L'Oise Agricole 25 mai 2023 a 09h00 | Par Vincent Fermon

De nouvelles règles pour profiter des pulpes produites par les usines Tereos

Président de la commission «nutrition animale» de la coopérative Tereos, Émilien Rose revient sur les règles de commercialisation des pulpes betteraves qui vont s'appliquer lors de la prochaine campagne, dont la priorisation des volumes aux adhérents, qu'ils soient éleveurs ou méthaniseurs.

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De l'agriculteur coopérateur à l'éleveur non coopérateur en passant par la société de négoce et l'agriculteur méthaniseur, tous sont touchés par la nouvelle politique de commercialisation des pulpes par la groupe sucrier Tereos.
De l'agriculteur coopérateur à l'éleveur non coopérateur en passant par la société de négoce et l'agriculteur méthaniseur, tous sont touchés par la nouvelle politique de commercialisation des pulpes par la groupe sucrier Tereos. - © Jean-Charles Gutner

C'est désormais une quasi-certitude, il n'y en aura pas pour tout le monde. Compte tenu de la diminution des surfaces de betteraves dans le périmètre de la coopérative Tereos, de la baisse des engagements coopératifs et des incertitudes sur le rendement betteravier, la pulpe de betteraves devient une denrée rare. C'est dans ce contexte que Tereos a adressé il y a quelques semaines à ses adhérents une circulaire détaillant de nouvelles conditions de fournitures de pulpes à tous ceux que le coproduit intéresse. Le sujet restant «sensible», et faisant l'objet de nombreux commentaires, le président de la commission «nutrition animale», Émilien Rose, en a reprécisé les contours mi-mai.

Moins de betteraves, moins de pulpes

En ce qui concerne les volumes, à l'heure où près de 100 % des semis de betteraves sont réalisés dans la région et suite au renouvellement des engagements coopératifs, Tereos devrait accuser une baisse de 10% de surfaces en 2023 par rapport à la précédente campagne. Pour le représentant de Tereos, «si on perd 10 % de surfaces de betteraves, à rendement constant, on perd aussi 10 % de volumes de pulpes...» ; ce qui crée inévitablement des tensions sur la disponibilité de ce coproduit prisé. «L'an dernier, explique Émilien Rose, nous n'avions déjà pas été en mesure de livrer la totalité des commandes de pulpes à nos coopérateurs.» Pour la prochaine campagne, l'histoire étant amenée à se répéter, des «arbitrages» ont été réalisés par le conseil coopératif. Objectif ? «Essayer de satisfaire le plus grand nombre».

Diminution des volumes disponibles...

Les premiers à pâtir de ces «arbitrages» sont sans conteste les éleveurs «clients» de Tereos, autrement dit, non-coopérateurs. Courant mars, ces derniers ont en effet appris que les volumes qui leurs étaient jusqu'à présent ouverts vont diminuer progressivement, avant un arrêt définitif d'approvisionnement à l'horizon 2025. Pour ce profil d'éleveurs, deux cas de figure se présentent. Pour les clients de Tereos situés à moins de 50 kilomètres d'une usine du groupe, une proposition d'adhésion à la coopérative leur a été adressée, ouvrant dans le même temps la possibilité de profiter de 50 % du volume commandé pour la campagne 2023-2024. Pour les éleveurs clients situés à plus de 50 kilomètres d'une usine Tereos, la coopérative s'engage à leur fournir 2/3 des volumes commandés pour la campagne 2023-2024, puis un tiers des volumes commandés pour la campagne 2024-2025 et enfin «zéro tonne» pour la campagne 2025-2026.

