Prairies permanentes : pas de changement des règles !
Le ratio de retournement des prairies permanentes a été publié. Il est en légère baisse dans la région des Hauts-de-France. Pas de contrainte plus forte, mais pas encore d’allègement.

L’État fait du maintien des prairies permanentes un enjeu important pour l’agriculture, tant en termes économiques que sanitaires et environnementaux. C’est ainsi que ce maintien des prairies permanentes est l’un des trois critères en faveur de l’environnement permettant aux agriculteurs de bénéficier du paiement vert de la Pac. Calculé chaque année à l’échelle régionale, un ratio permet de constater l’évolution de la part de surfaces en prairies permanentes par rapport à la surface agricole totale entre l’année de référence (2012) et l’année en cours.
Un ratio de 4,2 % en 2018
Alors qu’en 2015, année de mise en place des nouveaux modes de déclaration de la Pac, ce ratio n’avait pas été calculable, et après le bras de fer entre les FDSEA/FRSEA et l’État sur le ratio 2016 (l’État finissant pas recalculer un taux de 4,09 % alors que dans un premier temps, il l’avait annoncé à près de 7 %), la région avait vu ce ratio se dégrader légèrement en 2017, à 4,68 %. Pour 2018, l’attente aura été longue, mais le ratio a été rendu public la semaine dernière, à hauteur de 4,2 %. L’évolution de ce chiffre permet de s’éloigner de la barre des 5 % qui, lorsqu’elle est franchie, aboutit à une interdiction totale de retournement, et contraint à des remises en herbe de parcelles retournées. Pour autant, cette évolution ne permet pas de sortir du régime d’autorisation : en effet, avec une dégradation comprise entre 2,5 % et 5 %, tout retournement de prairies permanentes doit faire l’objet d’une autorisation, pour des cas bien précis.
Demandes limitées pour les nouveaux retournements
Ces autorisations sont à demander par l’intermédiaire d’un formulaire qui sera mis à disposition prochainement via l’application TéléPac. La surface qui pourra être effectivement retournée a été fixée à 450 hectares au maximum pour la région Hauts-de-France. Déplacer une prairie permanente - c’est-à-dire la retourner en implantant ailleurs sur la même exploitation une surface équivalente (avec engagement de la maintenir 5 ans au moins) - reste possible, mais doit aussi faire l’objet d’une demande d’autorisation. La demande d’autorisation est instruite par la DDT-M. Une telle autorisation ne peut être accordée que pour certains cas bien précis, fixés par un arrêté national : les agriculteurs reconnus en difficulté (Agridiff avec plan de redressement arrêté), les éleveurs ayant plus de 75 % de prairies permanentes sur leur exploitation et souhaitant en retourner une partie pour gagner en autonomie fourragère (sans toutefois passer en dessous des 75 %) et les nouveaux installés et jeunes agriculteurs (dans la limite maximum de 25 % des prairies présentes sur l’exploitation au moment de leur installation). Au-delà des situations d’agriculteurs en difficulté, seul un nombre très limité de demandes pourront donc être autorisées.
Une autorisation également environnementale
Par ailleurs, la gestion des prairies est également très encadrée au titre de la réglementation environnementale, notamment dans le cadre du nouveau programme d’actions régional pris en application de la directive nitrates, en vigueur depuis le 1er septembre 2018 : le retournement des prairies permanentes est interdit en zones humides, dans les périmètres protégeant les captages au titre de la santé publique, dans les aires d’alimentation de captage et sur les sols dont la pente est supérieure à 7%.). Une demande de retournement pourra être refusée si les impacts environnementaux sont trop importants. Les déclarations Pac 2019 feront ressortir les retournements non autorisés préalablement, et les agriculteurs concernés seront exposés aux contrôles et sanctions éventuelles notamment sur le paiement vert.

Charlotte Vassant, membre du bureau FRSEA Hauts-de-France
«Une entrave à la liberté d’entreprendre»
Le ratio prairie permanente est paru et pour les Hauts-de-France, il s’établit à 4,2 %. La région reste en régime d’autorisation, ce qui permet de ne pas figer le déplacement de prairie (1 ha pour 1 ha) et pour certains cas bien précis, le retournement est soumis à autorisation de la DDT. Même si nous sommes parvenus à maintenir ce régime d’autorisation, nous ne pouvons nous satisfaire de cette réglementation qui est une entrave aux projets et à la liberté d’entreprendre. La méthode de calcul du ratio est pénalisante pour l’agriculture. L’urbanisation, qui se fait à 65 % sur les prairies permanentes, n’est pas prise en compte. Chaque année, ce sont plus de 5.000 ha de SAU qui sont urbanisés. À titre de comparaison, l’arrêté préfectoral autorise pour cette année 450 ha de retournement de prairies pour les agriculteurs entrant dans les critères réglementaires. Cela semble disproportionné au regard des pertes générées par l’urbanisation. Une preuve, s’il en fallait une, que les pratiques agricoles ne sont pas les seules responsables de la dégradation de la surface en prairies.
Par ailleurs, notre région compte naturellement une part assez faible de prairies permanentes, de par les systèmes culturaux tournés vers la grande culture, mais aussi vers l’utilisation de prairies temporaires et de fourrages annuels, non comptabilisés dans le ratio, malgré leur effet positif sur la biodiversité et leur rôle de piège à carbone, au même titre que les prairies permanentes. C’est pour lisser cette différence d’utilisation des prairies que la FRSEA a porté au national une demande de calcul du ratio au niveau national et non au niveau régional. Cette demande a été entendue par les autres régions et la FNSEA l’a portée auprès du ministre de l’Agriculture qui doit la transmettre à l’Europe.
Nous travaillons pour que cette notion de ratio prairies soit supprimée dans la prochaine réforme de la Pac et que l’impact positif des prairies soit reconnu et non sanctionné. Nous poussons également pour que la culture de l’herbe, à travers des prairies temporaires intégrées à des cycles de production de 6/7 ans, soit reconnue. À travers ces revendications techniques, c’est la reconnaissance des réalités agronomiques que nous portons, c’est la liberté d’entreprendre de manière responsable, que nous défendons.
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