L'Oise Agricole 11 avril 2019 a 14h00 | Par Dorian Alinaghi

«L'agriculture est multifonctionnelle»

Hervé Ancellin, nouveau président de la Chambre de l'agriculture de l'Oise, présente ses objectifs et les attentes de son mandat.

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Hervé Ancellin, président de la chambre de l'Agriculture de l'Oise.
Hervé Ancellin, président de la chambre de l'Agriculture de l'Oise. - © Dominique Lapeyre-Cavé

Pouvez-vous nous dire la situation et le contexte agricoles du moment dans l'Oise et au niveau de la région ?

Hervé Ancellin : Le contexte économique est difficile, que ce soit pour des exploitations d'élevage ou de grandes cultures. Surtout en ce moment, avec le cours du sucre qui chute, ce qui entraîne une rémunération très faible. Dans nos exploitations picardes et Hauts-de-France, la betterave est un peu le socle de notre revenu, ce qui conduit à une inquiétude grandissante chez les agriculteurs.

De plus, il y a une pression environnementale importante avec des retraits de produits phytosanitaires. Alors que dans d'autres pays, ce n'est pas le cas. On parle des néonicotinoïdes sur la betterave qui sont pourtant utilisés en Belgique.

On trouve par ailleurs une très bonne dynamique des agriculteurs de l'Oise dans la souscription des mesures agro-environnementales. Aujourd'hui, les conditions d'accès et les objectifs sont difficiles à atteindre du fait des règles qui ont bougé au niveau du ministère de l'Agriculture. Malgré cela, il reste important de travailler sur des évolutions de pratiques. Autre problème qui se pose sur le département, la fermeture de l'abattoir de Montdidier. En effet avec le développement du circuit-court chez les éleveurs, si on n'arrive pas à avoir un abattoir ou un outil à proximité, on perdra des éleveurs ! Dès lors, on se bat avec la collectivité et la région afin d'installer et de créer de nouveaux projets qui nous permettrons de conserver notre beau métier. Il faut aussi essayer de travailler avec les fonds Leader car ils peuvent être une ressource afin de se diriger sur des projets de création de valeurs ajoutées et de développement en agriculture.

Quels sont vos objectifs en tant que nouveau président de la Chambre de l'agriculture de l'Oise?

H.A. : On voit que les filières de productions orientées vers l'export sont sujets aux aléas du marché et climatiques. On ne peut pas exclure ce type de productions, aussi transformées dans nos usines. On se rend compte, aujourd'hui, qu'un agriculteur installé ou nouvellement installé a du mal à se fixer des perspectives. On n'a pas de vision sur les cours de marché et sur le changement climatique. On a besoin de se sécuriser avec la contractualisation et l'idéal est d'être sur des filières plus au moins courtes. On a la chance dans notre département d'avoir un bassin de consommation à nos portes qui est sous-exploité. Avec la forte demande de produits locaux, il s'agit de pouvoir accompagner les agriculteurs pour intégrer ces marchés de proximité et apporter de la valeur ajoutée. Quand il s'agit de développer des filières, cela ne concerne pas que le maraîchage, mais cela comprend également les domaines énergétiques avec les panneaux photovoltaïques ou la méthanisation par exemple. On réfléchit aussi aux bassins de captages pour mettre en place du miscanthus sur des parcelles à enjeux.

Enfin, on sait qu'il y a une diminution du nombre d'agriculteurs. Mon objectif est de les accompagner et d'apporter des solutions afin de garder un nombre conséquent d'agriculteurs, mais aussi de susciter des vocations chez les jeunes. Les agriculteurs aujourd'hui sont en grande souffrance à cause d'un manque de reconnaissance par la société civile. Il faut savoir que les personnes qui entretiennent les paysages sont les agriculteurs, que l'excellence culinaire française vient des produits de qualité fournis par les agriculteurs. Je souhaite que les agriculteurs vivent décemment de leur métier.

Quel est le résultat des comptes 2018 ?

H.A. : Après un processus de redressement des comptes amorcé depuis deux ans, le compte financier 2018 fait apparaître pour la première fois un bénéfice et un fonds de roulement et une capacité d'autofinancement en nette amélioration. Les efforts fournis par l'ensemble du personnel et la maîtrise des charges portent leurs fruits. Pourtant, même si la recette fiscale reste constante, nous ne pouvons que constater une baisse des subventions, qu'elles proviennent de l'Etat ou des collectivités. C'est pour cela que nous développons nos prestations, pour acquérir une autonomie financière, tout en restant à l'écoute des besoins des agriculteurs et des collectivités.

Allez-vous continuer à travailler au sein des mêmes commissions avec les mêmes thèmes dans un premier temps ?

H.A. : On va continuer sur les thématiques actuelles. Ce que je souhaite, c'est travailler en élargissant le rayon. Cela signifie qu'il ne faut pas que ce soit uniquement des agriculteurs qui fassent partie de nos commissions. Par exemple, il faudrait associer plus l'institut UniLaSalle de Beauvais, notamment via le dossier AgriLab. L'idée est que cet établissement puisse nous apporter un public jeune. Les étudiants portent une vision de l'agriculture de demain et nous, agriculteurs, nous leurs apportons l'expérience et l'expertise.

Avec ces échanges, je pense que l'on peut trouver de belles perspectives pour notre agriculture. D'autres partenariats sont certainement à réfléchir, il ne faut pas s'écarter des start-ups du monde agricole car ça peut nous apporter un éclairage sur les services qui pourront peut-être aider demain l'agriculture.

En cette période de transition, le but est de travailler avec l'ensemble des acteurs du milieu agricole. L'agriculture aura plusieurs rôles : l'approvisionnement en matières premières, l'approvisionnement des circuits courts, la production d'énergie, la production de biodiversité...

Quel est le gros dossier à venir ?

H.A. : Je ne peux pas parler d'un dossier en particulier car tout est important. Mais celui qui me vient en tête en ce moment, c'est la ressource en eau. On sait qu'il faut trouver des solutions afin que les agriculteurs puissent se diversifier. Dès que l'on parle de diversification, il faut avoir accès à la ressource en eau ! On sait que l'on est dans un territoire qui commence à s'urbaniser avec un accroissement de la population. Dès lors, avec les Agences de l'eau et les services de l'Etat, nous allons travailler ensemble afin d'apporter des solutions pour l' accès à l'eau, mais aussi anticiper les aléas climatiques.

Autre sujet, il est important de maintenir le nombre d'agriculteurs sur notre territoire car si un agriculteur arrête son activité dans un village, c'est toute une économie locale qui sera touchée, mais aussi l'âme du village. De plus, il y a une déprise de l'élevage alors que l'on a un bassin important d'éleveurs. Ce qu'il faut se dire, c'est qu'il n'y a pas qu'une seule solution, mais une multitude de solutions pour maintenir notre activité. Il faut juste se mettre autour de la table et avancer dans la même direction, celle du bons sens, du dynamisme et de la valeur ajoutée. Il est essentiel que l'agriculture et les agriculteurs retrouvent une bonne image et une économie forte et stable.

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