L'Oise Agricole 04 septembre 2025 a 10h00 | Par Pierre Poulain

De l'agriculture à la pension familiale : le déclic d'une reconversion

À Crillon, dans l'Oise, une ancienne salariée agricole a trouvé sa voie dans l'accueil d'animaux de compagnie. Rencontre avec Claire Juquel, fondatrice d' «A vos pâtes, prêts, partez !», qui a troqué les bovins contre les chiens et chats.

Abonnez-vous Reagir Imprimer
Le nom de l'entreprise, «A vos pâtes, prêts, partez !», a été trouvé après deux mois de recherches collectives avec la famille
Le nom de l'entreprise, «A vos pâtes, prêts, partez !», a été trouvé après deux mois de recherches collectives avec la famille - © PP

Pour Claire Juquel, l'agriculture, c'était une passion contrariée. «J'adorais mon métier, mais ça ne collait pas, confie cette ancienne agent du service de remplacement de l'Oise. Soit c'était au niveau salaire, soit c'était le manque de liens, il y avait toujours quelque chose qui ne collait pas.» Le déclic est venu d'une conversation avec son maréchal-ferrant, propriétaire de chevaux comme elle. «Il m'a dit : nous aussi, on a des chevaux, mais quand on part en vacances, il n'y a personne qui s'y connaît vraiment pour venir s'en occuper. Nos chiens, eux, vont dans une pension familiale, mais elle est toujours complète.» De cette discussion naît une idée qui fait peu à peu son chemin. Propriétaire depuis un an d'une maison avec plus de 3.000 mètres carrés de terrain clôturé à Crillon, Claire avait tous les atouts en main. En novembre dernier, elle démissionne. Après un mois de réflexion en décembre, la décision est prise : «Soit je retrouvais un travail en tant que salariée, soit je me lançais dans une boîte. C'est là que je me suis dit, bon ben allez, je tente.»

Et le lancement est express. Dès janvier, Claire boucle toutes ses démarches : création d'entreprise, déclaration DDPP, obtention de l'attestation de connaissances animales (Acaced) obligatoire pour travailler avec les animaux de compagnie, et même une formation de premiers secours félins et canins. «Dans le mois de janvier, j'ai tout passé. L'Acaced, c'est trois jours, donc c'est vraiment rapide.» Ses diplômes agricoles lui donnaient déjà des bases solides : «Certes les bovins ne sont pas des chiens, mais au niveau des soins, on s'en rapproche quand même.» Sans compter qu'elle a «toujours eu des animaux», lui donnant ce «certain recul avec les animaux de compagnie».

Le nom de l'entreprise, «A vos pâtes, prêts, partez !», a été trouvé après deux mois de recherches collectives avec la famille. Un nom qui «reste dans la tête», selon Claire. Son concept ? La pension familiale, une alternative aux chenils traditionnels. «L'intérêt, c'est que les animaux vivent avec nous, donc ils ne sont pas enfermés dehors dans une cage. Ça leur permet d'avoir une vie de famille comme ils ont chez eux, d'être accueillis, de ne pas avoir le stress d'être enfermé tout seul.» «Je fais vraiment comme j'aimerais qu'on fasse pour mes animaux», résume-t-elle.

Cette approche demande une sélection rigoureuse. Chaque client passe par une pré-visite obligatoire : «Ils viennent avec leur chien, je vois comment ils se comportent avec moi, dans le jardin, je mets ma chienne avec, ça me donne déjà une bonne image.» Le critère numéro un ? La sociabilité, notamment avec les chats. «Si le chien se met à grogner ou à sauter sur le chat, je dis non tout de suite.»

Actuellement, Claire accueille en moyenne 3 à 4 chiens simultanément (9 animaux maximum réglementairement), pour des séjours allant «d'un week-end à un mois». Sa journée type commence à 7 h par la sortie de tous les pensionnaires, suivie des repas individualisés - chaque propriétaire fournit la nourriture habituelle de son animal.

L'activité s'accompagne aussi de visites à domicile, un service qui élargit sa clientèle : «Je vais directement chez les gens m'occuper de leurs animaux. Ça peut être pour les chiens, les chats, tous les animaux de la ferme, les volailles, les chevaux.» Son expérience agricole devient alors un atout : «Il n'y a pas grand monde qui fait des visites en s'y connaissant pour aller visiter les chevaux.» L'ex-salariée agricole de 27 ans accueille également en pension de plus petits animaux tels que les lapins ou les cochons d'Inde.

Une réglementation complexe

Seule ombre au tableau, son activité se trouve dans une zone grise règlementaire qui la place en concurrence avec «énormément de personnes qui font ça au black», sans formation à l'accueil d'animaux, et proposant des tarifs «plus que moitié prix» par rapport à ses prestations déclarées.

Rassurer les propriétaires

Les premiers mois sont encourageants. «Depuis le mois de juillet, niveau rentrée d'argent, je suis plutôt contente», se réjouit Claire. Sa stratégie de communication multi-canal porte ses fruits : site internet, réseaux sociaux (Facebook, Instagram, TikTok), prospectus et partenariats avec les magasins spécialisés.

Sa clientèle s'étend de jeunes de 20 ans à des retraités. «Certes, ce sont des gens qui gagnent bien leur vie parce que mettre son chien en pension a un coût, mais je n'ai pas de profil type de client.»

Les retours clients la confortent dans ses choix. Elle mise sur la transparence avec «des photos plusieurs fois par jour, des nouvelles plusieurs fois par jour par WhatsApp». Une approche qui rassure, surtout pour les nombreux propriétaires qui confient leur animal pour la première fois : «La plupart des clients, c'est 'oh je laisse mon chien pour la première fois, ça me stresse' et ils repartent en étant super contents.»

Si la jeune femme souhaite avant tout «bien développer correctement ce que j'ai lancé, avant de partir dans tous les sens», elle envisage déjà pour septembre d'ouvrir un parc canin quelques heures par semaines : «Ce sera un terrain clôturé accessible aux propriétaires de chiens -sociables bien sûr - qui pourront y lâcher leur bête, avec un petit parcours d'agility à disposition, des petites piscines et des jouets. Les chiens pourront se sociabiliser et les propriétaires rencontrer de nouvelles personnes autour d'un café ou d'un jus de fruit.»

En attendant, cette reconversion lui a déjà permis de retrouver sa passion première : «J'ai toujours aimé les animaux et j'avais trouvé le milieu agricole pour pouvoir avoir un boulot avec les animaux.» Une passion désormais épanouie dans un cadre différent, «et avec en plus l'instauration d'une relation client, la possibilité de voir du monde.»

Le critère numéro un pour entrer dans la pension : la sociabilité, notamment avec les chats.
Le critère numéro un pour entrer dans la pension : la sociabilité, notamment avec les chats. - © CJ
Outre les chiens et les chats, Claire Juquel accueille aussi les lapins ou encore les cochons d'Inde.
Outre les chiens et les chats, Claire Juquel accueille aussi les lapins ou encore les cochons d'Inde. - © CJ

Réagissez à cet article

Attention, vous devez être connecté en tant que
membre du site pour saisir un commentaire.

Connectez-vous Créez un compte ou

Les opinions emises par les internautes n'engagent que leurs auteurs. L'Oise Agricole se reserve le droit de suspendre ou d'interrompre la diffusion de tout commentaire dont le contenu serait susceptible de porter atteinte aux tiers ou d'enfreindre les lois et reglements en vigueur, et decline toute responsabilite quant aux opinions emises,