Pour le lait bio, la bérézina se poursuit
La consommation de lait bio a baissé de 23 % par rapport à 2019. La collecte de lait diminue bien plus modérément (- 3,8 % sur un an). Aussi, 40 % du lait livré est déclassé. Les 60 MEUR d'aides d'urgence à la trésorerie promis par le gouvernement sont insuffisants.
Aucun signe d'amélioration de la consommation de produits lai-tiers bio en vue. Selon l'Institut de l'élevage, les ventes de fromages bio ont diminué de 19 % au cours des huit premiers mois de l'année et celles de lait ultra-frais de 10 %. Il semble que les consommateurs se soient reportés sur les produits laitiers conventionnels. Depuis le début de l'année, leurs achats n'ont baissé que de 1 % à 3 % par rapport à l'an passé. Depuis 2019, la consommation de lait bio a reculé de 23 %. Mais au cours des huit premiers mois de l'année, la collecte de lait bio n'a diminué que de 3,2 % sur un an. La contraction est plus forte dans les Pays de la Loire (- 4,8 %) et en Bretagne (- 3,9 %) qu'en Bourgogne Franche Comté (- 0,9 %). Davantage de lait a été collecté en Normandie (+ 2,3 %). «La baisse de la collecte s'explique par la piètre qualité des fourrages récoltés dans l'ouest de la France et par le nombre de livreurs de lait bio en repli de 3,8 % en un an», souligne Yves Sauvaget, éleveur à Saint Ovin (Manche) et président de la commission bio au Centre national interprofessionnel de l'économie laitière (Cniel). «Comme la consommation de lait bio a baissé de 23 % depuis 2019, 40 % du lait bio est déclassé», déplore l'éleveur. Les prix de la viande bovine bio sont alignés sur les cours de la viande conventionnelle. Dans ces conditions, le prix du lait bio payé aux éleveurs est artificielle-ment soutenu. «En août 2023, le prix standard 38/32 des 1 000 litres a franchi les 511 EUR. Il a augmenté de 15 EUR en un an», rapporte l'Idele.
Une aide d'urgence à la trésorerie largement insuffisante
Au mois d'avril dernier, le gouvernement a promis une aide d'urgence à la trésorerie de 60 millions d'euros (MEUR). Mais son montant est très insuffisant. Le montant des aides de l'ensemble des dossiers éligibles portent d'ores et déjà sur 100 MEUR. «Le plafond est donc dépassé de 66 %», avertit Yves Sauvaget. «Retenir comme critère une diminution de 50 % du revenu fiscal (exercice clos en 2022-2023) aurait été bien plus pertinent», soutient-il. De nombreux producteurs sont exclus du dispositif car ils ne remplissent pas les critères requis (baisses de 20 % de l'excédent brut d'exploitation par rapport à 2018-2019 et de la trésorerie de 20 %), pour bénéficier eux aussi d'une aide à la trésorerie. Or, ils sont pourtant en grande difficulté, eux aussi.
Cette année, les éleveurs bio sont aussi pénalisés par une baisse de 12 EUR/ha du montant des aides éco-régimes et par des MAE herba-gères très sélectives. «Les agriculteurs sont prêts à faire des efforts pour s'inscrire dans la transition écologique, mais les budgets alloués sont largement insuffisants», déplore Yves Sauvaget. En fait, les aides Pac ne suffisent pas pour financer la transition écologique de l'agriculture. «Les aménités positives de l'agriculture bio doivent être financées autrement si l'objectif de convertir 18 % de SAU est toujours d'actualité, défend l'agriculteur. S'en remettre aux seuls consommateurs prêts à payer plus chers des produits bio pour com-penser le manque de fonds publics ne suffira pas.»
L'Allemagne fait bande à part
Malgré le repli important du prix du lait bio payé aux producteurs allemands (423 EUR/1 000 l ; - 134 EUR sur un an au mois d'août dernier), ces derniers produisent toujours plus de lait. «En cumul jusqu'à fin août 2023, la collecte a progressé de + 6,5 % par rap-port à l'an dernier», rapporte l'Idele. Depuis le début de l'été, les consommateurs allemands achètent davantage bio. Les baisses de prix de vente des produits laitiers ravivent leur intérêt pour cette catégorie de produits laitiers. Dans les autres pays, la filière bio est sur le déclin. En Suède, la collecte a baissé de 19 %.
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