L'Oise Agricole 09 juin 2022 a 08h00 | Par Alison Pelotier

Egalim 1 et 2 : un long chemin vers une juste rémunération

L'enjeu d'une rémunération plus équitable aura traversé le quinquennat d'Emmanuel Macron avec les lois Egalim 1 et 2 impliquant le vote des députés à l'Assemblée nationale. Décryptage avec l'agroéconomiste Jean-Marie Séronie.

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Les principales mesures mises en place et «cette idée de casser la guerre des prix sans trop le faire peser sur le consommateur» ont rapidement montré leurs limites.
Les principales mesures mises en place et «cette idée de casser la guerre des prix sans trop le faire peser sur le consommateur» ont rapidement montré leurs limites. - © Virginie Pinson - Réussir

Adoptée le 2 octobre 2018, la loi Egalim 1, portée par son rappor-teur Jean-Baptiste Moreau, député (LREM) creusois, a quelque peu jeté de la poudre aux yeux des agriculteurs. Une loi aux apparences flatteuses mais trompeuses, du moins dans ses résultats. Son point de départ remonte à la campagne de l'élection présidentielle où Emmanuel Macron a annoncé la mise en place des États généraux de l'alimentation, lancés le 20 juillet 2017, deux mois après son élection. Deux questions majeures émergent : l'environnement et la séparation de la vente et du conseil de pro-duits phytosanitaires.

Egalim 1, la symbolique

Alors qu'elle se veut avant-gardiste sur la question de la prise en compte des coûts de production et du prix payé aux producteurs, cette première loi Egalim ne donne pas les résultats escomptés et ne permet pas de revaloriser les revenus agricoles. «Le gouvernement se rendait bien compte depuis quelques années que la consommation commençait à stagner, que la guerre des prix pratiquée par la grande distribution détruisait de la valeur», recontextualise Jean-Marie Séro-nie, agroéconomiste. «Il était urgent d'agir, mais la symbolique l'a emporté sur l'efficacité.» Les principales mesures mises en place (relèvement du seuil de revente à perte, encadrement des promotions, indicateurs des coûts de production) et «cette idée de casser la guerre des prix sans trop le faire peser sur le consommateur» ont rapidement montré leurs limites. Cette loi, considérée trop «incitative» et pas assez «coercitive» par bon nombre de producteurs, aura quand même eu quelques répercussions, notamment sur la filière lait, et le mérite de désamorcer la question primordiale de la rémunération des agriculteurs. Il n'en reste pas moins qu'en matière de construction des prix, elle reste inachevée en l'état.

Egalim 2, la bascule

Étant donné les enjeux économiques et sociétaux que cette loi représente, trois ans plus tard, c'est au tour d'Egalim 2 de «durcir» le ton. Début 2020, missionné par Julien Denormandie, ministre de l'Agriculture, et Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée à l'Industrie, Serge Papin, ancien patron de Système U, rend son rapport. Il énonce neuf préconisations dont celle qui fera couler beaucoup d'encre : la non-négociabilité des matières premières agricoles entre le premier transporteur et le producteur sur la base d'un indicateur référent. Un dispositif qui ne pourra se faire, d'après lui, que dans le cadre d'accords pluriannuels sur trois ans, voire six, si des investissements lourds sont nécessaires. Portée par Grégory Besson-Moreau, député (LREM) de l'Aube à la vision «moins terrain» et «plus techno» que l'agriculteur Jean-Baptiste Moreau, Egalim 2 devra prendre en compte les variations de prix, à la hausse comme à la baisse, des intrants dans la production agricole. Adoptée le 14 octobre 2021 pour un début d'application en janvier 2022, Egalim 2 a évolué pendant les premiers mois de l'année dans un contexte d'inflation alimentaire. Même si les prix baissent, aucune diminution des charges n'est constatée dans l'immédiat. Morale de ces cinq années de législation agricole : la théorie du «ruissellement» qui fixe le prix à partir du distributeur ne semble pas être la bonne solution. La construction du prix par la «marche en avant» reste le leitmotiv des professionnels. Si les prix augmentent trop, le juge final arbitrera en caisse, en ache-tant des produits moins chers. La vérité sortira du portefeuille du consommateur.

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