... et logique coopérative

«Si nous avons fait ce choix vis-à-vis de nos clients non-coopérateurs, explique Émilien Rose, c'est parce que nous sommes face à une diminution des volumes de pulpes et que la logique coopérative veut que les adhérents de la coopérative soient prioritaires. Nous n'avons pas voulu toutefois arrêter les livraisons de pulpes à nos clients de manière brutale pour leur laisser le temps de s'adapter.» Et de trouver des alternatives. Pour le président de la commission nutrition animale de Tereos, lui-même éleveur, «ce n'est pas facile, mais nos décisions sont d'abord prises dans l'intérêt des coopérateurs». Ces coopérateurs, pour autant, ne sont pas non plus épargnés. En effet, si Tereos s'engage à fournir à ses adhérents jusqu'à trois fois le volume constitué par le droit à restitution associé à l'engagement coopératif (palier 2), l'attribution de volumes supplémentaires n'est pas garantie (palier 3), et dépendra du rendement betteravier de l'année en cours. Dans l'hypothèse où des volumes seraient disponibles, le volume pour chaque adhérent ne pourrait dans tous les cas pas excéder 4 fois le droit à restitution. Outre l'absence de garantie sur la disponibilité des volumes, la nouvelle méthode de calcul doit permettre d'amener de l'équité entre coopérateurs, et pourquoi pas mettre un terme à certains abus. Selon Émilien Rose, «le souci est d'abord pour ceux dont la production de betteraves et la commande de pulpes est décolérée». Autrement dit, il s'agit pour Tereos de faire la chasse à ces quelques agriculteurs qui auraient volontairement réduit leur engagement coopératif en imaginant garder un accès à la pulpe identique. Dans le viseur également, des agriculteurs tentés par la spéculation... même si la pratique est interdite par un accord interprofessionnel. Enfin, Émilien Rose dit en revanche «comprendre» des éleveurs qui cherchent à sécuriser leur bilan fourrager par la pulpe surpressée, «mais on ne peut pas faire de miracle quand les volumes ne sont pas là.»

Entre éleveurs et méthaniseurs, pas de concurrence

Entre coopérateurs éleveurs et méthaniseurs, Émilien Rose assure ne pas vouloir faire de différence. «Les adhérents de la coopérative qui ont une activité de méthanisation sont des coopérateurs comme les autres, avec les mêmes droits.» Tableaux de chiffres à l'appui et graphiques à l'appui, il constate bien au cours des dernières années que le volume de pulpes surpressées valorisées dans des unités de méthanisation a progressé. De «15 000 tonnes en 2018», ce volume est en effet passé à «550 000 tonnes en 2022». Néanmoins, assure M. Rose, «ces volumes n'ont pas été pris sur les volumes disponibles pour les éleveurs, mais sur des volumes que l'on aurait pu déshydrater». La conséquence pour l'activité «déshydratation», c'est une baisse des volumes transformés, avec des unités de déshydratation dont l'activité a été réduite depuis trois ans «au minimum technique».

Une part vendue aux tiers en diminution

En termes de débouchés, Tereos confirme écouler une partie du volume de pulpes produites dans ses usines auprès d'entreprises de négoce d'aliments du bétail. Mais Émilien Rose tempère : «On a considérablement réduit notre volet d'affaires avec ce type de clients au cours des dernières années. Aujourd'hui, cela représente entre 80 000 et 100 000 tonnes contre un volume de 200 000 à 250 000 tonnes livrées lors de la campagne 2018-2019.» La question d'abandonner complètement ce marché n'est pas à l'ordre du jour pour Tereos, «parce que c'est utile et bienvenu à certaines périodes de l'année ? Cela reste un débouché utile quand il y a des volumes à extraire des cours des usines, constate M. Rose. Il s'agit de ventes d'opportunité».

L'intérêt de la déshydratation

De la même manière, pas question non plus de maintenir à un palier faible le volumes de pulpes à déshydrater : «Nous avons investi dans la modernisation de certaines unités de déshydratation pour les rendre plus performantes. Ce sont des outils qu'il faut faire fonctionner. Le jour où l'on décide d'arrêter un outil de déshydratation, c'est tout le fonctionnement d'une usine qu'il faut revoir», explique le responsable de la commission nutrition animale qui insiste sur l'intérêt économique de produire des pulpes déshydratées : «La pulpe déshydratée participe de manière non négligeable à la rémunération de la betterave aux planteurs. Si on décide d'en faire moins, cela libérera des volumes de pulpes surpressées, mais il y aura des conséquences et on risque de se priver d'une valorisation supérieure...» Encore une affaire d'équilibre.

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