L'Oise Agricole 02 octobre 2025 a 08h00 | Par FM

UE/Mercosur: l’opposition au traité tente de se structurer

Quelques semaines après la validation de l’accord UE/Mercosur par la Commission européenne, l’opposition au texte essaye de s’organiser. Des députés européens poussent pour demander un avis juridique de la Cour de justice de l’UE. Au Conseil de l’UE, certains ministres maintiennent leurs positions tandis que la France attend son gouvernement.

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- © Pexels/Travis Kerkvliet

Comme pressenti après la validation de l’accord UE/Mercosur par la Commission européenne lors de la réunion du collège des commissaires du 3 septembre, plusieurs eurodéputés issus de différents groupes politiques du Parlement européen (PPE, S&D, Renew, Verts, La Gauche) travaillent à un projet de résolution visant à solliciter la Cour de justice de l’UE.

Leur objectif est d’obtenir un avis juridique concernant la compatibilité de l’accord commercial avec les traités européens. Pour que cette résolution puisse être déposée, ce groupe de parlementaires doit rassembler soixante-douze signatures avant de la soumettre à la conférence des présidents du Parlement européen, puis en plénière. Si cette dernière approuve la résolution à la majorité simple, alors le processus de ratification de l’accord commercial sera ajourné jusqu’à ce que la CJUE ait rendu son avis. Une analyse qui prendra forcément du temps.


Bombe à retardement
Selon le projet d’avis, les auteurs craignent que l’architecture de l’accord proposée par la Commission européenne (scission entre un accord de partenariat et un accord commercial intérimaire) soit contraire à la directive de négociation. En outre, ils s’inquiètent d’une potentielle restriction à l’application du principe de précaution.

Enfin, ils considèrent que le mécanisme de rééquilibrage pourrait saper la capacité de l’UE à préserver l’autonomie de son ordre juridique et être utilisé par les pays du Mercosur pour faire pression sur le Vieux continent. Pour l’eurodéputé centriste français Pascal Canfin, il s’agit d’une «bombe à retardement» représentant une menace inédite pour la souveraineté réglementaire de l’UE.
Selon lui, la mise en place de cet outil, dont la forme est inédite dans un accord commercial bilatéral de l’UE, «durcit le coût politique des futures clauses miroirs» qui auraient des conséquences sur les flux commerciaux. Il estime que cela pourrait légitimer la mise en place d’une compensation par les pays du Mercosur. Celle-ci pourrait prendre, par exemple, la forme de quotas plus bas pour les voitures ou machines-outils exportées vers le Mercosur, intérêt offensif de l’UE. «Au lieu de tirer la mondialisation vers le haut par les normes européennes, l’UE ferait l’inverse en donnant un pouvoir considérable sur ces normes à des partenaires commerciaux aux normes plus faibles», précise-t-il.


Minorité de blocage
Il n’y a pas qu’au Parlement européen que la contestation s’organise. En France, une proposition de résolution, signée par plus de cent députés de tous bords, appelle l’État français à saisir, lui aussi, la CJUE. Un texte également soutenu par le principal syndicat agricole, la FNSEA, qui manifestait le 26 septembre contre le traité. Mais l’absence d’un gouvernement officiel rend la lecture de la position française plus floue pour ses partenaires européens.
Alors que le Conseil de l’UE devra autoriser ou non la Commission européenne à signer l’accord, certains États membres maintiennent leur opposition. C’est le cas, notamment, de la Pologne. En amont de la réunion du Conseil Agriculture du 22 septembre, le ministre polonais Stefan Krajewski a réaffirmé le rejet de l’accord par son gouvernement dans sa forme actuelle. Même chose pour le ministre autrichien de l’Agriculture Norbert Totschnig qui est tenu, comme son gouvernement, par une décision parlementaire qui prévoit un rejet clair de l’accord.

De son côté, le ministre irlandais Martin Heydon espère toujours le blocage du texte au Conseil de l’UE. «Il n’y a aucune garantie que cette minorité de blocage sera là, mais je continue à travailler avec les pays qui partagent nos préoccupations concernant l’accord avec le Mercosur», a-t-il ainsi déclaré. Toutefois, les ministres de l’Agriculture n’ont pas vraiment la main sur ce dossier qui tombe dans l’escarcelle de leurs homologues au Commerce. Ce sont eux qui auront le dernier mot.

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