Budget du ministère de l'Agriculture: un débat flouté
Comme l'an passé, les débats parlementaires sur le budget de l'État sont devenus illisibles, car les amendements adoptés pourraient ne pas être retenus. Le rapporteur EPR Jean-Luc Fugit a fixé au gouvernement des objectifs de hausse du budget du ministère de l'Agriculture, mais difficile de savoir s'il sera entendu.
Les députés ont rejeté le 19 octobre en commission des Finances la partie «recettes» du budget 2025, après l'avoir largement modifiée par rapport à la copie du gouvernement. Passé à la moulinette de la commission, le projet de loi présenté la semaine dernière était devenu méconnaissable : articles clés supprimés, amendements à plusieurs milliards d'euros adoptés, nouvelles taxes ou exonérations à foison... En tout, près de
200 amendements avaient été entérinés, bouleversant considérablement l'équilibre financier du texte. Modifications finalement toutes balayées par un vote final négatif, par 29 voix contre 22, le Rassemblement national se retrouvant avec la droite et le centre dans le camp du rejet. Comme l'an passé, les débats sont devenus illisibles dans la perspective possible du recours au 49-3 par le gouvernement, ou d'une séance trop courte pour examiner l'ensemble des amendements.
Dans le secteur agricole, certains amendements d'envergure ont été adoptés en commission, sans que cela ne présage de leur sort final : extension des défiscalisations de la dotation pour épargne de précaution aux aléas économiques (sur proposition d'un député Les Républicains), création d'une taxe kilométrique (à l'initiative de LFI) ; reconduction du crédit d'impôts remplacement (Modem), hausse de la taxe sur la cession à titre onéreux des terrains nus ou des droits relatifs à des terrains nus rendus constructibles (socialistes), transferts de terres publiques à la Safer en Guyane (communistes), relèvement de la taxe affectée aux chambres d'agriculture (plusieurs groupes). L'examen en séance publique a débuté cette semaine, sans que l'on sache si l'ensemble des amendements pourra être examiné. Dans le cas contraire, c'est le texte initial du gouvernement qui serait envoyé au Sénat.
«Muscler le budget»
Difficile également de savoir que retenir de l'examen pour avis de la partie dépenses par la commission des Affaires économiques, qui a abouti, le 23 octobre, à une hausse des dépenses. Le rapporteur Jean-Luc Fugit a présenté les trois conditions auxquelles il accepterait d'adopter le budget de la mission Aafar (ministère de l'Agriculture). Sans que l'on sache si la demander de «muscler le budget du ministère» portée par ce député EPR (anciennement Renaissance) sera entendue par le gouvernement dont son groupe est partie prenante.
Première condition : retrouver «à horizon de trois ans» un niveau de dépenses de 1 MdEUR pour la planification écologique, autrement dit le niveau atteint lors du PLF 2024. Deuxième réserve posée par le député du Rhône, un département qui compte une majorité d'exploitations produisant du vin, des fruits, des légumes ou fleurs : les crédits alloués au plan souveraineté Fruits et légumes doivent être «sanctuarisés» ; dans un amendement, il a demandé à cette fin une hausse de 35 MEUR des crédits alloués à ce dispositif. Enfin, Jean-Luc Fugit demande à l'État de renoncer à la baisse du plafond d'emploi de l'ONF - dans sa copie, le gouvernement lui fait supporter l'essentiel de la centaine d'équivalent temps pleins supprimés au sein du ministère de l'Agriculture. Le député a par ailleurs fait des propositions pour limiter de 35 MEUR la baisse prévue du Pacte pour la haie (de 110 MEUR à 30 MEUR) et demandé une «sécurisation» du budget du Parsada (anticipation des impasses en pesticides), partie intégrante du plan Ecophyto, dont les moyens sont prévus en baisse (de 250 MEUR à 160 MEUR).
Jean-Luc Fugit a également présenté à la commission des Affaires économiques le 23 octobre les grandes lignes de son rapport thématique sur les politiques sanitaires dans le monde de l'élevage, plaidant pour «un État stratège» et une hausse substantielle des moyens alloués par le ministère de l'Agriculture, y compris à l'Anses. Pour ce faire, le rapporteur a déposé un amendement plaidant pour une hausse de 150 millions d'euros (MEUR) de la ligne budgétaire «Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation». Le texte prévoit que cette somme serait prélevée sur la ligne de dépense générale «Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture», mais invite le gouvernement «à les rétablir au cours de la discussion».
Dans le détail, ces fonds permettraient la prise en charge de «70 % du coût de la vaccination contre l'influenza aviaire (environ 90 MEUR)», «du coût de la vaccination d'un million de bovins contre la MHE (environ 10 MEUR)», «du coût de la vaccination contre la FCO-3 (environ 30 MEUR)», «de 70 % du coût de la vaccination contre la FCO 8 dont la prise en charge n'est pas prévue par le gouvernement à ce stade, mais pour laquelle un accompagnement devrait être prévu (provision de 20 MEUR)».
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