Les dirigeants de l’Inrae «pour la sortie des pesticides»
Interpellée par le syndicat Sud qui s’interrogeait une «instrumentalisation» de l’Inrae au sein du Conseil scientifique dédié aux néonicotinoïdes, la direction de l’institut a clarifié son rôle, assumant plus généralement se positionner «pour une sortie des pesticides».
Une nouvelle controverse dans l’épais dossier des néonicotinoïdes. Dans une lettre ouverte envoyée au P.D.G. de l’Inrae Philippe Mauguin le 10 janvier, le syndicat Sud lui a demandé de lever les doutes sur «l’instrumentalisation [de l’institut] par des intérêts qui priment sur la santé des écosystèmes». «La stratégie d’assurance chimique semble avoir primé sur la notion de protection intégrée des cultures», s’indignent les représentants syndicaux dans ce courrier, citant un article paru dans le quotidien Le Monde fin décembre. Les critiques de Sud portent principalement sur deux points. Alors que le représentant de l’Inrae auprès du conseil de surveillance avait évoqué dans la presse des difficultés à comparer les indices de pression entre les deux années, Sud souligne que les réservoirs viraux étaient «notoirement plus faibles» en 2021, avec ou sans prendre en compte le colza. Second reproche : la fiche jointe à la consultation publique et signée par l’Inrae se concentre sur les conséquences économiques de la dérogation, «sans évoquer l’objectif pourtant essentiel de protection de la biodiversité».
L’Inrae positionné «pour une sortie des pesticides»
Dans la réponse envoyée au syndicat Sud le 12 janvier, et consultée par Agra, le P.D.G. Philippe Mauguin et son directeur scientifique Christian Huygue rappellent que les modèles de sept agences de météo européennes et différents scénarios climatiques étudiés conduisaient bien à un risque de présence précoce de pucerons supérieur à 80 % dans les zones de culture pour 2021. «Avec des impacts sur le rendement.» Par ailleurs, poursuivent les dirigeants, si la biodiversité n’est pas mentionnée dans l’analyse jointe par l’institut à la consultation publique, elle est bien «au coeur des projets» sélectionnés par le Plan de recherche (PNRI) dédié aux néonicotinoïdes. Des projets dont la sélection avait elle-même fait polémique. Mais la réponse des dirigeants de l’Inrae à Sud assume surtout un nouveau discours sur les produits phytosanitaires. L’Inrae, écrivent Philippe Mauguin et Christian Huygue, est désormais «clairement positionné pour une sortie des pesticides». Et dans le cas spécifique des néonicotinoïdes, indiquent-ils, il n’est même «pas nécessaire de savoir si [cette sortie] sera crédible ou volontaire», car elle «aura lieu» au terme des dérogations récemment accordées. Alliance européenne pour la recherche d’alternatives, métaprogramme dédié au bio, ou programme Cultiver Autrement : l’institut rappelle au passage que sa stratégie Inrae 2030 prévoit d’«accélérer les transitions agro-écologiques et alimentaires».
Glyphosate : la commission de déontologie défend des évaluations supplémentaires
Dans un avis publié le 10 janvier, la Commission de déontologie et alertes en santé publique et environnement (CNDASPE) recommande au gouvernement français de demander deux évaluations supplémentaires dédiées à la déontologie dans le cadre du processus de ré-homologation du glyphosate. Alors que la France occupe la présidence du Conseil de l’UE, celle-ci devrait ainsi plaider pour un panel d’expert indépendants chargé d’examiner les «liens d’intérêt de chacun des experts membres des comités qui ont participé au pré-rapport d’évaluation des États rapporteurs». De même, Paris devrait demander à la commission qu’«une analyse critique» sur le pré-rapport soit conduite par des spécialistes internationaux «spécialistes en toxicologie en matière de cancer, de génotoxicité, de reprotoxicité et de perturbation endocrinienne, ainsi qu’en matière d’écotoxicologie». Autant d’experts qui ne devront pas posséder des intérêts «vis-à-vis de l’utilisation de produits phytopharmaceutiques et de leurs substances actives», précise la CNDASPE dans son avis.
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