L'Oise Agricole 01 décembre 2022 a 08h00 | Par Gaetane Trichet

Expandis : les marchés sont au vert

L'assemblée générale d'Expandis a eu lieu le 24 novembre dernier à Marchais. L'occasion pour les adhérents de faire le point sur une année 2022 correcte et une année 2023 qui s'annonce sous de bons auspices.

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Bruno Demory : «Expandis est une coopérative de services qui se fixe pour objectif de permettre de développer la culture de légumes et de pommes de terre sur nos exploitations en assurant la commercialisation et en maximisant la marge producteur.»
Bruno Demory : «Expandis est une coopérative de services qui se fixe pour objectif de permettre de développer la culture de légumes et de pommes de terre sur nos exploitations en assurant la commercialisation et en maximisant la marge producteur.» - © G.T.

«Nous venons de clôturer une campagne dont le résultat financier n'est que la résultante d'une volonté forte de votre conseil de payer au plus vite et au plus fort vos apports. Une coopérative n'est pas une entreprise comme une autre et son objectif est bien de valoriser au mieux les apports de ses associés. Durant la campagne 2022, les prix des apports se sont tous nettement accrus et les perspectives pour la campagne 2023 sont bonnes», a expliqué d'emblée Bruno Demory, président d'Expandis, se félicitant d'une demande des clients qui reste très forte et des prix en hausse. «Si l'on suit l'évolution du chiffre d'affaires hectare et le prix unitaire de nos principales productions, on voit que l'augmentation est marquée à partir de 2021, se prolonge sur 2022».

Pour les pommes de terre, le prix moyen base récolte devrait être de 140 EUR/tonne base récolte pour cette campagne 2022 et même si les négociations ne viennent que de commencer, l'objectif d'Expandis est d'aller chercher entre 25 et 30 % de prix supplémentaire pour atteindre les 180 EUR.

Pour les pois, l'augmentation prévue pour 2023 est de 100 EUR/t ce qui, à rendement constant, amènerait le chiffre d'affaires juste en dessous des 2.400 EUR/ha. La campagne jeunes carottes 2022 vient d'être bouclée et les adhérents vont recevoir leur règlement. «Le chiffre d'affaires moyen a bondi de 1.000 EUR l'hectare et la bonne valorisation de la précocité a permis d'améliorer sensiblement notre prix de vente».

Si les perspectives commerciales sont très bonnes, le président Demory a tenu à souligner deux points en particulier. L'eau d'abord. Car chez Expandis, 80 % des surfaces sont irriguées et les changements climatiques perturbent les rendements. «La souveraineté alimentaire passera nécessairement par une utilisation intelligente et efficiente de nos ressources en eau. Nos décideurs doivent comprendre que l'eau d'irrigation ne nous sert pas nous, mais sert directement les consommateurs, elle sert à nourrir notre population», a-t-il appuyé, remerciant au passage l'implication de Christophe Compère pour le pilotage de ce dossier dans l'Aisne et au niveau national.

La pression sur la fertilisation et la protection des cultures ensuite. Sur ce deuxième point, Bruno Demory entend faire perdurer le programme mis en place par Expandis avec Agrosolutions sur les itinéraires techniques pauvres en résidus. «La commission agronomie travaillera cet hiver sur une nouvelle feuille de route pour nous permettre de relancer la recherche, notamment sur des itinéraires moins gourmands en chimie, en eau et en énergie».

Chips et frites : la demande explose

Expandis évolue sur 4 marchés principaux : la pomme de terre à chips, la pomme de terre à frites, le plant et les légumes. La chips vogue sur un marché de petite taille, mais en constant développement depuis 10 ans. «Elle nécessite de la technique qui valorise bien l'intermédiation d'Expandis notamment à l'export. Nos clients étrangers (90 % de nos volumes chips), ont besoin d'intermédiaires pour assurer leur appro», a expliqué le président. Concernant les frites, le marché explose actuellement. «Il tire toute l'activité pommes de terre, mais renverse nos repères en termes de volume, de hiérarchie d'acteurs.» Côté plants, Bruno Demory entend relancer cette activité en réévaluant les prix payés afin que les agriculteurs puissent augmenter leurs surfaces. Il mise sur la recherche variétale pour des solutions génétiques aux éventuels problèmes environnementaux et sanitaires.

La demande augmente en légumes

Les légumes, le quatrième marché d'Expandis, ont le vent en poupe. Destinés principalement à la conserve et aux surgelés, ils sont peu transformés, relativement peu chers, se conservent longtemps... Tous les indicateurs montrent qu'ils devraient sortir gagnants de la crise inflationniste qui s'annonce.

