L'Oise Agricole 24 juin 2022 a 15h00 | Par Dorian Alinaghi

Doit-on tendre vers un nouveau mode de consommation ?

A l'occasion des 20 ans de la formation, l'établissement UniLaSalle a organisé un colloque professionnel exceptionnel sur les nouveaux enjeux alimentaires : Et si demain, l'alimentation était personnalisée et responsable ?

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Pour les intervenants, avec l'importance de l'inflation, le portefeuille va dicter l'attitude alimentaire même si les personnes ont une pensée inverse sur le mode de consommation.
Pour les intervenants, avec l'importance de l'inflation, le portefeuille va dicter l'attitude alimentaire même si les personnes ont une pensée inverse sur le mode de consommation. - © D.A.

Premier secteur industriel du pays, l'industrie alimentaire est une pépite de l'entreprise France. Elle a fait preuve de résilience pendant la crise de 2008 mais aussi celle du Covid, démontrant ainsi sa solidité. Une mission : nourrir la planète. Les priorités du secteur : «il faut faire émerger les solutions de demain et dynamiser l'ensemble des entreprises. Cela passe par le soutien à la foodtech et la consolidation du réseau d'incubateurs et d'accélérateurs. Avoir des start-up food fortes est un moyen de dynamiser le secteur et d'assurer sa compétitivité future.» souligne Françoise Gorga, directrice recherche et innovation à l'association nationale industrie alimentaire. De plus, les efforts doivent passer par la structuration de recherche en fermentation afin de mutualiser sur les savoir-faire des entreprises, dont plusieurs leaders mondiaux, et les compétences de pointe des instituts de recherche pour développer de nouveaux produits intéressant notamment le marché de l'alimentation santé (estimé à 1000 milliards d'euros en 2030). La fermentation permet par ailleurs de rendre consommables les nouvelles ressources de protéines végétales. «Nous devons également travailler sur le grand défi protéines pour répondre aux enjeux sociétaux, environnementaux et économiques liés au développement et au renforcement de la filière des protéines. Il s'agit d'organiser et de promouvoir la filière protéines en France pour répondre à la forte croissance démographique et à la transition nutritionnelle tout en renforçant la dépendance aux importations de protéines dont souffre l'Europe. Avec son expertise sur les filières agricoles, alimentaires et protéiques, la France dispose des compétences nécessaires pour saisir l'opportunité de se positionner comme un des leaders mondiaux dans l'approvisionnement en protéines à l'horizon 2033. Par ailleurs, la foodtech en France se caractérise par de nombreux projets autour de la valorisation des nouvelles sources de protéines.» poursuit-elle. La dernière priorité du secteur est de créer une usine alimentaire de demain. L'idée est d'inspirer les patrons de PME/TPE qui n'ont pas les mêmes accès à la recherche et à l'innovation que les grands groupes en créant un démonstrateur d'usine alimentaire du futur : moderne, verte, numérique. Cela pourra accélérer l'intégration, au sein des usines, des nouvelles technologies pouvant répondre aux enjeux de : flexibilité et agilité ; sécurité et qualité ; développement durable ; opérateur de demain et formation ; connectivité et valorisation des données.

Fusion du numérique et du physique

Pour le Groupe Lesaffre, acteur majeur mondial de la fermentation depuis plus d'un siècle, nourrir sainement 9 milliards d'habitants en 2050 en utilisant au plus juste les ressources de la planète, est un enjeu majeur et inédit. «Nous croyons que la fermentation est l'une des réponses les plus prometteuses à ce défi. L'infini potentiel des micro-organismes (levures, bactéries,) nous permet de nous positionner sur les marchés industriels. Les crises que nous traversons ont bouleversé nos conditions de travail et parfois même nos habitudes de vie, modifiant ainsi nos instants de consommation et orientant nos choix vers une prise de conscience de plus en plus marquée de l'impact de nos habitudes alimentaires sur notre santé et celle de notre planète.» Florianne Dudragne, Business Opportunity Manager (Marketing Intelligence) au groupe LeSaffre.

Ainsi, le groupe se focalise autour de plusieurs piliers permettant d'aborder de manière macro l'évolution des habitudes alimentaires et ce qui les oriente, surtout avec l'essor du numérique. «Il faut savoir que nous passons 5 h 34 sur internet, 2 h 19 sur notre smartphone, et 1 h 46 sur les réseaux sociaux. Cette informatisation dicte parfois notre alimentation.» affirme-t-elle. Au-delà de ça, les personnes cherchent de plus en plus du bien-être à travers les choix alimentaires.

Les fruits et légumes ont-ils une place de choix ?

Les fruits et légumes sont remplis de nutriments indispensables au bon fonctionnement de l'organisme : vitamines, minéraux, fibres... Ils apportent à l'organisme de l'énergie et aident à lutter contre les maladies cardiovasculaires, le diabète ou l'excès de cholestérol. De plus, ils contiennent des antioxydants qui protègent les cellules du corps des dommages causés par les radicaux libres.

