L'Oise Agricole 01 décembre 2022 a 08h00 | Par Alix Penichou

La Safer Hauts-de-France veut démystifier son rôle auprès de la filière équine

La Safer ? Les porteurs de projets équins préfèrent généralement s'en passer, pensant que l'organisme les desservirait. Pourtant, l'opérateur foncier rural s'engage dans l'accompagnement de cette filière.

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Pour la filière équine, les opportunités foncières sont rares. «Il faut aller vite quand ça se présente», avoue-t-on à la Safer Hauts-de-France.
Pour la filière équine, les opportunités foncières sont rares. «Il faut aller vite quand ça se présente», avoue-t-on à la Safer Hauts-de-France. - © Pixabay

Un peu plus d'un millier d'élevages, plus de 90 000 ventes d'équidés, 68 000 licenciés à la Fédération française d'équitation et un attrait post-Covid inédit pour ce sport de plein air, 3 300 salariés, plus de 400 MEUR de chiffre d'affaires, 11 hippodromes, un centre d'entraînement de galop international (chiffres IFCE de 2021)... La filière équine pèse en Hauts-de-France, et celle-ci a évidemment besoin de foncier pour se développer. La Safer Hauts-de-France tient à y participer. Elle consacrait une étape de son Terri'tour à ce sujet, ce 29 novembre à Beauvais.

«Depuis la loi de février 2005 relative au développement des territoires ruraux, les activités de préparation et d'entraînement des équidés domestiques en vue de leur exploitation, à l'exclusion des activités de spectacle, sont considérées comme activités agricoles», rappelle Claire Fouquet, conseillère foncier et référente équestre à la Safer Hauts-de-France. La tâche n'est pourtant pas évidente. «De nombreux porteurs de projets de cette filière craignent les échanges avec la Safer, souvent par manque d'informations. Nous avons pourtant oeuvré à l'installation de plusieurs professionnels équins. Il nous faut démystifier notre rôle», avoue Hubert Bourgeois, directeur général.

La Safer elle-même travaille à s'améliorer sur le sujet. «Nous ne disposons pas d'un réseau d'experts officiel comme l'équi-projets de la Safer Normandie - ce serait notre idéal -, mais nous entretenons des relations étroites avec les différents acteurs de la filière qui nous permettent d'entourer les porteurs de projet», ajoute Claire Fouquet. Le développement de la filière équine en Hauts-de-France est notamment encouragée par le Plan cheval de la Région, voté pour 2023-2026. «Nous avons alloué 6,3 MEUR de budget pour le soutien aux investissements des structures et au maintien des races locales (Trait du Nord, Boulonnais, Henson)», note Denis Pype, président de la commission Agriculture-Agroalimentaire à la Région. 76 projets ont été accompagnés dans le cadre du premier Plan cheval (2019-2022).

Il est «vivement conseillé» aux demandeurs d'aides de soumettre au préalable son dossier au Conseil des chevaux Hauts-de-France. «Nous concentrons toutes les compétences régionales liées au cheval, en faisant l'interface entre les professionnels du cheval et les institutions publiques et privées. Nous réunissons une vingtaine de membres actifs représentant plus de 2 800 socio-professionnels de la filière équine régionale», présente Fanny Carpentier, responsable de projet au Conseil des chevaux. Les professionnels peuvent aussi être épaulés par Equicer, un réseau de conseillers spécialistes de la gestion de ces structures, qui émane des Cerfrance.

Des techniciens, mais pas des gestionnaires

Ces structures ont du pain sur la planche, car «le monde du cheval est très diversifié et très complexe. Selon les activités, des régimes fiscaux et sociaux différents s'appliquent», explique Émilie Yvart, conseillère chez Equicer. Globalement, Fanny Carpentier remarque «un manque de formation sur la gestion des entreprises». «Beaucoup de porteurs de projets ont des compétences techniques solides dans leur domaine, mais ne sont pas des gestionnaires. On les accompagne sur ce plan.» Les spécialistes pointent les principales faiblesses. «Beaucoup ne connaissent pas leurs coûts de fonctionnement.» Les éleveurs ont aussi «du mal à entrer dans leurs frais», malgré un prix de vente des chevaux en hausse depuis 2021. Les entraîneurs de chevaux de courses, eux, subissent le manque de propriétaires de chevaux. «La multipropriété semble être une réponse.»

Enfin, le foncier est le nerf de la guerre. Il est indispensable au bien-être animal, «sujet d'actualité brûlant», pour pouvoir proposer des espaces et du pâturage aux animaux, ainsi qu'à la production fourragère. «Beaucoup d'éleveurs n'ont pas la capacité de produire leur fourrage, alors que l'alimentation est le deuxième poste de dépense après la main-d'oeuvre», précise Émilie Yvart. Mieux communiquer sur le rôle de la Safer est donc primordial. «Les opportunités foncières sont rares. Il faut aller vite quand ça se présente», alerte Hubert Bourgeois.

Les Safer aux côtés des élus pour protéger la ressource

À l'occasion du salon des maires, la Fédération nationale des Safer (FNSafer) a présenté les actions engagées pour accompagner des projets concernés par des enjeux environnementaux et notamment ceux relatifs à la question de l'eau (préservation des zones humides, préservation de la ressource en eau portable). Cette intervention s'inscrit dans le contexte de la parution du décret du 11 septembre 2022 sur le droit de préemption sur les aires de captage d'eau. «Nous préférons la négociation à la préemption», explique Emmanuel Hyest, président de la FNSafer. Sur les dix premiers mois de 2022, l'ensemble des Safer a eu à traiter 516 dossiers en matière de préservation de la ressource en eau concernant 3 296 hectares (dont 210 opérations sur 1 461 hectares pour la seule préservation de l'eau potable). «88 % des dossiers pour 93 % des surfaces ont été réglées par des négociations à l'amiable, ajoute le président. C'est la connaissance des territoires, l'accompagnement des agriculteurs et la collaboration avec les collectivités qui permet d'avancer». «La totalité de ces opérations fait l'objet d'un cahier des charges garant de la viabilité du projet.» Des projets qui sont engagés pour des durées de dix à trente ans.

Deux opérations récentes ont été présentées pour expliquer la démarche des Safer. En Charente-Maritime, Eau 17 était confronté, sur la commune de Landrais, à un problème de qualité de l'eau (taux de nitrates élevé). La Safer Nouvelle-Aquitaine a mis en place une stratégie foncière avec pour objectif de diminuer les intrants par l'instauration ou le maintien des prairies et le développement de l'agriculture biologique. Autre dossier, celui de la Communauté de communes Le Grésivaudan, Isère. La Safer Auvergne-Rhône-Alpes est intervenue dans ce dossier sur un périmètre de captage soumis à de forts enjeux : développement économique, habitat, une agriculture dynamique, une ressource en eau à préserver. Elle a mis en place une stratégie foncière visant à concilier les enjeux agricoles (installation et confortation) et ceux liés à la protection de la ressource en eau (adaptation des pratiques bio). L'ensemble des participants a insisté sur l'importance du collectif. Emmanuel Hyest qui appelle à «l'intelligence collective». «J'invite les élus à se rapprocher des Safer qui intègrent complètement cette problématique de l'eau».

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