L'Oise Agricole 08 avril 2023 a 14h00 | Par Gaetane Trichet

Winterberg, le tunnel de la mort

Suite à la découverte du tunnel de Winterberg où plus de 250 soldats allemands ont été ensevelis durant la première guerre mondiale, la Caverne du Dragon présente jusqu'au 23 avril, une exposition sur cette tragédie.

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- © Conseil départemental de l'Aisne

En 2021, «des fouilles illégales en forêt domaniale de Vauclair, condamnées par les autorités françaises et allemandes» selon un communiqué de presse de la préfecture de l'Aisne daté du 10 février, ont permis de trouver l'entrée du Tunnel de Winterberg où des soldats allemands ont trouvé la mort en 1917. Des prospections ont été menées en avril de la même année par le Volksbund Deutsche Kriegsgräberfürsorge (VDK), en accord et avec le concours des autorités françaises. Ces recherches ont également permis la découverte de rails et de plusieurs vestiges de la Première guerre mondiale (cloche, uniforme, casque et galon du 111e RI de réserve), permettant ainsi de confirmer la localisation du Tunnel de Winterberg.

Une coopération franco-allemande

Mais que s'est-il passé ce 4 mai 1917 ? La guerre bat son plein dans la forêt de Craonne dans l'Aisne. Alors qu'une salve de tirs d'artillerie française s'abat, des soldats allemands se réfugient dans un tunnel qui s'éboule, les condamnant quasiment tous à jamais. C'est le début d'une longue agonie pour ses «enterrés viviants». Certains sont morts asphyxiés, d'autres supplient leurs camarades de les abattre avec leurs armes pour soulager leurs souffrances.

Ce tunnel a été découvert il y a deux ans à la suite de recherches par deux Laonnois. En 2022, des échanges avaient été organisés à Craonne en présence de Thomas Campeaux, préfet de l'Aisne, de Dirk Backen, secrétaire général du VDK, d'historiens français et allemands et de personnalités locales en avril 2022. «De nouvelles prospections réalisées du 2 au 5 mai 2022, résultat d'une intense coopération franco-allemande, ont permis de confirmer la localisation d'une cavité, d'y introduire une caméra puis de visualiser la forme d'un tunnel. Les mauvaises conditions de visibilité (humidité et particules poussiéreuses en suspension) n'ont alors pas permis d'obtenir des images précises de l'intérieur du tunnel. Les difficultés techniques rencontrées lors des différentes phases de prospection ont cependant permis de confirmer l'impossibilité de pénétrer sans la mise en oeuvre de moyens très lourds dans ce tunnel profondément enfoui, garantissant ainsi le respect dû aux corps des soldats qui y sont morts» peut-on lire dans le communiqué de la préfecture.

Une exposition jusqu'au 23 avril

Située sur le Chemin des Dames, en-dessous des premières lignes du front, la Caverne du Dragon est une carrière de pierre exploitée du 16ème au 19ème siècle. Durant la guerre, elle servait d'abris aux soldats français ou allemands qui eux, l'avaient aménagée dès 1915, avec un réseau électrique et des postes de tirs et de secours. Les Français la reprennent en juin 1917, mais n'en reste pas longtemps les seuls occupants. Séparés à l'intérieur par des murs, les deux camps y ont parfois cohabité.

Un centre d'accueil du Visiteur du Chemin des Dames a été construit près de la Caverne pour présenter les vestiges de la guerre sur le Chemin des Dames et arpenter les galeries témoins du passage des soldats. Le Conseil départemental de l'Aisne a dédié à côté, un espace muséographique consacré à la Première Guerre mondiale. A la suite de la découverte du Tunnel de Winterberg, une exposition est présente jusqu'au 23 avril intitulée Après la découverte «La mort dans le Tunnel de Winterberg, une tragédie de la Première Guerre mondiale» fait remonter les visiteurs 107 ans en arrière et leur fait découvrir la vie et la mort sur les champs de bataille.

Pas d'exhumation mais une sépulture

Les fouilles opérées à la suite de recherches historiques sur la base de données militaires par trois hommes, étaient illégales. Elles ont cependant fait ressurgir une histoire vieille de 106 ans dont on peut difficilement imaginer l'enfer qu'ont vécu ces soldats allemands à l'intérieur du tunnel. D'après les dernières prospections et compte-tenu des contraintes techniques et géologiques rencontrées, une nouvelle réunion avait eu lieu le mardi 24 janvier 2023 en préfecture de l'Aisne présidée par Thomas Campeaux en présence de Thierry Laurent, directeur de cabinet de la Secrétaire d'État auprès du ministre des Armées, chargée des Anciens Combattants et de la Mémoire, M. Dirk Backen, secrétaire général du VDK et plusieurs représentants des services de l'État et des collectivités territoriales. «À cette occasion, les autorités allemandes ont confirmé avoir pris la décision de ne pas chercher à procéder à l'exhumation des corps et exprimé leur souhait d'en faire un lieu de mémoire en hommage aux soldats victimes, qui pourra être matérialisé par une stèle et des aménagements dédiés. Le VDK, à qui incombe la mise en oeuvre du projet, introduira en ce sens auprès du ministère des Armées une demande de classement du site en nécropole de guerre allemande» explique le communiqué de la préfecture de l'Aisne. Le pilotage du projet est localement confié au préfet de l'Aisne, en lien avec l'ensemble des acteurs locaux intéressés. L'aboutissement de la procédure permettra de confier la gestion du site au VDK, à l'instar des autres terrains utilisés comme nécropoles de guerre allemandes en France.

Les résultats de cette démarche mémorielle ont été présentés ce jour lors d'une conférence de presse conjointe, à l'occasion de l'inauguration de l'exposition au cours de laquelle ont été présentées les prochaines étapes de cet important projet franco-allemand. Ce lieu de sépulture dite «de catastrophe» peut donc demeurer le lieu de sépulture perpétuelle des soldats allemands qui y sont ensevelis.

Plus d'infos

- Centre d'accueil du visiteur

- Chemin des Dames - Caverne du Dragon (Drachenhöhle), RD 18 CD, 02 Oulches-la-Vallée-Foulon

- Jusqu'au 26 avril

- Entrée libre de 10 h à 18 h

- Renseignements : 03 23 24 14 18 ou www.chemindesdames.fr

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