Le plan national nutrition santé a marqué les esprits en rappelant que «Mangez cinq fruits et légumes par jour !» contribue à vivre en bonne santé. «Afin de soutenir et développer la consommation des fruits et légumes frais, Interfel vient de lancer une nouvelle campagne de communication intitulée «les fruits et légumes c'est jamais trop» pour déculpabiliser le consommateur, cesser les injonctions et renouer avec la notion de plaisir à table tout en insistant sur la diversité de l'offre en fruits et légumes frais...» souligne Pierre Varler, délégué régional Hauts-de-France à Interfel.

Les consommateurs sont de plus en plus exigeants en matière de qualité nutritionnelle, de diversité alimentaire, mais surtout de transparence sur des processus de production tout au long de la chaîne alimentaire, y compris l'impact environnemental et social (baromètre de consommation et de la perception des produits biologiques en France, publié récemment par l'agence bio). «En effet, plus de la moitié des Français (57 %) déclare avoir modifié ses comportements alimentaires et culinaires en 2018. Les visages de cette modification sont multiples : on veille davantage à la provenance de ce que l'on mange, à la manière donc cela est produit, au fait de manger des produits sains. La montée de la préoccupation environnementale joue un rôle moteur dans cette évolution.

Pour répondre aux attentes des consommateurs, il est nécessaire d'adapter les systèmes alimentaires. Par ailleurs, l'une des conclusions des Egalim est qu'il est possible et nécessaire de concilier la création de valeur dans les filières alimentaires et l'assurance d'une alimentation saine, sûre, durable et accessible à tous. Cela implique une modification de l'ensemble des filières alimentaires et de nouvelles relations entre les acteurs, de la production à la distribution.» assure-t-il. D'ailleurs, il existe différents leviers pour favoriser la transition des systèmes alimentaires actuels  :

- L'innovation nutritionnelle (accord collectif du PNA avec la réduction des teneurs en sel, sucre et gras et augmentation du taux de fibres dans les produits)

- Le partenariat entre l'industrie et l'agriculture pour favoriser le développement de pratiques agro-écologiques (accompagnement à la conversion en Bio pour les agriculteurs partenaires)

- Le rôle des technologies numériques pour favoriser la transparence dans l'ensemble de la chaîne, du producteur agricole au distributeur (plateforme connecting food).

Répondre à l'évolution des modes de consommation

La crise sanitaire ainsi que les différentes crises alimentaires traversées ces dernières années ont remis en cause les modèles alimentaires en démontrant la dépendance de la France à certains produits d'importation et le besoin de restaurer la confiance avec les consommateurs en s'inscrivant dans une économie de proximité qui permet de développer des systèmes alimentaires plus vertueux.

Dans les domaines agricoles et alimentaires, un changement structurel à l'échelle territoriale se met en oeuvre progressivement en France. La mise en place de projets alimentaires territoriaux et un accès facilité à une alimentation saine et durable devient un enjeu de politique publique (EGA en 2017).

«Parallèlement, on assiste depuis quelques années à une évolution du comportement du consommateur pour le localisme (Bienvenue à la ferme). Cette tendance favorable à la proximité, au local, s'est particulièrement manifestée dans les médias pendant la crise sanitaire du covid 19, et les Français ont, de fait, consommé davantage de produits d'origine française et issus des circuits courts (observatoire E. Leclerc en 2020)» explique Stéphanie Regnault, directrice du pôle agroalimentaire et bioprocédés à UniLasalle.

La part des exploitations agricoles pratiquant la commercialisation en circuit court est variable en fonction de la région. Selon l'étude de l'Agreste, les régions du sud de la France sont les mieux dotées en matière de circuits courts du fait du type de productions (légumières et fruitières) mais aussi d'une diversification plus grande des activités para-agricoles dont la transformation. De plus, la majorité des ateliers de transformation se situe dans la moitié sud de la

France. Ce constat témoigne de la corrélation entre le développement d'une activité de transformation et l'émergence de circuits de proximité.

L'évolution des modes de consommation a également conduit à l'émergence de nombreux projets de start-up notamment sous l'impulsion des protéines alternatives. Les produits végans, comme les substituts de viande à base de protéines végétales, voient leur demande croître révélant une tendance forte des consommateurs pour des aliments plus sains et plus naturels.

Or, la mise en place d'un atelier de transformation pour des petites structures peut se heurter à différentes contraintes financières, règlementaires et technologiques (investissements supplémentaires, formation de ressources humaines, réglementation sanitaire...). Elles sont donc confrontées à des problématiques structurelles, et sans accompagnement, le risque d'échec est élevé. Pour aider à la structuration de filières alimentaires locales à destination des consommateurs et de la restauration collective, UniLasalle s'est associé au CTCPA pour créer un atelier partagé de transformation alimentaire, d'innovation, de formation et d'accompagnement des exploitants agricoles, des acteurs de la restauration collective et des start-up. Cet atelier, dénommé FoodLaB, verra le jour en juin 2023. D'une surface de 700 m2, ce projet a été financé par le fonds européen de développement régional. Ce foodLab entend répondre à de nombreuses problématiques et vise à être le maillon manquant de la chaîne de valeur dans les secteurs agricoles et alimentaires locaux.

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