L'Oise Agricole 10 février 2022 a 08h00 | Par Dominique Lapeyre-Cavé

«Mieux payer la betterave pour garder les surfaces»

Suite à la parution de l'arrêté autorisant provisoirement l'emploi de semences de betteraves sucrières traitées avec des néonicotinoïdes (NNI) et précisant les cultures qui peuvent être semées, plantées ou replantées au titre des campagnes suivantes, il paraissait important de faire le point avec Alexis Hache, président de la CGB (Confédération générale des betteraviers) de l'Oise.

Abonnez-vous Reagir Imprimer
Alexis Hache martèle qu'un prix rémunérateur est de nature à convaincre les planteurs de continuer.
Alexis Hache martèle qu'un prix rémunérateur est de nature à convaincre les planteurs de continuer. - © DLC

Quelle a été votre première réaction à la sortie de l'arrêté ?

Alexis Hache : Même s'il était attendu, j'ai d'abord été soulagé car c'est une année de plus pour la betterave, même si nous restons dans l'incertitude à court et moyen terme. À ce jour, il n'y a toujours pas de visibilité pour les planteurs qui n'investissent plus dans le matériel. Et puis cet arrêté marque une déception pour les successions culturales pour lesquelles nos demandes n'ont pas été totalement prises en compte.

Pouvez-vous préciser ?

A.H. : Parmi les cultures les plus plausibles dans notre région, en N + 1 derrière betteraves traitées NNI, ne pourront être semés que de l'avoine, du chou, des cultures fourragères ou légumières non attractives, c'est-à-dire sans fleurs, de l'orge, du seigle, du soja, du haricot ou des betteraves sucrières non traitées NNI. Comme si on semait deux années de suite des betteraves ! Nous avions plaidé pour une dérogation pour le maïs, mais nous n'avons pas été entendus. Pire, ceux qui pensaient semer du maïs en 2022 derrière leurs betteraves 2021 ne pourront pas le faire non plus. En N + 2, le colza n'est toujours pas accepté. Seuls le chanvre, le maïs et la pomme de terre pourraient être emblavés. En N + 3, tout est permis.

Par contre, entre N + 1 et N + 2, les couverts ne doivent pas être gardés jusqu'à la floraison, il faudra les broyer avant. Ceci est en totale opposition avec la réglementation Pac qui interdit le broyage des couverts avant le 15 octobre. Voilà une contradiction impossible à gérer pour les planteurs !

En 2024, l'utilisation des néonicotinoïdes sera totalement interdite. Comment résoudre cette impasse technique ?

A.H. : Dans un récent communiqué de presse, le gouvernement s'est montré très optimiste sur des solutions qui pourraient voir le jour d'ici là. À la CGB, nous sommes beaucoup plus mesurés, ces solutions seront sans doute partielles, mais pas totales. D'abord, il y a la génétique, mais il faut du temps et du temps, nous n'en avons pas beaucoup.

Ensuite, on nous parle de plantes compagnes ou de bandes fleuries destinées à attirer les pucerons. Il semble qu'elles aient un effet à petite échelle, mais c'est à grande échelle que les partenaires du Programme national de recherche et innovation (PNRI) vont expérimenter cette modalité.

Des produits de biocontrôle ont aussi été cités mais, sur la vingtaine testée, une seule est efficace en serre. Quid en conditions réelles ? Il n'y aura sans doute pas une solution unique, mais une combinaison de leviers à actionner pour limiter l'impact de la jaunisse. Et surtout, face une baisse de rendement que les planteurs ne manqueront pas de subir, seul le prix pourra compenser.

C'est un appel aux industriels ?

A.H. : Absolument ! Face à l'incertitude réglementaire, aux ré-engagements successifs des planteurs qui entraînent une perte à chaque fois et aux prix des autres cultures plus attractifs, il va falloir convaincre les planteurs de semer, surtout lorsque les arrachages tardifs hypothèquent la culture suivante. Depuis quelques années, les marges de la betterave sont moins bonnes, seul un prix à la hauteur pourra convaincre les planteurs. Nous nous attendons à une baisse des surfaces de 10 % en 2022 dans l'Oise. Autre point positif, le marché du sucre, qui suit celui des matières premières, est à la hausse. Il faut espérer que nos industriels sauront bien vendre et donc mieux rémunérer les planteurs. La loi Égalim 2 doit aussi permettre de prendre en compte la hausse des coûts énergétiques des sucriers.Enfin, la Pac 2023 et l'éco-régime vont obliger à avoir quatre cultures différentes dont 20 % maximum en betteraves sucrières. Voilà qui va peser sur les assolements.

Pour conclure, un mot sur la campagne betteravière qui s'achève et celle qui va commencer ?

A.H. : La récolte est légèrement inférieure à la moyenne des cinq ans. On arrive à 82,5 t/ha à 16 de richesse, forfait collet déduit, avec de meilleurs rendements à l'Ouest du département qu'à l'Est.

Pour ce qui est des semis 2022, la plupart des planteurs ont déjà commandé leurs semences, mais la sortie tardive de l'arrêté peut encore faire pencher la balance. En tout cas, en ce début février, c'est un vrai défi technique et logistique auxquels sont confrontés les semenciers pour enrober et livrer les semences dans les temps.

Pour 2023, nous demanderons à nouveau une dérogation qu'on aimerait obtenir un peu plus tôt dans l'année pour anticiper. Les planteurs dont les engagements sont pluri-annuels auront du mal à arbitrer sur le maintien ou pas des betteraves dans l'assolement face à ce contexte incertain. Il faut les aider en ce sens.

Cotisations CGB 2022

Tereos n'a pas envoyé de mandat CGB par courrier à ses planteurs comme habituellement et peu s'en sont rendu compte. Vous pouvez néanmoins le télécharger sur l'extranet Tereos.

Vous avez jusqu'au 15 février pour adhérer.

Sinon, vous pouvez le faire sur le site www.cgb-france.fr.

Contact : Henri Faes, tél. 06 86 37 66 11.

Réagissez à cet article

Attention, vous devez être connecté en tant que
membre du site pour saisir un commentaire.

Connectez-vous Créez un compte ou

Les opinions emises par les internautes n'engagent que leurs auteurs. L'Oise Agricole se reserve le droit de suspendre ou d'interrompre la diffusion de tout commentaire dont le contenu serait susceptible de porter atteinte aux tiers ou d'enfreindre les lois et reglements en vigueur, et decline toute responsabilite quant aux opinions emises,