Le feuilleton «NNI» se poursuit
Plusieurs députés ont saisi, le mardi 10 novembre, le Conseil constitutionnel pour contester la légalité du projet de loi réautorisant les néonicotinoïdes pour la culture de la betterave. Des sénateurs de plusieurs groupes leur ont emboîté le pas.
Les groupes communistes GDR, LFI, socialistes et EDS à l’Assemblée nationale ont annoncé le 10 novembre avoir saisi le Conseil constitutionnel sur le projet de loi néonicotinoïdes qui, pour eux, enfreint «les exigences constitutionnelles de préservation de l’environnement et de droit à la santé». Ce texte, adopté le 4 novembre par le Parlement, leur semble «contraire à plusieurs principes à valeur constitutionnelle », d’après l’exposé du recours. Il méconnaît, à leurs yeux, un principe de «non-régression» selon lequel la protection de l’environnement «ne peut faire l’objet que d’une amélioration constante», comme indiqué dans la loi biodiversité de 2016. Les députés pointent aussi l’«insuffisance » de l’étude d’impact menée par le gouvernement. «Comment est-ce possible en 2020 qu’une étude d’impact» ne fasse «pas mention de l’effondrement de la biodiversité (…) dont la science dit qu’elle est liée notamment à l’utilisation des néonicotinoïdes ?», a interrogé Delphine Batho (EDS), lors d’une conférence de presse. L’étude d’impact est «incomplète sur le plan des risques de la santé» et elle «méprise les alternatives», relève par ailleurs le socialiste Dominique Potier.
Un mois pour la réponse
Au Sénat, une démarche similaire s’est mise en place, le même jour. D’après nos confrères de Public Sénat, les groupes socialiste (SER), écologiste (EST) communiste (CRCE), ainsi que plusieurs sénateurs du groupe RDSE ont déposé un recours. Celui-ci fait valoir l’incompatibilité du projet de loi avec la Charte de l’environnement, texte à valeur constitutionnelle, qui indique que «toute personne a le devoir de prendre part à la préservation et à l’amélioration de l’environnement» et doit «prévenir les atteintes qu’elle est susceptible de porter à l’environnement ou, à défaut, en limiter les conséquences». Comme les députés, ils s’appuient également sur le principe de non-régression du droit de l’environnement, inscrit dans le Code de l’environnement en 2016. Le Conseil constitutionnel dispose d’un délai maximal d’un mois pour rendre sa décision ; autrement dit, avant le 10 décembre.
Les apiculteurs déposent une contribution extérieure
Dans un tweet du 13 novembre, l’avocat Sébastien Mabile annonce que le Syndicat national apicole (SNA) et l’ONG Terre d’abeille ont adressé une contribution extérieure au Conseil constitutionnel contre la loi sur les néonicotinoïdes, en soutien des recours adressés par les parlementaires. Cette contribution, détaille l’avocat, souligne l’absence de consultation des apiculteurs «pourtant profondément affectés» par cette dérogation. Pour preuve, selon Sébastien Mabile, la loi sur la biodiversité avait interdit ces molécules en 2016 «pour prévenir les risques sur les abeilles». Autre argument avancé par la contribution : «Les apiculteurs se prévalent d’une espérance légitime à ce que ces produits ne soient pas réautorisés» en raison des déclarations successives d’Emmanuel Macron sur le sujet en 2017 et en 2018, confirmées par la suite par le gouvernement. Enfin, dénonce l’avocat, par cette dérogation, «le législateur porte également atteinte au droit de propriété des apiculteurs consacré par les articles 2 et 17 de la Déclaration de 1789» sur les 450 000 hectares concernés, ainsi qu’au droit d’entreprendre de ces producteurs. «La majorité a clairement choisi par ce texte d’assurer la promotion d’intérêts privés au détriment des intérêts supérieurs de la collectivité, et particulièrement de l’apiculture», tranche Sébastien Mabile.
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