«Le terroir de Marchais reste incontournable dans la production de jeunes carottes et de salsifis. Les industriels ont besoin de ces surfaces et de la précocité que l'on apporte. L'enjeu pour notre structure est de garder notre rôle d'intermédiaire. Pour cela, nous avons investi 1,5 million d'euros dans la rénovation et la mise à niveau de la station de lavage et dans deux nouvelles arracheuses pour la récolte 2023». En légumes verts, même si ces cultures restent sensibles aux aléas climatiques, la demande est forte, tant au niveau des clients que des adhérents. Tous ces marchés sont porteurs et Expandis est à la recherche de nouveaux producteurs pour répondre à la demande de ses clients.

Des marchés actifs, des prix en hausse... 2023 s'annonce comme une bonne année. Pour renforcer sa position, Expandis entend travailler sur trois axes l'an prochain : la communication, le recrutement de nouveaux adhérents, et l'amélioration de la valeur ajoutée de ses productions.

 

 

Les métiers de l'agriculture : l'alimentation et l'énergie

Changements climatiques, attentes sociétales, conflits armés, marchés bouleversés... comment les producteurs de légumes et de pommes de terre peuvent-ils se frayer un chemin dans ce contexte ? Thierry Pouch, chef du service études et prospectives à Chambres d'agriculture de France et chercheur à l'Université de Reims, a tenté de répondre à la question. Pour lui, pas de doute, l'agriculture est un atout géopolitique pour la France. Toutefois, des interrogations demeurent. Y-a-t'il une volonté politique forte de soutenir ce secteur à qui l'on demande une mutation profonde en réduisant les gaz à effet de serre, en intensifiant l'écologie sur les surfaces arables, en répondant aux attentes nouvelles des consommateurs ? Nombreuses sont les contradictions, le succès des dernières années est aujourd'hui contesté : des perspectives, mais des résistances (le modèle antérieur est jugé indépassable), une société française qui se fragmente avec des difficultés à répondre par un projet collectif, des agriculteurs gardiens de la nature et des paysages face à une performance agricole jugée dévastatrice pour les citoyens. Alors, une mutation de l'agriculture, oui, mais comment ? Agriculture de précision, agro-écologique, biologique, régénératrice ? Et quels financements ? Des capitaux propres aux agriculteurs ? Des apports extérieurs ? «L'agriculture est historiquement une affaire d'État et d'Union européenne aujourd'hui, avec des politiques agricoles, mais les mutations actuelles incitent les exploitants et les entrepreneurs à davantage d'autonomie» a expliqué Thierry Pouch, ajoutant également un enjeu de taille, celui du nombre d'agriculteurs pour conduire ce changement de modèle.

S'orienter vers de nouveaux débouchés

Après un tour du monde des céréales, des cours actuels des intrants et avec une Union européenne qui peine à s'entendre, l'intervenant reste perplexe devant l'accumulation de contradictions internationales, politiques et économiques. Selon lui, l'agriculture doit développer son autonomie énergétique... et fourragère. La méthanisation est une perspective ouverte et une contribution à la décarbonation des économies. Il faut s'orienter vers de nouvelles pratiques d'élevage et de cultures, stocker du carbone avec une compensation financière. «Il faut également desserrer la contrainte énergétique par temps de guerre et diversifier les sources de revenus en produisant à la fois des aliments et de l'énergie».

«Toutes ces données présentées peuvent laisser un sentiment de pertes de repères, d'une difficulté à lire l'avenir qui est très perturbante dans une organisation comme Expandis, attachée à la stabilité et la pérennité. Et pourtant, il est possible d'appréhender sereinement l'avenir si on est clair sur ses motivations, sur ses envies, sur la place que doit occuper notre coopérative au sein de la filière légumes-pommes de terre et au sein de nos exploitations», a souhaité rassurer Bruno Demory. «Expandis est une coopérative de services qui se fixe pour objectif de permettre de développer la culture de légumes et de pommes de terre sur nos exploitations en assurant la commercialisation et en maximisant la marge producteur. Sa stratégie : apporter aux producteurs et aux transformateurs des services qui seraient difficiles à réaliser individuellement. Être un maillon utile dans nos filières. Il nous faut regarder les choses calmement et lucidement, en ayant confiance en nous. Il y aura surement des adaptations à faire, mais l'histoire d'Expandis a montré que nous en sommes capables. Tous ensemble, relevons les défis de demain».

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