L'Oise Agricole 13 octobre 2023 a 08h00 | Par YG

À Cournon, Fesneau présente son «plan de reconquête» pour l'élevage

En visite au Sommet de l'élevage le 3 octobre, le ministre de l'Agriculture a présenté un «plan de reconquête de notre souveraineté d'élevage». L'une de ses principales mesures, la défiscalisation des stocks de bovins, devait être annoncée par Bruno Le Maire le 6 octobre.

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- © Ministère de l'Agriculture

Fiscalité, abattoirs, communication, transition écologique... En présentant son «plan de reconquête», le 3 octobre au Sommet de l'élevage de Cournon (Puy- de-Dôme), le ministre de l'Agriculture a brassé large. Des mesures annoncées lors d'une conférence devant 500 étudiants et éleveurs, puis résumées sur le réseau social X (anciennement Twitter).

Les filières animales - en particulier bovines - réclamaient un signal encourageant des pouvoirs publics, notamment sur le renouvellement des générations. «Depuis deux ans, les prix se tiennent, mais la baisse de production nous préoccupe», résume le président de la FNSEA, Arnaud Rousseau. Marc Fesneau s'est donc montré rassurant, répétant que «nous avons besoin de l'élevage, pour nourrir et pour tout le reste, y compris pour les transitions». Paradoxalement, la mesure la plus frappante du «plan de reconquête» n'est pas dans les mains de Marc Fesneau... mais dans celles de son collègue de Bercy.

Bruno Le Maire était attendu vendredi 6 octobre à Cournon pour annoncer une mesure de défiscalisation des stocks de bovins, réclamée par la FNSEA. Un déplacement et une annonce qui n'étaient pas encore officialisées à l'heure où ces lignes sont écrites. Mais qui ne faisaient guère de doute aux yeux d'Arnaud Rousseau : «Bruno Le Maire a compris qu'il y a un enjeu de préservation de l'élevage», a-t-il lancé à la presse le 4 octobre.

 

Défiscalisation de «50 à 100 MEUR»

Comme l'indiquait Luc Smessaert, vice-président de la FNSEA le 29 septembre, il s'agirait de «neutraliser l'effet de l'inflation» en défiscalisant partiellement les stocks de bovins présents en élevages (cheptel souche de vaches laitières et allaitantes), dont la valeur a fortement augmenté. Avec la flambée du prix de la viande - liée notamment à la décapitalisation -, «la valeur des vaches a pris entre 400 et 500 EUR en un an», note cet éleveur de l'Oise, soulignant que leur fiscalisation complète «risque d'accélérer la décapitalisation».

«Cette ponction fiscale supérieure ne nous paraît pas légitime, car cette inflation ne crée aucune valeur pour l'éleveur», estime Arnaud Rousseau. D'après le ministre de l'Agriculture, cette mesure fiscale pourrait représenter une enveloppe de «50 à 100 millions d'euros» (MEUR) de manque à gagner pour les comptes publics. «Il est essentiel qu'on puisse aller le plus loin possible», a insisté M. Rousseau, tout en notant que «100 MEUR ne permettront pas de couvrir totalement la survalorisation des stocks». Selon lui, il faudrait près de 140 MEUR pour compenser l'intégralité du surcoût fiscal dû à l'inflation.

Plus largement, «c'est bien que Bruno Le Maire vienne s'expliquer de manière apaisée», a commenté le patron de la FNSEA, dans un contexte de relations tendues entre le monde agricole et le locataire de Bercy.

 

50 MEUR pour la stratégie abattoirs

Dans le détail, la FNSEA propose, dans le cadre du projet de loi de finances (PLF) pour 2024, de sortir de l'assiette fiscale une «provision» de 250 EUR par animal de plus d'un an, dans une limite de «15 000 EUR par exploitant». Les agriculteurs auraient alors «six ans pour la réintégrer», explique Luc Smessaert. Mais, afin d'inciter à maintenir les effectifs, les éleveurs pourraient la conserver «si on constate que leur cheptel est maintenu ou a augmenté».

Sans ce dispositif, «les éleveurs peuvent être tentés de se séparer de quelques animaux pour payer le même niveau d'impôt», craint M. Rousseau. Lors de sa visite à Cournon, le ministre de l'Agriculture a annoncé les autres volets de son plan pour l'élevage. Il a ainsi indiqué que la stratégie abattoirs sera dotée de 50 millions d'euros (MEUR) pour préserver leur «maillage territorial».

Cette enveloppe, qui consiste en «une garantie des encours d'emprunt», doit permettre aux outils en difficulté de «passer le cap». Comme annoncé, cette stratégie se double d'un «travail d'analyse précise par bassin de production, pour regarder le maillage dont on a besoin». Autrement dit, restructurer le secteur de l'abattage, qui reçoit de moins de moins d'animaux.

 

Campagne de communication

Marc Fesneau a aussi dit vouloir «dédier une enveloppe d'environ 20 MEUR dès cette année» à la recherche sur les questions sanitaires. Le but ? Trouver des moyens «d'éradiquer des maladies et des ravageurs qui nuisent à l'élevage», a-t-il indiqué, sans préciser lesquels. Le locataire de la Rue de Varenne a aussi annoncé «au moins 3 MEUR» pour lancer une campagne de communication sur l'élevage, afin de «re-rentrer en dialogue avec nos concitoyens». «Il faut que l'on montre les apports de l'élevage non seulement pour la souveraineté, mais aussi pour les paysages, les traditions, la biodiversité, le stockage de carbone...»

Le ministre a enfin précisé la part dédiée à l'élevage dans certaines enveloppes plus larges. Dans le cadre de la Planification écologique, qui voit la Rue de Varenne bénéficier d'un milliard d'euros supplémentaire en 2024, 30 MEUR seront spécifiquement fléchés vers la décarbonation de l'élevage (couverture des fosses à lisier, alimentation animale). Le secteur bénéficiera aussi de 40 % de l'enveloppe de 1 MdEUR de prêts garantis par l'État, soit 400 MEUR, pour «financer des projets d'installation ou des investissements innovants».

Pour rappel, c'est en juin, après le tonitruant rapport de la Cour des comptes, que Bruno Le Maire avait annoncé à la FNB (producteurs de bovins viande, FNSEA) qu'il était «prêt à travailler» sur un «plan de relance». Quelques jours avant le Sommet de l'élevage, la filière avait précisé ses demandes, faisant monter la pression sur le gouvernement.

Dans un communiqué du 3 octobre, l'interprofession bétail et viandes (Interbev) identifiait sept «enjeux clés». Elle exhortait notamment l'État à «sensibiliser les banques pour qu'elles continuent à financer» le secteur, ou encore à «revaloriser le budget de la commande publique alloué au poste alimentation». Outre des demandes déjà formulées (étiquetage environnemental, accords de libre-échange), l'interprofession appelait l'État à investir dans la «transition numérique de l'identification des bovins».

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