancées, nous resterons la dernière région de France. Nous entendons la réalité présentée, mais il faut aussi parler d'une autre réalité, celle de la biodiversité qui s'effondre, de la qualité de l'eau, et du fait que d'ici dix ans, la moitié des exploitations vont changer de main, de génération, interpelle Nicolas Richard, du groupe Pour le climat et pour l'emploi. Or, on ne se convertit pas au bio quand on part en retraite, pas non plus quand on se lance dans un modèle avec vingt ans d'emprunt. Il y a pour les cinq prochaines années, une nécessité à appuyer plus sur la bio pour la biodiversité, pour l'emploi, pour l'agriculture.» Pour mémoire, 9,5 millions d'euros ont été engagés sur le premier plan.

 

Syndicats, coopératives et chambres travaillent sur un plan de sauvegarde pour le bio

La Fnab (producteurs bio), le Forébio (coopératives bio), les transformateurs (Synabio), la Coopération agricole, les chambres d'agriculture et la FNSEA travaillent sur un plan de sauvegarde de l'agriculture biologique, qui pourrait être présenté au ministère de l'Agriculture le 17 février. Avec le ralentissement des engagements en bio en 2022, près de la moitié des 340 MEUR annuels prévus pour les aides à la conversion (second pilier de la Pac) pourraient ne pas être consommés. «Le reliquat doit protéger les fermes existantes», encourage Philippe Camburet, président de la Fnab. La Fnab, le Synabio, et le Forébio proposent donc de basculer une partie de l'enveloppe des conversions vers le premier pilier, afin d'augmenter l'éco-régime bio à 145 EUR/ha, contre 110 EUR/ha actuellement. Cette mesure représenterait un coût entre 80 et 100 MEUR/an, soit la moitié environ du reliquat projeté. Autre demande plus consensuelle : déclencher des aides de crise pour les productions en difficulté. «L'État l'a fait pour le porc (début 2022, ndlr), et peut donc le faire pour la bio», encourage Loïc Guines, élu référent des chambres pour la bio. Le reliquat pourrait aussi, selon lui, financer les campagnes de l'Agence bio, qu'il préside actuellement. Du côté des transformateurs, la directrice générale du Synabio, Claire Dimier-Vallet, alerte sur «des problèmes de trésorerie», qu'elle détaillera prochainement à Bercy.

- © Agence de presse

Emmanuel Leveugle, référent Plan Bio, Chambre d'agriculture Nord-Pas-de-Calais

«Gravir des marches chaque année»

Quel bilan tirez-vous du premier plan bio ?

Le bilan est positif car on a une adéquation entre l'offre et la demande. On avance, on ne régresse pas. Il y a une agriculture avec un grand A, qui est diverse et diversifiée. Un agriculteur qui aspire à produire en bio se trouve dans un environnement favorable. Le but est de répondre aux attentes des consommateurs qui évoluent. Depuis le covid, notamment, la demande de la restauration collective a diminué avec le télétravail.

Le nouveau plan bio aurait-il pu être plus ambitieux ?

Il est cohérent avec les nouvelles difficultés auxquelles la bio doit faire face pour avoir, non pas des buts non atteignables mais, au contraire, que l'on puisse gravir des marches chaque année. Les objectifs sont toujours très ambitieux : on vise 6 % de la surface en bio pour 2027 et 9 % sur les aires d'alimentation captage. Pour autant, il y a une augmentation des déconversions en France. Au 1er janvier 2022, on était déjà à 5 % de déconversion d'après l'Agence bio. En Hauts-de-France, comme nous sommes jeunes et progressons, il y a peu de déconversions. Il y aurait aussi 30 % de lait bio qui partirait en conventionnel, ce qui est problématique. On essaie également de comprendre pourquoi il y a une baisse de la demande en restauration collective. Autour de la table, il y a aussi les conseils départementaux qui la financent. Les grandes et moyennes surfaces veulent des produits bio pas chers, ce qui revient à détruire la valeur qu'apporte le producteur au produit. Ce n'est pas judicieux. La bio est toujours plus chère que le conventionnel : il y a des atouts, mais la récolte est moindre en quantité, on a davantage de main-d'oeuvre. La bio est positive pour la santé, pour l'environnement.

Quels sont les freins au développement de la bio dans la région ?

Cela est variable selon les filières. L'élevage a de grandes difficultés. L'an passé, les légumes, puis les oeufs ont aussi connu des difficultés. Les grandes cultures continuent d'avancer et de se structurer. Le but est que les filières puissent avancer, avec des acteurs au plus proche des producteurs. Le plan bio est bien pensé, il n'est pas exubérant mais cohérent et en adéquation avec les différents interlocuteurs. Cela le rend plus facilement atteignable. Le tout est de régler les différentes problématiques : le pouvoir d'achat du consommateur, les changements d'attitude de consommation, de nouveaux rythmes de travail, donc des modes d'accès différents à la restauration collective...

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