Renard et corvidés : le gouvernement reconnaît leur nuisibilité
Au grand dam des associations de défense des animaux, le gouvernement a reconduit de manière quasi-identique la liste des espèces susceptibles d’occasionner des dégâts (ESOD) pour la période 2023-2026.

Comme l’on pouvait s’y attendre, les opposants à la chasse et à toutes les activités périphériques s’en sont donné à cœur joie pour dénoncer la régulation d’espèces susceptibles de causer des dégâts, et la liste des espèces. Entre le 15 juin et le 6 juillet, ce ne sont pas moins de 49 351 contributions qui ont été enregistrées sur la plate-forme dédiée à la consultation publique ; dont une majorité de messages d’opposition, et ce malgré les éléments de langage du ministère de la Transition écologique qui expliquait que «ce classement n’a pas pour but d’éradiquer les espèces concernées, mais bien de les réguler afin de limiter les perturbations et les dégâts qu’elles peuvent provoquer notamment sur la faune, la flore, les activités agricoles ou les propriétés privées». Le précédent arrêté triennal du 3 juillet 2019 établissant la liste des Esod du groupe 2 dans chaque département ayant été prolongé d’un an par le décret n° 2022-919 du 21 juin 2022 en raison du manque de données liés à la pandémie Covid-19, son renouvellement était donc une nécessité en 2023. Après plusieurs semaines d’attente, le ministère de la Transition écologique a finalement pris l’arrêté fixant la liste des ESOD le vendredi 4 août. Sans cette liste, toute activité de régulation était jusqu’à il y a quelques jours suspendue. Selon le nouveau texte paru au Journal officiel, les espèces classées ESOD peuvent être «piégés toute l’année», «détruits à tir» et pour certains «déterrés».
Le putois exclu de liste des ESOD
Dans l’Oise, le renard et le corbeau freux comme la corneille noire, la pie bavarde et l’étourneau sansonnet restent considérées comme des Esod sur l’ensemble du département. Dans le département voisin du Pas-de-Calais, ces espèces le sont également. En revanche, le putois qui y figurait jusqu’à présent, en exclu de la liste, malgré les arguments présentés par la Fédération départementale des chasseurs. Alors qu’il ne devait s’agir que d’une formalité, la décision prise par le ministère de la Transition écologique apparait comme étant incompréhensible, compte tenu des preuves de la nuisibilité du mustélidé apportées : «Malgré un dossier bien étayé, le ministère n’a pas retenu le classement du putois», regrette ainsi la FDC 62. Comme le stipulait le ministère de la Transition écologique dans sa présentation de projet d’arrêté, «il est nécessaire d’avoir 10.000 € de dégâts et au moins 500 prélèvements par an. Or, la fédération des chasseurs du Pas-de-Calais a justifié de 17.204 € de dégâts et d’en moyenne 1.512 prises de putois par an». Pour comprendre pourquoi le putois est désormais exclu de la liste des ESOD, il faut se remémorer une décision du Conseil d’État datant de 2021 mentionnant que l’état de conservation de l’espèce est «défavorable». Quelques temps avant d’être remplacée dans sa fonction de secrétaire d’État à la Biodiversité par Sarah El Haïry, Bérengère Couillard avait également donné le ton en déclarant ne pas être favorable à ce que l’on puisse «chasser le putois toute l’année».
Des réactions opposées
«Le dossier des nuisibles est délicat, puisqu’il prive la France d’une liste ESOD depuis maintenant plus d’un mois. C’est inacceptable !», commentait le mardi 1er août le président de la Fédération des chasseurs du Pas-de-Calais et de la Fédération nationale des chasseurs, Willy Schraen. En effet, alors que l’arrêté instaurant une nouvelle liste d’espèces susceptibles d’occasionner des dégâts était attendu pour le début du mois de juillet, cette liste n’a finalement été établie que le 4 août, soit un mois plus tard. Pour Willy Schraen, qui dénonce la méthode, il y avait fort à craindre que la consultation publique qui s’est déroulée entre le 15 juin et le 6 juillet ne soit qu’un prétexte pour servir les intérêts du camp adverse, malgré le travail réalisé et les discussions lors d’une réunion de la Commission nationale de la chasse et de la faune sauvage (CNCFS) qui s’était tenue début juin. Toujours selon le président des chasseurs de France, «ce qui est certain, c’est que le sujet ESOD fera le bonheur des avocats des deux camps...» Le président des chasseurs de France ne s’est finalement pas trompé puisque sitôt la liste des espèces nuisibles connues, plusieurs associations de défense des animaux, dont la LPO ont annoncé leur intention de la contester devant les tribunaux. Du côté du gouvernement, la nouvelle secrétaire d’État à la Biodiversité tente de déminer le dossier. Dans une déclaration à l’AFP, le cabinet de Sarah El Hairy a expliqué «vouloir engager une réflexion pour rendre le cadre (des ESOD) plus lisible et efficace conformément aux attentes des acteurs». Dans cette optique, une mission de l’inspection générale du ministère (IGEDD) pourrait être prochainement mise en place afin d’«identifier comment font les autres (pays) et pouvoir comparer et alimenter la réflexion collective».
La LPO annonce un recours contre le nouvel arrêté
Le 4 août, la LPO a annoncé qu’elle «dépose un recours juridique» à la suite de la parution de l’arrêté fixant la liste des espèces susceptibles d’occasionner des dégâts (Esod) au Journal officiel. Le texte est en tous points conforme à la version mise en consultation publique entre le 15 juin et le 6 juillet, et ce alors que plus de 70 % des avis exprimés étaient défavorables au projet de texte, regrette l’association de protection de l’environnement. L’arrêté renouvelle, pour une période de trois ans, la liste de neuf espèces d’animaux classées Esod de groupe 2 (espèces indigènes) : la belette, la fouine, la martre, le renard, le corbeau freux, la corneille noire, la pie bavarde, le geai des chênes et l’étourneau sansonnet. Il fixe les périodes et modalités de destruction. Il précise quels territoires sont concernés dans chaque département. En désaccord de longue date avec la méthode utilisée pour établir la liste des Esod, la LPO estime aussi que «l’efficacité de leur destruction n’est pas démontrée». Elle suggère de «suspendre» la destruction des neuf espèces «afin d’étudier l’impact de l’absence de régulation sur les dégâts constatés» d’ici l’aboutissement de travaux prévus dans le cadre de la Stratégie nationale biodiversité.
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