L'Oise Agricole 14 avril 2019 a 14h00 | Par Magdeleine Barralon

Débardeur à cheval, un métier de coopération

Florent Daloz exerce son métier de débardeur par traction animale depuis près de 25 ans. Une pratique professionnelle qui favorise le respect et l’intégrité de la forêt et des milieux naturels.

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Florent Dalloz avec son Comtois et son Percheron. «Dans l’association tous les chevaux répondent aux mêmes ordres. On peut donc utiliser les animaux d’autres débardeurs».
Florent Dalloz avec son Comtois et son Percheron. «Dans l’association tous les chevaux répondent aux mêmes ordres. On peut donc utiliser les animaux d’autres débardeurs». - © Magdeleine Barralon

Levé à 6 h 30, Florent Daloz attaque le travail du bon pied. Première tâche du matin : nourrir les chevaux avec la première des trois rations énergétiques qu’ils recevront pendant la journée. Viennent ensuite les soins, le brossage, le curage des pieds avant d’embarquer les équidés sur le chantier.

Homme et chevaux entament ainsi une journée de 7 h, ponctuée de temps de pause. «Suivant l’ampleur des chantiers, nous travaillons seuls ou en équipe», indique le débardeur. «Mais quoi qu’il arrive, il y a toujours au moins trois chevaux sur place, pour faire un roulement et pour parer à d’éventuelles blessures. Il nous arrive parfois d’avoir un attelage de six chevaux. Ça demande de la précision».

Complémentaire au travail de transport, le recours au cheval est la marque d’une démarche respectueuse de la forêt et du milieu. Son travail, le débusquage, consiste à traîner les arbres abattus jusqu’à la piste accessible aux engins. Silencieux, le cheval est une énergie non polluante. Très maniable, réactif, agile, précis, il pénètre et intervient dans la parcelle sans tasser le sol, sans écraser les jeunes végétaux, ni abimer le bois sur pied.

Relation homme-cheval forte

Le métier de débardeur à cheval, demande deux compétences : une connaissance approfondie de la forêt et du travail de forestier et bien sûr celle de ses chevaux nécessitant un dressage spécifique. «Notre rôle consiste à placer nos bêtes, à choisir la bonne trajectoire pour les faire slalomer entre les arbres», explique Florent Daloz.

«On fait appel à tous les moyens pour permettre aux troncs de glisser le mieux possible. Lorsqu’il y a de fortes montées, le débardeur met en place un système de poulies (ndlr mouflage) pour diviser la charge. La descente représente de vrais dangers car il faut savoir lancer les grumes sans faire prendre de risques ni aux animaux, ni aux humains», confie-t-il. «C’est technique ! L’approximation n’a pas sa place. Il faut qu’il existe entre l’homme et le cheval une relation forte et une grande complicité».

Un parcours semé d’embuches

«J’ai débuté ma carrière dans les années 80 comme bucheron-tâcheron chez différents employeurs», reprend Florent Daloz. Mais les salaires étaient tellement bas qu’au bout de cinq ans, il décide d’aller travailler en Suisse avec un permis transfrontalier. «C’est là-bas que j’ai vraiment appris mon métier. En Suisse, le bois est vendu, abattu et trié bord de route. Les gardes maîtrisent la gestion et l’exploitation. En partenariat avec eux, on marquait, triait les lots avant de les débiter.»

Fort de son expérience et avec l’envie de diversifier son activité, il participe à un stage de débardage avec des chevaux. «J’ai tout de suite accroché et entrepris une formation au CFPPA de Noirétable (NDLR Loire) puis effectué des stages en Wallonie. C’était au milieu des années 90, l’activité de débardage à cheval là-bas était bien développée, car la prise de conscience de la nécessité de la protection de la forêt était déjà très développée».

Revenu dans le Jura, Florent Daloz créé son entreprise de travaux forestiers Alternative Débardage à Belleydoux, avec la volonté d’œuvrer en faveur de la protection du milieu.

Les premières années sont catastrophiques, il se heurte à l’hostilité de la profession qui se moque de son activité lui démontrant qu’il n’y a pas de place pour elle. Et de fait, il y a peu de travail. En 2000, il envisage même de tout arrêter.

La réussite par la diversification

«Et, puis après la tempête de 99, je trouve du travail dans le Limousin, à la demande de la DDA (ndlr Direction départementale de l’agriculture) de l’époque et du parc régional. Il s’agit de dégager les embâcles qui obstruent le lit de cours d’eau inaccessibles aux engins. Des interventions très techniques qui demandaient la prestation de professionnels et qui pour le coup étaient rémunérées à leur juste valeur», confie-t-il.

«Je vais travailler pendant 5 ans à raison de six mois par an et développer ainsi le volet environnemental de mon activité». En communiquant sur son expérience, il obtient de nombreux contrats d’entretien de rivières et rencontre d’autres débardeurs à cheval avec qui il crée le groupement Débardage Cheval Environnement (DCE)*. Son activité est aujourd’hui recentrée sur les départements de l’Ain et du Jura et ceux de l’ancienne région Rhône-Alpes.

Maniable, agile réactif les chevaux vont là où les engins ne peuvent pas accéder sans détruire le milieu.
Maniable, agile réactif les chevaux vont là où les engins ne peuvent pas accéder sans détruire le milieu. - © Magdeleine Barralon

Débardage Cheval Environnement

Cette association créée en 2006 par une dizaine de débardeurs à traction animale est un groupement professionnel. Originaires de toute la France, les membres se sont réunis pour faire reconnaître leur profession, leur expertise et leur savoir-faire. DCE intervient en forêt de production et de protection, en zones protégée, comme les sites Natura 2000, les réserves naturelles, les parcs nationaux, les tourbières, les sites classés, les zones sensibles au tassement du sol, au dérangement d’espèces rares, les forêts péri-urbaines à forte fréquentation touristique, sportive ou pédagogique, les zones non accessibles par les engins mécanisés et les cours d’eau.

Plus de détails sur www.debardage-cheval-environnement.com

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